On veut étouffer l'opposition pacifique La condamnation d'un directeur de la publication et d'une journaliste pour avoir rapporté des faits de charlatanisme avéré n'est pas une surprise en soi, car elle fait suite à la longue série d'instrumentalisations de la justice depuis 50 ans. Même si elle intervient dans le but évident d'infléchir la ligne du journal dans une conjoncture préélectorale, elle ne doit pas occulter le fait qu'elle n'est que le prolongement naturel – tout en cédant sur la forme – des pratiques impunies qui ont présidé à l'exécution du jeune colonel Chaâbani. Le pouvoir politique donne un ordre et il est exécuté par un juge lui-même fonctionnarisé et dépouillé de sa conscience ou encore non protégé et soumis à toutes les formes de pression . La journaliste n'a peut-être pas mesuré à quel point ces pratiques procédaient en bonne partie des archaïsmes sociaux sur lesquels est fondé historiquement le charlatanisme politique. En effet, le profil du client privilégié des dirigeants du Tiers-Monde est celui d'une population crédule qui croit aux promesses les plus farfelues et à la thérapie par le discours destiné à provoquer une fièvre jubilatoire et infantiliser un peuple dont on ne réclamera la bravoure que pour faire la guerre à quelqu'un, à quelque chose ou encore à rien. La condamnation de Omar Belhouchet et de Salima Tlemçani intervient après la répression contre les enseignants et les pressions contre les médecins dont les revendications socioprofessionnelles sont des plus dignes et des plus légitimes. Leur combat contre le processus d'inversion de l'échelle des valeurs procède justement du même combat du savoir et de la raison contre le charlatanisme. L'état actuel de rétrécissement des espaces d'expression doit être un motif d'inquiétude, car sous le prétexte fallacieux de l'état d'urgence et de la lutte contre l'intégrisme, on ferme le champ politique et médiatique pour étouffer l'opposition pacifique au profit de celles qui développent des capacités de nuisance. Abdelaziz Rahabi, ancien ministre Alger, le 23 décembre 2008 Charlatanisme politique, une roquia contre les journalistes ? Le harcèlement contre les journalistes continue. A quelques mois de l'élection cruciale, le pouvoir entend museler tous les moyens d'expression. En condamnant nos collègues et amis Salima Tlemçani et Omar Belhouchet, dont le professionnalisme n'a pas été pris en défaut, la justice algérienne a pris pour le moins une décision surprenante. Elle a décidé de privilégier la mystification au détriment de la raison. Cette décision vise à casser le travail d'enquête des journalistes. Salima Tlemçani, connue pour ses reportages sur le terrain, généralement réalisés dans des conditions très difficiles, est à sa façon une raquia des maux de la société en s'adonnant à la plus noble forme du métier de journaliste : l'enquête. Le CJAF s'indigne contre cette lourde peine, injuste et disproportionnée et demande donc à la justice de revenir sur son verdict et de laver l'affront fait à nos collègues. Le Club des journalistes algériens de France La rationalitéet le bon sens sanctionnés Le site www.souk-ahras.info, site d'information local pour les expatriés, tient à exprimer sa solidarité à l'endroit de Omar Belhouchet et de la journaliste Salima Tlemçani, injustement condamnés pour délit d'opinion et déplore le harcèlement judiciaire continuel que subit le quotidien El Watan, un journal qui, au cours de ses années d'activité, a prouvé son indépendance et son professionnalisme. D'une modeste aventure lors de sa création en 1990, El Watan, à force de travail, de rigueur et d'abnégation, a réussi à se hisser parmi les sources d'information les plus fiables et les plus objectives dans la région. Il est devenu une référence pour la lecture de la société algérienne et des enjeux qui la traversent. C'est précisément son indépendance et son souci d'objectivité qui dérangent les tenants du pouvoir. Maintenant que la justice a dit son dernier mot en soutenant le charlatanisme, il ne reste plus aux dirigeants de ce pays en faillite intellectuelle que de donner les agréments nécessaires à ces escrocs pour exercer en toute liberté leur métier : l'arnaque du citoyen. www.souk-ahras.info La FIJ consternée La Fédération internationale des journalistes (FIJ) proteste contre la peine de trois mois de prison ferme infligée par le tribunal correctionnel près la cour d'Alger contre deux journalistes dans une affaire de diffamation. La FIJ considère que cette condamnation est de nature à porter atteinte à la fondation même de la liberté de presse en Algérie. « Ce jugement n'apprécie pas le rôle primordial de la presse dans la prévention contre la fraude et l'escroquerie », a déclaré Aidan White, secrétaire général de la FIJ, en faisant remarquer que les deux journalistes étaient poursuivis pour avoir exposé les pratiques de soi-disant guérisseurs qui s'en prennent aux plus vulnérables dans la société. « Sanctionner les médias alors qu'ils cherchent à exposer les charlatans et escrocs constitue une menace pour le socle de la liberté de la presse dans une société démocratique. » L'affaire concernait un reportage publié en 2004 dans le journal El Watan sur un soi-disant guérisseur exerçant à Alger, la capitale algérienne. Ce dernier a par la suite intenté un procès en diffamation contre Omar Belhouchet et Salima Tlemçani, respectivement directeur de la publication et journaliste du quotidien algérien. Le reportage avait révélé les activités des guérisseurs présumés qui prétendent pratiquer la médecine, alors qu'ils ne possèdent aucune qualification pour exercer ce métier. Pour corroborer son reportage, Salima s'était rendue au cabinet du guérisseur d'Alger en se faisant passer pour une patiente. Le tribunal a également condamné Omar Belhouchet et Salima Tlemçani à une amende de 50 000 DA (500 euros) chacun. La FIJ considère que le jugement du tribunal représente un moyen pour les puissants de réduire au silence le journalisme d'investigation par l'ingérence judiciaire. « Cette décision ne fait que renforcer la demande des journalistes en faveur de la décriminalisation des lois régissant la presse afin d'éviter que la justice ne serve de prétexte pour faire échec au contrôle légitime par les médias de ceux qui cherchent à exercer une influence sur leur communauté », a ajouté White. Le SNJ appelle à la reconsidération du verdict Le Syndicat national des journalistes a appris, surpris, le verdict inique et pour le moins désarmant, prononcé par le tribunal de Sidi Mhamed à Alger à l'encontre de nos confrères Salima Tlemçani et Omar Belhouchet, respectivement journaliste et directeur de la publication du quotidien El Watan. Le tort de nos confrères est d'avoir dénoncé, dans une enquête rigoureusement étayée, des pratiques « médicinales » appartenant à un autre âge. Condamner un journaliste à une peine d'emprisonnement pour avoir accompli un travail de salubrité publique en dénonçant des charlatans, voilà une pratique tout simplement indigne d'un Etat de droit. Il ne s'agit là, en fait, que d'une volonté de poursuivre une campagne punitive contre une presse insoumise et tenant plus que tout à sa liberté de ton. Ce genre de représailles que le pouvoir ressort par à-coups sont hélas appelées à durer ; en tout cas tant que demeurent ces articles du code pénal prévoyant l'emprisonnement pour délit de presse. Le Syndicat qui assure nos confrères d'El Watan de son soutien indéfectible appelle à la reconsidération de ce verdict qui n'honore nullement la justice algérienne et rappelle aux autorités leurs engagements répétitifs qu'« aucun journaliste ne sera mis en prison pour ses écrits ». Une coquetterie tout juste destinée pour la consommation externe apparemment. A. M., un avocat installé à l'étranger : « Pauvre système judiciaire de mon pays que je chéris tant. Tant que de tels actes injustifiables continuent à empoisonner la vie des Algériens, notre pays ne connaîtra pas de réelle prospérité. J'ai une question ! Selon la journaliste, sur la plaque qui orne la porte du cabinet du pseudo médecin, il est inscrit ‘'Médecin spécialiste des maladies des femmes et des enfants'' (…). Pourquoi a-t-il choisi spécialement cette catégorie de gens ? Acte qui demande réflexion. C'est clair, non ! Mme la juge sur quelle base avez-vous porté votre jugement ? Vous avez l'obligation de protéger les droits des personnes et ce pouvoir dont vous êtes responsable aujourd'hui et demain, oui demain, vous sert à quoi (…) ? Je ne critique personne, je ne responsabilise personne... Le manque de formation continue et la faiblesse des jugements que nous lisons tous les jours le prouvent amplement. En effet, c'est la justice qui reflète le véritable visage d'un pays. Une simple équation ‘'savoir + justice = prospérité''. » Un citoyen : « Votre journal est dans le collimateur du pouvoir. Vous le dérangez. Votre journal se bat pour que le citoyen soit bien informé et comprenne l'information ; ce qui n'est pas le cas pour les autres médias qui, par crainte des représailles, se sont spécialisés dans la langue de bois (une information vidée de tout son sens, incapable de réactiver l'esprit d'analyse du citoyen). D'un autre côté, le système, qui se pérennise en Algérie, a fait des générations nées après 1962 des êtres primitifs et des tubes digestifs faciles à dominer, incapables de s'organiser et d'avoir des revendications citoyennes. »