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Le désordre constitutionnel
Publié dans El Watan le 22 - 10 - 2008

Après la dénonciation de principe du coup d'Etat militaire en Mauritanie le 6 août dernier qui avait déposé le président mauritanien élu Sidi Ould Cheikh Abdellahi – une dénonciation non suivie d'effet et d'actions concrètes pour un retour à l'ordre constitutionnel –, l'Union africaine est montée au créneau en fixant un délai jusqu'au 6 octobre à la junte au pouvoir pour retourner dans les casernes et réhabiliter le Président légitime dans ses fonctions à la tête de l'Etat mauritanien. Ce durcissement dans la position de l'Union africaine vis-à-vis de ce coup d'Etat vient d'être conforté par l'Union européenne qui a sommé à son tour les auteurs du coup d'Etat de remettre le pouvoir aux représentants légitimes du peuple mauritanien dans un délai d'un mois à compter d'avant-hier lundi, sous peine de sévères représailles.
Face à cette levée de boucliers, les militaires mauritaniens ont fait clairement savoir hier qu'ils n'accepteraient pas de revenir à la situation antérieure, quoi qu'il leur en coûtera. La fermeté que tentent d'afficher les militaires mauritaniens face aux pressions internationales de plus en plus fortes trahit un embarras certain de la junte au pouvoir qui n'a pas réussi à desserrer l'étau autour d'elle en dépit des assurances données pour mettre sur rails le processus démocratique. Même les militaires les plus fous qui ne jurent que par la force des baïonnettes savent qu'il est difficile pour les Etats, dans le monde d'aujourd'hui, de soutenir et de s'accommoder des régimes militaires arrivés au pouvoir par la force. La junte mauritanienne ne doit pas ignorer ces nouvelles réalités géostratégiques que l'Union africaine a fait siennes en interdisant aux Etats membres de reconnaître les changements de régimes dans les pays africains issus de coups d'Etat militaires.
Pour réconfortante qu'elle soit, cette prise de conscience de la communauté internationale du phénomène de la prise de pouvoir par la force, qui fut pendant longtemps une spécialité de nombreux régimes africains, ne saurait occulter toutes les autres voies tout aussi condamnables et antidémocratiques empruntées par certains régimes pour accéder et se maintenir au pouvoir. Quelle différence y a-t-il entre un pouvoir qui s'installe par la force, au moyen d'un coup d'Etat militaire, et un autre qui y accède par la fraude électorale, en manipulant les institutions en place, en usant de procédés déloyaux comme l'utilisation des moyens de l'Etat et autres ficelles bien connues, telles que les intimidations contre l'opposition et la presse ? Aucune. Dans un cas comme dans l'autre, qu'il s'agisse d'un coup d'Etat militaire ou d'un coup de force constitutionnel, l'enjeu est le même : la confiscation de la volonté populaire. Clausewitz n'a-t-il pas tout résumé dans cette phrase en affirmant que « la politique c'est la continuation de la guerre sous une autre forme » ?


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