Ouyahia défend le bilan des réalisations de la politique du président Bouteflika qu'il a conduite plus d'une fois, alternativement avec son alter ego du FLN, Abdelaziz Belkhadem, au cours des deux derniers quinquennats. Il l'a fait hier à l'hémicycle Zighout Youcef, inaugurant ainsi le césarisme constitutionnel de novembre, qui marque le début d'un nouveau régime.Le Premier ministre expose ainsi un plan d'action du programme du Président – une obligation constitutionnelle – et met le cap sur l'échéance électorale prochaine. A cet effet, il a eu tout le loisir de gaver l'assistance d'une constellation de chiffres positifs obtenus davantage sur le terrain politique que sur celui des réalisations véritablement. Ouyahia a encore une fois usé et abusé d'une technique bien à lui d'attirer l'opinion dans un maquis de chiffres impénétrable de prime abord pour le plus téméraire des discernements. Mais ramenés au niveau d'une clairière, là où ils commencent à prendre du sens parce que débarrassés de leurs repères de calculs politiques et remis tout simplement dans leur acception naturelle de l'économie, ces chiffres retrouvent alors leur fonction d'une information objective et d'indicateur, mesurant judicieusement les avancées comme les régressions. S'il est incontestable que certaines réalisations ont pu être matérialisées, sauf à vouloir être nihiliste, il n'en demeure pas moins que le débat se situe davantage sur le terrain des meilleures chances de l'Algérie de sortir de son sous-développement avec l'esprit de monopole de la pensée et l'action politiques et des chiffres ou avec une implication plus grande des forces saines de l'Algérie et le système politique qui le permet, à savoir la démocratie et non sa négation. Car l'enjeu est de savoir s'il y a aujourd'hui une voix pour porter la critique jusque sur des thèmes aussi pointus que la comptabilité des dépenses publiques et leur efficacité. Ainsi, l'entorse à toute pratique démocratique consiste à présenter une situation sous un meilleur jour à des députés qui de toute façon n'ont pas les moyens de vérifier la véracité des faits ne serait-ce que parce que la loi du règlement budgétaire qui le permet n'existe pas et est ignorée. L'argument des chiffres est spécieux et fallacieux. Alors que le système budgétaire actuel dispose du désavantage (ou de l'atout ?) de ne pas permettre la traçabilité des dépenses. D'où la question : qui peut dire le contraire d'Ouyahia ? Il faut peut-être se référer à la réalité du terrain, mais pour cela il faut un autre hémicycle. Voilà une réalisation que des Ouyahia ne peuvent dire parce qu'elle se passe de chiffres tant le désastre est incommensurable.