A l'instar des peuples musulmans, les palestiniens de la bande de Ghaza ont célébré l'Aïd El Fitr avec l'espoir de voir leur vie s'améliorer, alors qu'ils sont confrontés depuis plus d'une année à un embargo israélien féroce et à des divisions inter-palestiniennes, dont l'apogée a été le putsch armé du mouvement islamiste Hamas contre les institutions de l'autorité palestinienne, présidée par Mahmoud Abbas, alias Abou Mazen, le 14 juin 2007. Ghaza : De notre correspondant Malheureusement, si l'Etat hébreu, après l'accalmie conclue avec le Hamas sous l'égide de l'Egypte, a diminué son emprise sur Ghaza en permettant la commercialisation de certains produits, même si les quantités ont baissé, la scène palestinienne interne est toujours bloquée par des différends qui semblent sans solution. Le mouvement Hamas, qui contrôle la bande de Ghaza d'une main de fer et sans aucun partenaire, ne paraît pas pressé d'aller vers un dialogue sérieux qui aboutirait a une véritable union de toutes les forces palestiniennes. La réussite d'un tel dialogue implique un retour des institutions de l'Autorité palestinienne, civiles et militaires, et donc une diminution de l'influence du mouvement islamiste, ce que refusent certains de ses hauts responsables. Cette atmosphère malsaine a fait que l'Aïd El Fitr de cette année a un goût différent. quelques jours avant l'Aïd, alors que les familles s'attelaient à faire des achats, la levée partielle de l'embargo israélien n'est pas visible au niveau des marchés. A cause de la fermeture presque continue des points de passage entre Ghaza et Israël, les importations ont sensiblement diminué. Le marché du textile et du prêt-à-porter connaît une véritable crise. Les vêtements importés sont rares et la production nationale ne peut en aucune manière combler le déficit. Pour ce, les prix n'ont jamais été aussi élevés. Un père de famille qui voudrait faire plaisir à ses enfants en leur achetant des vêtements neufs, devrait dépenser près de 100 dollars américains pour chacun d'entre eux, ce qui porte un coup très sérieux au budget familial. Une bonne partie des enfants palestiniens n'a pu acquérir de nouveaux vêtements cette année. M'hamad Aziz, la trentaine, vendeur dans une boutique de vêtements pour hommes, dans la rue Omar El Mokhtar au centre-ville, nous a dit : « Les vêtements neufs importés sont rares sur le marché. On arrive à faire passer certaines quantités à travers les tunnels à Rafah (permettant la contrebande entre Ghaza et l'Egypte), mais les prix sont si élevés que peu de gens peuvent les acheter. Il y a une grande différence entre l'Aïd de cette année et celui des années précédentes. Beaucoup de boutiques risquent de déclarer faillite. Malheureusement, Israël n'est pas seul responsable de cette situation. Tout ce qui s'est passé depuis le 14 juin 2007 et les graves divisions que vit notre société en général nous a menés vers cette catastrophe. La seule solution aux problèmes que vit Ghaza et les territoires palestiniens en général est un retour à l'union, malgré tout ce qui s'est passé. Il faut oublier et se tourner vers l'avenir, c'est notre seule chance. A la place de la Palestine, toujours au centre-ville, Abdallah, un jeune fonctionnaire accompagné de son fils Ahmed âgé de 6 ans, était visiblement à la recherche de vêtements pour son petit. « J'ai fait plusieurs magasins sans trouver ce qui me plaît. les marchandises sont de moindre qualité et très chères. Comment vais-je lui expliquer que je ne trouve pas ce qui lui convient. Pour lui c'est l'Aïd et il se voit en vêtements neufs. Sans oublier son frère et ses deux sœurs. A la fin, je leur achèterai n'importe quoi, pour qu'ils vivent l'Aïd dans la gaieté. » Sur le chemin du retour, dans un taxi collectif, la discussion entre le chauffeur et l'un des passagers tournait autour de l'augmentation des prix et de l'impossibilité pour une grande partie des pères de famille de subvenir aux besoins de leurs enfants, car ils ne possédaient aucune source de revenu. Ils parlaient de dizaines de milliers de travailleurs qui sont au chômage depuis qu'Israël refuse leur entrée sur son territoire, après le déclenchement de l'Intifadha d'El Aqsa en septembre 2000. En définitive, dans la bande de Ghaza, cette enclave pauvre et démunie, chacun à sa manière, fête la fin du mois de Ramadhan. La veille de l'Aïd, le président Abbas a promis aux Ghazaouis « de poursuivre le travail pour un retour de l'unité du pays et la fin de la division à travers la réussite du dialogue national parrainé par la République arabe d'Egypte ».