L'octroi récemment d'un titre minier par l'Agence nationale du patrimoine minier (ANPM) à l'Algerian Cement Company (ACC) pour l'extraction du sable, en puisant du cordon dunaire qui traverse la ville de Bou Saâda, est à l'origine d'une levée de boucliers des citoyens et d'associations de protection de l'environnement, qui assimilent cet octroi à du mépris envers la population de cette ville dont la structuration urbanistique s'articule foncièrement autour de ce cordon dunaire. L'inconsistance des autorités de la wilaya est mise à l'index dans cette affaire par le fait qu'elles sont à l'origine de la remise en cause du processus de fixation des dunes entamé depuis plus de 20 ans et pour lequel des dizaines de milliards ont été consentis. Cette inconscience s'en trouve être vérifiée par le fait qu'en dépit de l'opposition de certaines structures au bouleversement structurel du cordon dunaire que va engendrer son exploitation, notamment la Conservation des forêts, les autorités de la wilaya ne semblent pas avoir été en mesure de traduire les différentes oppositions pour dissuader, voire interdire à l'ANPM de délivrer ce titre minier. Pis, dans le silence assourdissant de ces mêmes autorités, cette agence est allée jusqu'à exhorter les responsables de l'ACC à poursuivre en justice les services des forêts de la wilaya de M'sila s'ils persistent à entraver l'exploitation de votre gisement, lit-on dans la correspondance adressée le 13 juillet dernier par M. Benyoub, président du conseil d'administration de l'ANPM au directeur général de l'ACC. Cette compagnie s'emploie présentement au défoncement de toute l'aire stabilisée de la dune de Z'baret El Aoud (la dune du cheval), décapant toute la végétation ayant permis la fixation des sables depuis des années, en entamant des opérations d'excavation à tout bout de champ sur une superficie de 53 ha, défigurant un environnement qui s'est transformé au fil des années en un écosystème unique dans la steppe, abritant de nombreuses espèces végétales et animales endémiques. Ces travaux d'excavation sont à l'origine de la déstabilisation du sol rendu fixe par différents traitements opérés sur une longue période dépassant deux décennies, d'abord par les éléments du service national et présentement par les services des forêts. Ces agissements dans un environnement vulnérable de par sa nature auront des conséquences néfastes sur le cadre et la qualité de la vie dans cette ville et porteront atteinte au patrimoine touristique de Bou Saâda que matérialise ce cordon dunaire, lit-on dans la correspondance adressée le 1er septembre dernier au wali de M'sila par l'Association pour la protection de l'environnement naturel et urbain (APENU) de Bou Saâda. L'exploitation de cet espace qui est censé être protège, lit-on dans cette correspondance, « constitue une entrave aux dispositions réglementaires de la loi relative à la protection de l'environnement notamment les articles 11, 15, 29, 31,59 et 60 à la loi minière à travers les articles 152,188 et 189 et le décret exécutif n° 02-470 portant modalités d'application des dispositions relatives aux autorisations d'exploitation des carrières et sablières notamment son article 26. » Devant l'ampleur de la catastrophe écologique qui s'annonce imminente et le silence suspect des autorités de la wilaya, c'est l'association APENU qui se singularise dans cette affaire en dénonçant vigoureusement la légèreté avec laquelle a été élaborée cette concession et met en relief le fait que le dossier serait entaché d'irrégularités à travers notamment l'octroi d'un titre minier pour l'exploitation d'un patrimoine forestier faisant partie des atouts touristiques de la ville de Bou Saâda. Pour l'agence nationale du patrimoine minier, le titre minier pour l'exploitation du gisement de sable de Z'baret El Aoud a été octroyé dans le strict respect des procédures réglementaires édictées en la matière. Seulement, d'aucuns s'interrogent sur la délivrance du titre minier, quand pas moins de 3 structures de la wilaya de M'sila, l'agriculture, l'environnement et les forêts avaient émis des avis défavorables à la demande d'exploitation du site en question. D'aucuns diront que ce ne sont pas les gisements de sable qui manquent dans la région et que l'ANPM aurait pu octroyer un titre minier en d'autres lieux et préserver le cordon dunaire qui traverse Bou Saâda. En tout cas, à travers cette acte, l'ANPM a fait preuve d'un profond mépris aussi bien envers des partenaires (forêts, agriculture et environnement) dans la gestion, la préservation et la protection du domaine privé de l'Etat qu'envers la population de Bou Saâda et des communes environnantes qui auront à subir les effets pervers du bouleversement d'un environnement vulnérable et que les traitements continus aux coûts faramineux n'ont pu atténuer sa fragilité.