Entre Saïd Sadi et son ancien bras droit, Djamel Fardjallah, le divorce semble consommé. Le député de Béjaïa et ex-vice président du RCD, en froid depuis quelque temps avec le président Sadi, vient de faire l'objet d'une mesure de suspension de la part de la direction nationale de son parti. Dans une déclaration reçue hier à notre rédaction, ce dernier souligne qu'il a été rendu destinataire d'une mesure de suspension « en attendant ma comparution devant la commission des conflits, qui est synonyme d'exclusion ». M. Fardjallah que l'on désigne comme étant le chef de file du groupe « de dissidents de Béjaïa », a donc attendu la notification de la sanction contre lui pour porter le débat sur la place publique. « Voilà comment le RCD remercie ses fidèles serviteurs », écrit, manifestement dépité, ce député qui aura été l'une des chevilles ouvrières du RCD durant les dix dernières années. Djamel Fardjallah affirme néanmoins qu'il s'attendait un peu à un tel scénario. Comment ? « En vérité, connaissant les tentations faciles du président du parti à se débarrasser de manière arbitraire et expéditive des cadres qu'il suspecte de lui porter ombrage, cette sentence injustifiée et prise en violation des dispositions statutaires du parti ne me surprend pas ». Cet exposé des motifs tombe comme un cheveu sur la soupe et ce, à la veille de l'élection présidentielle, en prévision desquelles le RCD se prépare comme toutes les autres formations. Et c'est précisément cette échéance qui semble être la pomme de discorde entre Sadi et son ex- proche collaborateur. Djamel Fardjallah qui se dit partisan de la non-participation à la prochaine présidentielle suggère que son président serait, lui, partant. « Je dois avouer que depuis qu'il a constaté notre choix résolu de nous opposer à une éventuelle participation de sa part à la prochaine élection présidentielle, la messe était dite, et je m'attendais donc à subir les foudres de sa nature vengeresse », souligne-t-il. Mais, pas seulement. Le député de Béjaïa évoque également le débat interne qu'il dit avoir initié, « avec un certain nombre de responsables autour des questions aussi essentielles que le mode opératoire organique », qui n'aurait pas trouvé grâce aux yeux de Saïd Sadi, d'après lui. Et à Djamel Fardjallah d'accuser son président : « Sous sa direction, le RCD est devenu le lieu où l'autonomie de pensée se paye par l'exclusion, avant que ‘'le coupable'' ne soit livré aux sanctions morales les plus viles ». Le docteur et le diagnostic Pour cet ancien vice-président du RCD, le diagnostic est sérieux : « C'est le signe d'un chef déclinant, que de voir celui-ci assumer sans vergogne la cascade de départs des cadres émérites qui sont éjectés, en dépit du coût politique considérable occasionné au Rassemblement. » Fardjallah estime que « chaque exclu emporte avec lui une parcelle de crédibilité et de compétence qui entame celles du parti ». Cela étant dit, le député n'a pas hésité à couper le cordon ombilical avec son chef qu'il invite allusivement à céder sa place. « Si Sadi a perdu ses illusions personnelles, le RCD doit lui survivre », tonne-t-il. De fait, Fardjallah s'exclut du RCD aussi longtemps que Saïd Sadi trônera encore à sa tête. A moins que le parti ne s'engage dans une perspective que le député dessine ainsi : « Le RCD est mis en demeure d'engager une refondation salutaire de ses structures, ce qui suppose un réajustement organique à mettre en adéquation avec le modèle de fonctionnement des partis modernes … ». Ce qui s'apparente à un véritable plan de redressement politique et de programmatique avec sans doute de nouvelles têtes « en tenant compte de la nouvelle configuration politique que ne manquera pas d'induire l'impact de l'élection présidentielle de 2009 ». Saïd Sadi acceptera-t-il ce challenge ? La suspension puis cette réaction sèche risquent d'être le dernier fil reliant Fardjallah au RCD et à Saïd Sadi.