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Le spectre de l'embargo international plane sur la Mauritanie
L'ultimatum lancé par l'UE à la junte militaire expire aujourd'hui
Publié dans El Watan le 20 - 11 - 2008

C'est à Paris que se jouera aujourd'hui le destin de la Mauritanie. Le pays tout entier retient son souffle. L'attention braquée sur ce que sera l'issue des consultations entre les représentants de la junte militaire, revenue au pouvoir après le coup d'Etat du 6 août dernier, et l'Union européenne, le principal partenaire économique et bailleur de fonds de la Mauritanie. L'ultimatum lancé par l'UE pour le rétablissement de l'ordre constitutionnel et la libération du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, renversé 15 mois après son élection en mars 2007, prend fin aujourd'hui. Convoquées en vertu de l'article 96 de l'Accord de Cotonou (accord organisant les relations entre les 27 Etats membres de l'UE et les 73 Etats de la zone ACP, Afrique, Caraïbes et Pacifique), les premières consultations, qui se sont déroulées le 20 octobre dernier dans la capitale française, annonçaient déjà de sombres présages pour les trois millions de Mauritaniens. En deux heures, Louis Michel, le commissaire européen à l'Aide au développement, avait expédié la séance et la délégation du Haut Conseil d'Etat mauritanien, dirigée par le Premier ministre, Mohamed Ould Moulaye Laghdaf, invitée, sous peine de sanctions, à présenter des propositions « satisfaisantes » de sortie de crise. Depuis, le spectre de l'embargo et des sanctions internationales plane sur ce pays éprouvé par le sous-développement et pris en otage par l'armée.
Nouakchott, jeudi 23 octobre, la pluie orageuse annoncée la veille au journal météo se révèle une fausse promesse. Un canular météorologique. L'énième pour cette contrée, éprouvée depuis les temps par de terribles sécheresses. L'océan Atlantique n'est, il est vrai, qu'à quelques bornes à l'ouest. Mais il n'empêche, la terre comme les hommes ont sempiternellement soif. Qui de démocratie, qui de dictature « éclairée ». « La démocratie ? Un luxe pour nous », nous dit, convaincu, le professeur Othman Ould M'Haïm. « Un homme, un général de la trempe de Aziz (Mohamed Ould Abdelaziz, chef de la junte), c'est ce qui nous faut ; un dictateur éclairé qui saura redresser d'une poigne de fer la situation en Mauritanie. »
« La démocratie, un luxe ! »
Du putsch du 6 août, le chef du service de la chirurgie générale du centre hospitalier national en parle avec fierté. Un « coup d'Etat médical », mené « sans effusion de sang », nous dit le professeur. « Chicha » et politique, cocktail détonant servi sur la terrasse de ce café tunisien, sis à quelques centaines de mètres du quartier des ministères, ceinturé par l'armée. Comme le Pr Othman, nombreux sont les supporters invétérés du putsch à se déclarer « prêts à défendre, y compris par les armes », le « mouvement de rectification du 6 août ». La version « light » du putsch. Le professeur invite la communauté internationale, qui « veut nous imposer le changement », à garder pour elle ses « leçons de morale » et sa « démocratie clés en main ». Au troisième jour suivant les consultations de Paris, le microcosme politico-médiatique nouakchottien demeure tétanisé, encore sous le choc de l'ultimatum européen. Ultimatum auquel se sont joints les Etats-Unis d'Amérique. La crise politico-institutionnelle s'enlise et les menaces d'embargo et de sanctions internationales se précisent de jour en jour et font craindre le pire sur ce pays, qui pointe parmi les plus pauvres de la planète. Selon les estimations des Nations unies, plus d'un million de personnes souffrent de malnutrition chronique. Plus d'un tiers de la population. 70% des denrées alimentaires sont importées. Le gouvernement américain, l'Union européenne et la Banque mondiale ont suspendu, ou menacé d'annuler, le versement de plus de 500 millions de dollars d'aides diverses au développement. Statistiques compilées par IRIN, Integrated Regional Information Network, service rattaché au Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU. L'aide d'urgence et l'aide humanitaire ne sont pas concernées par ces mesures restrictives. Premiers à infliger des sanctions au nouveau pouvoir en Mauritanie, les Etats-Unis ont annoncé au lendemain du putsch la suspension de son aide bilatérale. Une aide militaire de 15 millions de dollars, une aide au développement de 3 millions de dollars, auxquels s'ajoutent 4 millions de dollars destinés à la formation au maintien de la paix et 805 000 dollars à la non-prolifération, à la lutte contre le terrorisme et au déminage.
La junte sur la « liste noire » des Etats-Unis
Les autorités américaines avaient également pris des « mesures de restriction sur les voyages aux Etats-Unis » visant certains membres de la junte et ses soutiens. Une liste « noire » de 70 personnalités interdites de voyages aux USA a été publiée par certains journaux mauritaniens, dans laquelle figure les 11 officiers supérieurs de l'armée mauritanienne ayant orchestré le coup d'Etat, les ministres du nouveau gouvernement, des parlementaires, des hommes d'affaires, etc. La Banque mondiale a annoncé, de son côté, la suspension de versement de173 millions de dollars qui auraient permis de financer 17 programmes d'aides et d'investissements dans le pays. L'Agence française de développement, premier bailleur bilatéral de la Mauritanie, a, elle aussi, suspendu tout nouveau financement, selon Nicolas Rossin, un responsable à l'antenne locale de l'agence. L'AFD finance pour 100 millions d'euros un programme de développement étalé sur trois ans. L'UE, de son côté, menace de suspendre l'aide multilatérale accordée à la Mauritanie. Louis Michel, le commissaire européen à l'Aide au développement, est allé plus loin en proposant le gel de l'accord de pêche. Ce dernier, d'un montant de 300 millions d'euros, octroie pour les quatre prochaines années un libre accès à la flotte de pêche européenne (surtout espagnole) pour pêcher dans les eaux territoriales mauritaniennes, réputées parmi les plus poissonneuses du monde. Cet accord est entré en vigueur le 1er août dernier et une première enveloppe de 68 millions d'euros a déjà été encaissée par le HCE. « De quoi garantir 3 à 5 mois de salaires pour les fonctionnaires de l'Etat », souligne un membre d'une délégation de l'UE pour la réforme de la justice, rencontré à Nouakchott. « L'accord de pêche est un accord commercial qui n'est pas lié aux accords de Cotonou et au Fonds européen de développement (FED) », rectifie Mme Brigitte Mentges, responsable du service « Presse » de la Délégation de l'Union européenne à Nouakchott. Selon Brigitte, tous les contrats du FED en cours ne seront pas « directement affectés par les sanctions ». Des centaines de millions de dollars d'aides suspendus Les deux plus gros contrats, la construction des deux routes reliant les départements de Rosso à Leceiba, Kaedi Selibaby-Gouraye, d'une valeur combinée de 106 millions d'euros, vont se poursuivre jusqu'à la fin de l'année 2009. Par contre, plusieurs projets qui devaient démarrer ou mettre en œuvre de nouvelles phases d'activités sont suspendus. Ce qui représente, pour la période 2008-2009, un montant de 70 millions d'euros. « Si la prochaine réunion (UE-Mauritanie), prévient Brigitte, débouche sur un nouveau désaccord, il est probable que la Commission européenne recommande au Conseil (qui regroupe les 27 Etats membres) de suspendre notre aide au développement tel que prévu, tout en maintenant notre aide d'urgence et en renforçant nos appuis directs aux populations. » Cette procédure aboutira, selon elle, probablement début 2009 et confirmera des procédures restrictives déjà en place depuis le 6 août. Les « enjeux économiques et humanitaires sont énormes », fait remarquer un journaliste de Nouakchott Info. Les aides au développement provenant de l'étranger représentent, selon lui, entre 30 et 40% du budget de l'Etat. Rapporteur général du budget de l'Etat à l'Assemblée nationale et vice-président du parti islamiste Tawassoul, Salek Ould Sidi Mahmoud affirme que le coup d'Etat du 6 août pourrait faire perdre davantage que cela à la Mauritanie et hypothéquer lourdement ses chances de développement.
Lors d'une réunion du Club de Paris en décembre 2007, les bailleurs de fonds de la Mauritanie s'étaient engagés à lui verser 2,7 milliards de dollars pour financer un programme de développement triennal. « La junte peut définitivement tirer un trait sur ces financements, dire adieu aux grands projets structurants et aux nombreux investissements entamés ou en voie de l'être », regrette le député et animateur du front anti-putsch, le FNDD. Côté gouvernement de transition, on relativise l'apport et l'importance des aides internationales. Celles-ci représentent à peine 25% du PIB, rétorque Mme Ainini Hindou, ministre conseillère auprès du Premier ministre, chargée des relations avec le parlement. Le gros des fonds viendrait des monarchies du Golfe, du Koweit, des Emirats surtout, et de la Chine. La Mauritanie, nous dit-elle, ne pèse pas lourd sur l'échiquier international, mais peut « néanmoins constituer l'exemple ». « Au-delà des leçons que peut donner la communauté internationale, de réprimer toute velléité putschiste, sur le terrain, la Mauritanie n'en est pas un enjeu outre mesure. C'est un pays déjà très pauvre et lui infliger des sanctions, c'est le rendre encore plus pauvre, plus fragile, donc encore plus déstabilisateur pour toute la sous-région. » « Et ce n'est dans l'intérêt de personne », achève de dire la ministre dans une brève allusion à la menace terroriste, incarnée par la nébuleuse Al Qaïda Maghreb. La multiplication des attaques de cette organisation, dirigées contre l'armée et les services de sécurité mauritaniens, ajoute à la situation une touche de chaos. C'en est même l'un des « arguments » phares des pro-putsch qui reprochent, entre autres, au président Abdelahi, sa « mauvaise gestion », mais aussi sa « faiblesse » face à la montée du terrorisme et son « ouverture » politique sur l'opposition, notamment le courant islamiste mauritanien (dominé par la salafia.)
« La Mauritanie n'est pas le Texas »
Dans le clan des putschistes, on affiche assurance « tous risques » et on porte fièrement le discours patriotique et souverainiste. « Il n'y aura pas d'embargo économique, pas de sanctions internationales », jure le ministre de la Communication, Ould Moïne. « La Mauritanie, ajoute-t-il, n'est pas le Texas ». « Aucune puissance dans le monde ne peut nous imposer un changement. Nous ne sommes pas un Etat quémandeur, nous sommes un pays riche. Riche de son histoire, ses hommes et ses ressources. La solution à la crise sera mauritanienne ou ne le sera jamais », prévient le ministre. Dimanche 26 octobre, le long et silencieux week-end mauritanien (vendredi et samedi) s'achève enfin. Dans la confusion et le doute des jours difficiles qu'on promet. La capitale mauritanienne est tirée de son sommeil par le vacarme assourdissant des klaxons des taxis « clandestins ». « Le bateau mauritanien continue de tanguer », titre l'éditorialiste du quotidien L'Authentique. « Les derniers développements sur la scène nationale et internationale montrent au grand jour l'isolement de la junte au pouvoir », écrit le journaliste. L'initiative lancée par le HCE de convoquer pour la fin novembre des Etats généraux de la démocratie est d'ores et déjà boudée par le front anti-putsch, le FNDD (Front national pour la défense de la démocratie)
« Hilm Lebkem », le rêve du muet
Par ailleurs, l'isolement diplomatique n'est plus une vue de l'esprit. Car hormis les positions du Maroc, le Sénégal et à un degré moindre la France (qui assure la présidence tournante de l'UE), qui soufflent le chaud et le froid, le nouveau pouvoir en Mauritanie ne peut compter sur presque aucun soutien diplomatique d'envergure. Le Soudan d'Omar El Bachir est officiellement le seul Etat à apporter sa « caution » au putsch. L'Union africaine, la première organisation régionale à condamner le coup d'Etat et dont l'ultimatum a expiré le 6 octobre, a prononcé la suspension de la Mauritanie. La junte militaire est exclue des activités continentales, interdite d'utiliser le siège pays au sein de l'UA et de tous ses organes connexes. Le 10 novembre dernier, lors d'une réunion à Addis Abeba, des représentants de l'Union africaine (UA), de l'Union européenne (UE), de la Ligue arabe, de l'Organisation internationale de la francophonie, de la Conférence islamique, des membres permanents et africains du Conseil de sécurité de l'ONU ont de nouveau tenté de « faire entrer les dirigeants de la junte dans le cercle vertueux de la négociation avant l'échéance fixée par l'UE ». Sans succès. La junte campe sur ses positions. Mieux. Son chef, le général Ould Abdelaziz, nargue la communauté internationale en déclarant qu'il n'y « aura pas de retour en arrière ». L'homme, par qui les coups d'Etat arrivent — en est à son deuxième putsch réussi : le 1er fut celui ayant déposé l'ancien président Ould Taya — est en « campagne électorale » depuis plusieurs semaines. Droit dans ses bottes, l'ancien commandant du Basep, le bataillon de la garde présidentielle, limogé le jour du coup d'Etat par son président, demeure inflexible. Des élections anticipées pourraient être organisées, selon le Premier ministre, dans un délai ne dépassant pas les six mois. La « démocratie », elle, peut attendre. Longtemps peut-être. « Nous vivons les conséquences d'un mégamensonge, celui d'une Mauritanie, modèle démocratique pour les pays arabes et africains. Une démocratie sans démocrates, un miracle sans génie, un accomplissement sans sacrifices », écrit Ould Oumère dans l'hebdomadaire La Tribune. « Dans l'imaginaire populaire maure, dit-il, il est une expression qui convient à ce que nous vivons : hilm lebkem, le rêve du muet. Lui ne peut le raconter, les autres ne peuvent le deviner. »


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