Scénariste, photographe, réalisateur de courts-métrages et de documentaires, Kader Kada lance un pari presque fou : organiser à Sidi Bel Abbès une manifestation cinématographique de dimension internationale, la biennale de la Mekarra. Repenser le cinéma dans un pays traversé par les tumultes de l'histoire est pour lui une véritable gageure émaillée, certes, de handicaps et de défis. Pour cela, il met à contribution sa longue expérience au cinéma et au théâtre. Le cinéaste belabesien a déjà mis en scène, au théâtre, de grands auteurs : Ionesco, Tchékhov, Buzatti. Il est diplômé en théâtre de l'Université de Paris III. Qu'est-ce qui vous a amené à vous lancer dans cette aventure artistique qui, pour certains, constitue un sérieux défi ? C'est un projet sur lequel je travaille depuis bientôt trois ans. Dernièrement, on m'a convié à exposer des portraits d'artistes algériens vivant à l'étranger, et ce, à l'occasion de l'ouverture officielle de la cinématique de Sidi Bel Abbès. J'ai saisi l'occasion pour présenter mon projet aux autorités locales. J'estime qu'une ville comme Sidi Bel Abbès peut relever le défi en proposant la création d'un festival international du cinéma en son sein, eu égard à son riche potentiel artistique. C'est la raison principale qui m'a amené à envisager ce projet. Tous ceux qui sont animés par leur enthousiasme trouveront dans ce challenge le moyen de restaurer la cité et de promouvoir sa culture. En quoi consiste au juste le projet de la biennale ? Il s'agit d'un projet qui pourrait voir le jour en 2010 et qui sera dédié au cinéma d'auteur. L'ambition de ce festival est de réunir 10 films par continent tous les 2 ans dans la ville de Sidi Bel Abbès. Pour cela, je m'efforce de convaincre par tous les moyens les pouvoirs publics de l'opportunité d'une telle manifestation. D'autant plus que l'Algérie n'a pas de festival d'envergure internationale, voire régionale. Certes, quelques expériences ont été lancées mais elles ont toutes été éphémères pour ne citer que le festival de Timimoun, initié par Mohamed Chouikh. Les journées cinématographiques de Tébessa, de Constantine ou le festival international de Annaba n'ont pas fait long feu eux aussi. Bien avant, les tentatives de Casbah Films, des actualités algériennes, de l'ONCIC et du CAAIC ont connu le même sort. Les différents festivals initiés ici et là n'ont pas pu maintenir le cap ; quel enseignement faut-il tirer de ces expériences ? Actuellement il n'existe pas en Algérie de festival international du cinéma, à l'exception peut-être du festival du cinéma arabe d'Oran. Même si le 7ème art a déjà suscité plus d'une initiative en Algérie, comme le festival de Annaba, ces tentatives ne furent hélas pas soutenues. A l'échelle locale, le dynamisme du collectif Kaina cinéma et l'association Project'Heurt à Bejaia, louable et salutaire à plus d'un titre, se heurte jusqu'à nos jours à des difficultés de tout ordre. Actuellement, seul le festival du Film Amazigh, dirigé par M. Assad Si El Hachemi, demeure un événement cinématographique constant et mobilisateur, malgré le principe itinérant de sa formule innovante. Alors que l'Algérie est en mesure de se doter d'un authentique festival international du cinéma. Vous ne croyez pas que le petit écran a contribué à la lente agonie du cinéma algérien, même si cela ne constitue pas la raison essentielle ? En effet, depuis un quart de siècle, le petit écran algérien s'est imposé dans le paysage visuel algérien, diffusant trop largement une culture patchwork. Il est donc temps d'insuffler un renouveau créatif au cinéma algérien et de lui donner la place qu'il mérite par son potentiel créatif dans le concert des nations cinématographiques. Outre la Biennale de la Mekerra, avez-vous d'autres projets en perspective ? En ce moment même je prépare un long métrage intitulé Z'har (chance). Une histoire qui retrace le parcours d'un artiste, un écrivain public exilé qui découvre un beau matin, sur les colonnes d'un journal, qu'il est mort.