Les Algériens ne semblent plus croire en rien. La loi fondamentale est modifiée mais tout se passe comme si de rien n'était. La seule préoccupation des Algériens réside dans le prix du panier. « Qui peut remplacer Bouteflika ? Il n'y a pas un nom valable », nous dit Mourad, 30 ans, chômeur. Et de trancher : « De toute façon, cela ne me concerne pas. Le pays est à eux ». Notre interlocuteur ne dit voir en les politiques et les responsables des associations qu'une course effrénée aux fauteuils et aux privilèges. Les Algériens ont-ils rangé leurs espoirs au rayon des illusions perdues ? « Nos hommes politiques se sont définitivement décrédibilisés quant à leur compétence et surtout, à leur volonté " de servir " et non pas " de se servir " », estime Rachid Grim, politologue. Le divorce entre la population et la société civile semble désormais consommé. Le taux de participation associative oscille entre 3 et 4%. Il est de l'ordre de 11% au Maroc et de 43% en France. La moitié des responsables associatifs, interrogés pour les besoins de l'étude réalisée par la Fondation Friedrich Ebert, pense que la population est très éloignée des préoccupations du travail que réalisent les associations. 24% estiment que la population est totalement indifférente. Une partie des dirigeants d'associations (30%) interprète ce phénomène par le faible niveau de conscience politique de la population. Certains estiment que cela dénote « un manque de considération de la population de l'apport que peut leur procurer l'association. D'autres encore considèrent qu'une partie des associations est totalement coupée de la réalité et de ce qui se passe autour d'elle. Seule une proportion infime (8,2%) reconnaît sa responsabilité parce que incapable de mobiliser la population concernée autour des projets qui la concernent ». Me Bouchachi estime que les Algériens ne sont pas indifférents à ce qui se passe dans leur pays mais qu'ils sont « démissionnaires ». « Les Algériens s'intéressent aux droits politiques, aux droits de l'homme, aux droits socioéconomiques et à la démocratie mais quand ils voient que rien ne change, ils s'en désintéressent », explique-t-il. Et d'ajouter : « Les citoyens ordinaires arrivent à cette conclusion : vous parlez des droits de l'homme, mais ils sont toujours bafoués. Petit à petit, les gens commencent à démissionner de leur citoyenneté ».