En ce matin du 20 août, elles étaient une vingtaine de personnes, entre femmes, hommes et enfants de tous âges à crier leur colère et leur désespoir de n'avoir pas été retenues parmi les 84 familles ayant bénéficié du logement social. En plein cœur de la paisible ville de Aïn Tédelès, ce sont plusieurs familles qui crient leur désespoir depuis l'affichage des listes d'attribution des logements sociaux. En ce matin du 20 août, journée du Moudjahid célébrée cette année au niveau de la commune côtière de Sidi Lakhdar, elles étaient une vingtaine de personnes, entre femmes, hommes et enfants de tous âges à crier leur colère et leur désespoir de n'avoir pas été retenues parmi les 84 familles ayant bénéficié du logement social. Ils habitent pour la plupart au niveau du Haouch Amrane, un véritable taudis dont la propriétaire n'a qu'une envie, le raser au plus tôt. En effet, selon les déclarations des locataires, dont certains y logent depuis une dizaine d'années, la propriétaire les aurait informés de son intention de raser cette bâtisse qui s'apparente à un véritable réduit. Recensés par des commissions dûment habilitées, ces femmes et ces hommes se précipitent pour montrer le fameux P.-V. de ladite commission, document qui leur ouvre en principe droit à un logement social. D'où leur détresse de devoir encore une fois remiser leurs espoirs et oublier les promesses qu'elles disent avoir reçues de la part des responsables. Mais voilà, la construction des logements sociaux suit une courbe diamétralement opposée à celle des besoins. Car, uniquement pour la commune de Aïn Tédelès, combien sont-elles les familles vivant dans la précarité ? Des centaines, des milliers, qui sait ? Cette cruelle réalité n'est malheureusement pas facile à opposer à des familles qui vivent vraiment dans un insoutenable dénuement. Chez la famille Dahmane, qui compte 6 enfants, il paraît impossible de parvenir à faire dormir ensemble toute la famille tant l'espace est exigu. Fatma, la mère de famille qui affiche une réelle détermination, nous dira avoir été recensée par 4 commissions en 10 ans. Très motivée, elle nous montre le plafond en planches crasseuses et une partie du mur qui vient d'être refait en parpaing, preuve d'une réelle incertitude des lieux. Détresse Dans autre espace tortueux, vivent également H'lima Belarbi et ses 6 enfants. Ils sont là depuis 5 ans et avaient bon espoir d'être parmi les heureux élus. Mais leur détresse aura fortement déteint sur d'autres misérables familles. Allouche Mansouria, qui dit être la fille du chahid Meddah Bendhiba, est venue se joindre à la protestation. Habitant au douar Barès, elle déclare vivre dans un débarras contre la somme de 3000 DA/mois. Divorcée depuis 5 ans, elle vit avec ses 4 enfants à charge. Abbassa Touil, en charge d'une famille de 5 personnes, vit dans ce haouch depuis 2002. De son côté, Bekkaddour Med affirme loger dans une baraque depuis 18 ans. Abritée derrière un muret crasseux, une jeune femme n'a pas trouvé mieux que de dresser une minuscule tente de camping où dorment ses enfants. Ses ustensiles sont laissés à l'air libre. Dans la cour commune, deux tentes en guenilles sont exhibées par les habitants. Offerte par l'APC, il y a 2 ans, elles n'ont pas tenu face au déchaînement des intempéries et aux rayons incandescents du soleil. On nous assure qu'elles avaient été montées face à la daïra, juste après l'affichage des listes, mais qu'elles furent démontées sous la pression des services de sécurité. Toutefois, alors qu'une femme totalement désespérée projetait d'acheter un bidon d'essence pour s'immoler, les autres affichaient leur volonté de revenir à la charge en organisant un sit-in devant le siège de la daïra. Tout en reconnaissant que beaucoup de bénéficiaires étaient réellement dans le besoin, nos interlocuteurs soutiennent que dans la liste affichée, ils seraient quelques-uns à ne pas ouvrir droit à cette aide. C'est dans l'espoir d'expurger la liste des supposés indus bénéficiaires qu'ils escomptent prendre leur place. Citant nommément ces bénéficiaires, ces femmes au bord du désespoir se disent décidées à aller jusqu'au bout. A 10 jours du début du Ramadhan, les parias de Aïn Tédelès vivent des instants cruciaux. Ils voudraient tous quitter ce taudis de la honte où deux minuscules planches délimitent l'unique trou de latrine. Car en ces lieux, la déliquescence aura définitivement banni l'intimité.