L'Amérique qui a lancé son armée contre l'Afghanistan en novembre 2001 a-t-elle une stratégie visant à mener cette guerre ou plus spécialement un objectif ? La question revient avec insistance depuis qu'il est question de négociations avec les taliban chassés du pouvoir il y a sept ans, mais de plus en plus présents sur le terrain de l'action militaire. Des contacts avaient même eu lieu entre ces derniers et le président Hamid Karzai et son gouvernement que l'on dit incapable d'assurer la sécurité même de la capitale afghane. Cette éventualité avait, un temps, été exclue par les militaires américains avant qu'ils ne la reprennent, mais en posant toutefois des conditions, comme celle de prendre langue avec les taliban que l'on qualifierait de modérés. Ce qui tranche en tout cas avec la stratégie envisagée par le président américain élu qui prévoit bien au contraire de gagner cette guerre par l'envoi de renforts. Mais, avant même que Barack Obama ne prenne officiellement les commandes des Etats-Unis, l'ambassadeur américain à l'ONU, Zalmay Khalilzad né en Afghanistan, a affirmé dimanche sur la chaîne de télévision CNN, que les Etats-Unis et le gouvernement afghan pourraient négocier avec des taliban modérés, mais uniquement s'ils se trouvaient en position de force. « Mais, pour y parvenir (...), le gouvernement et la coalition ont besoin d'être nettement plus en position de force », a ajouté l'ancien ambassadeur des Etats-Unis en Afghanistan. Il a aussi jugé que le gouvernement afghan du président Hamid Karzaï devait être plus honnête et plus efficace. « Je pense que chacun doit mettre de l'ordre dans sa maison. Le gouvernement (afghan) doit faire mieux pour s'occuper de la corruption et s'assurer que les forces qui composent le nouveau gouvernement restent unies », a dit M. Khalilzad. Le chef d'état-major interarmes américain, l'amiral Michael Mullen, a annoncé samedi que les Etats-Unis vont envoyer de 20 000 à 30 000 soldats en renfort en Afghanistan d'ici à l'été prochain pour aider à contrer l'insurrection des taliban. Un porte-parole des rebelles taliban a répliqué dimanche en indiquant que les Etats-Unis connaîtraient en Afghanistan la même défaite que les Soviétiques dans les années 1980. Les violences des insurgés afghans, parmi lesquels les taliban, ont redoublé d'intensité depuis deux ans malgré la présence de quelque 70 000 soldats étrangers, pour moitié américains. Le gouvernement afghan a approuvé cette décision en demandant que les renforts soient déployés dans le sud du pays et à la frontière avec le Pakistan, les principaux foyers de l'insurrection menée par les taliban. « Mais nous souhaitons que cela se fasse sous deux conditions. La première est que ces forces soient envoyées dans les zones où on en a besoin, notamment dans la province d'Helmand (sud), ou le long de notre frontière orientale par où des terroristes s'infiltrent dans notre pays. Deuxièmement, que cette augmentation (du nombre de soldats américains) contribue à améliorer l'entraînement et l'équipement des forces de sécurité nationales afghanes, et leur permette ainsi de mieux combattre le terrorisme et défendre le pays », a déclaré le porte-parole du ministère afghan de l'Intérieur, Sultan Ahmad Baheen. L'augmentation régulière du nombre de militaires étrangers dans le pays, actuellement de 70 000, n'a pas empêché la rébellion afghane, emmenée par les taliban et d'autres groupes armés, dont certains liés au réseau Al Qaïda, de redoubler d'intensité et de gagner du terrain depuis deux ans. L'hypothèse de négociations est confortée par l'analyse des militaires qui traitent de faits du terrain. Et les rapports qui leur sont attribués même indirectement révèlent à vrai dire une situation bien difficile, liée à la complexité du site, et par voie de conséquence, la volonté américaine notamment celle affichée par Barack Obama de porter la guerre là où il le faut. Et là, il s'agit du Pakistan voisin accusé d'abriter des bases des taliban.