Quand Abdelaziz Boubakir publia dans le quotidien égyptien El Ahram, dont la célébrité est comparée à celle des pyramides, sa chronique qui met en cause les origines arabo-égyptiennes de la musique moderne moyen-orientale, aucun musicologue ou historien de l'art lyrique arabe ne lui répondit. Reprise par El Khabar El ousbouï, ladite chronique connaît le même sort. Pourtant de véritables « batailles, culturelles sont engagées, chaque semaine, entre les intellectuels dans les quotidiens et revues du monde arabe sur des sujets ou opinions parfois futiles ou carrément rétrogrades (par exemple : les femmes ont-elles le droit d'épiler leurs sourcils ?) Alors, pourquoi ce mutisme envers « l'écrit » d'Abdellaziz Boubakir qui a « touché » un sujet jusque-là presque sacré chez les historiens de la musique arabe qui ont toujours juré que les notes musicales des cheikhs Mekaoui ou d'« El Oustadh » (professeur) Mohamed Abdewahab sont bien arabes ? Qu'elles ont modernisé le patrimoine de Zyrib et autres Rabià El Adawia ? La réponse de notre érudit chroniqueur est simple : « C'est que les historiens de l'art musical arabe ont revisité » les symphonies et autres compositions musicales de Ravel et Chest Ravith (début du XIXe siècle) et ont trouvé qu'il est bien sage de garder le silence, le temps, ‘'mort arabe'' ferait le reste » ! Servi par une remarquable érudition, connaissant quatre langues (l'arabe, le russe, le français et l'anglais) et possédant une superbe plume vantée aussi bien par les arabophones que les francophones ou les russophones, Abdelaziz Boubakir a toujours livré ou produit dans ses chroniques et essais, sans aucun ornement, des témoignages ou des idées d'une absolue sincérité et le mouvement dont sont animées ses meilleures pages reproduit le mouvement même de la fin du XXe et du début de notre siècle. Abdelaziz Boubkir a toujours abordé dans ses innombrables chroniques des questions d'un très large intérêt (culture universelle, politique du monde arabe en général et de l'Algérie en particulier, littérature algérienne aussi bien francophone qu'arabophone). Il tend à écrire sur les aspects les plus objectifs, en général, afin de fournir au lecteur une occasion de philosopher sur l'homme et sur la vie. Pourtant A. Boubakir est très modeste. A l'institut de journalisme où il enseigne (des centaines de journalistes algériens qui font « l'opinion » et le bonheur des médias arabes en général et algérien en particulier gardent « quelques bribes de son empreinte »), il a toujours répété à ses étudiants cette devise de Montaigne : « Je me communique au monde par mon être universel… tout homme porte en soi un exemplaire de l'humaine condition. »