L'écrivain russe Alexandre Issaïevitch Soljenitsyne est décédé dans la nuit de dimanche dernier à son domicile à Moscou à l'âge de 89 ans des suites d'une insuffisance cardiaque aiguë. Il sera inhumé demain au cimetière du monastère Donskoï à Moscou. Considéré comme l'un des écrivains les plus illustres de son siècle, Soljenitsyne est connu pour sa dissidence au régime totalitaire de Staline avec ses sévices, goulags et violations des droits de l'homme. Né le 18 décembre 1918 dans le Caucase, il fait des études en mathématiques. Artilleur durant la Seconde Guerre mondiale, il critique dans une lettre à un ami les compétences militaires de Staline. D'où sa condamnation à huit ans de camp. Libéré en 1953, il part en Asie centrale puis s'installe à la partie européenne de l'ex-URSS pour se consacrer à l'enseignement à Riazan. L'arrivée au pouvoir de Nikita Khroutchev marque une période de dégel du régime. Ainsi, en 1962, Soljenitsyne publie Une journée d'Ivan Denissovitch. Récit qui met à nu la vie dans les goulags à travers une journée ordinaire d'un détenu. S'en suivent d'autres ouvrages, à l'exemple de La Maison de Matriona en 1963. Déterminé à dénoncer le régime des camps, le totalitarisme et la censure, il récidive en publiant en samizdats en 1968 Le Pavillon des cancéreux, Le Premier cercle et Les droits de l'écrivain. Prix Nobel de littérature en 1970, il renonce à aller à Stockholm de peur qu'on ne le laisse pas revenir dans son pays. Il finit par être expulsé de son pays en 1974 après avoir été déchu de sa nationalité. Il s'installe alors en Allemagne, Suisse et Etats-Unis. Durant son exil, il publie plusieurs ouvrages comme L'Archipel du goulag, Message d'exil et L'erreur de l'Occident, respectivement en 1979 et 1980. Il retourne en Russie en 1994, fustige la classe politique en place et dénonce la corruption qui sévit dans son pays. En 2001-2002, il fait sortir Deux siècles ensemble puis en 2007 Aime la révolution et Une minute par jour. Orthodoxe et attaché aux valeurs ancestrales russes, il prône le retour aux sources profondes des traditions de la société pour permettre à la Russie de relever les défis du siècle et vivre dans la prospérité. Aussi se montre-t-il critique à l'égard de la société occidentale. Soljenitsyne laisse pour l'humanité une œuvre prolifique qui témoigne des maux de son siècle. Une œuvre qui s'inspire certes de la réalité politique, historique, sociale, culturelle russe mais porteuse de valeurs universelles pour lesquelles des hommes et des femmes se battent et aspirent depuis des siècles. Ecrire sur les camps et ses sévices et la censure, c'est exhumer la bête immonde qui se cache en l'Homme et qui fait de lui un monstre. Il déshumanise ses semblables et décide de leur vie, se crée un « idéal » en lequel il est à croire pour justifier ses crimes et avoir ainsi la conscience tranquille.