Une minuscule affiche apposée sur la porte vitrée de la cinémathèque d'Oran annonce le début des travaux de rénovation de la salle à compter du 20 décembre 2004. Pourtant, aucune activité ne reflète le lancement d'un quelconque chantier. Les portes de ce qui fut dans le passé un temple du 7e art demeurent hermétiquement closes depuis la fin de la période estivale. La fermeture de la cinémathèque d'Oran, juste après les vacances d'été, est due au fait que la Sonelgaz avait coupé l'alimentation en électricité à cause, semble-t-il, d'une facture impayée. Cette période avait coïncidé avec la mise à la retraite de l'ex-DG du centre algérien du cinéma, Boudjemâa Kareche, et la désignation d'un nouveau responsable. Celui-ci, faute d'une délégation de signature, serait, selon certains sources, dans l'impossibilité de signer un quelconque chèque. A ce problème s'est ajoutée ensuite la question de la rénovation, un projet piloté par la direction de la culture qui avait, suite à un appel d'offres, choisi une entreprise. Depuis, le projet traîne en longueur et le chantier n'est toujours pas lancé. Les habitués de ces lieux commencent à se montrer sceptiques puisque l'annonce de ces travaux a été faite, il y a deux années, lors de la cérémonie du festival du film amazigh. La directrice de la culture de l'époque avait annoncé que le département de Mme Khalida Toumi avait décidé de débloquer une enveloppe de 2,5 milliards de centimes pour redonner à la salle d'Oran un « look » acceptable. Les cinéphiles et les habitués de cette salle obscure - la seule à Oran qui propose des films en 16 et 35 mm, alors que les rares cinémas encore fonctionnels se sont versés dans la vidéo - regrettent qu'Oran, la seconde plus importante métropole du pays, ne dispose pas d'une cinémathèque digne de ce nom. Même les responsables locaux se sont désintéressés de cette salle. La situation de la cinémathèque d'Oran n'est pas le fait du désintéressement des responsables locaux mais surtout et avant tout de ceux du CAC eux-mêmes. La salle de répertoire d'Oran restait dépendante d'Alger sur le plan de la gestion administrative et financière. « Même pour acheter une bouteille de javel, il faut attendre l'aval d'Alger, puis le virement du fonds de roulement », relève des milieux bien informés. La baisse vertigineuse du taux de fréquentation n'a jamais suscité la moindre interrogation de la part des « responsables centraux ». Il est arrivé que des séances soient purement et simplement annulées par le fait que seuls quelques spectateurs - des couples en quête d'un coin tranquille - aient acheté leurs billets. La dernière sortie en public de Kateb Yacine avant sa mort, par exemple. Les amoureux du 7e art rêvent d'une salle moderne où ils pourront voir et revoir des films, des classiques aux plus récents. En attendant, ils doivent se résigner à ces portes closes qui commencent à être recouvertes de toiles d'araignées. Ils ne veulent surtout pas fredonner -même inconsciemment - le tube d'Eddy Mitchell : « C'était la dernière séance... ».