Certes, l'Algérie n'a été que légèrement secouée par la crise financière internationale, née des suites des crédits hypothécaires (subprimes), mais le bateau n'est pas pour autant à l'abri d'une tempête eu égard aux fondements pour le moins fragiles de l'économie algérienne. Celle-ci ne tient qu'à un seul fil : le prix des hydrocarbures sur les marchés internationaux. Les cours du pétrole, qui affichaient hier 39 dollars le baril sur le marché new-yorkais, ont perdu plus de 100% de leur valeur en l'espace à peine de cinq mois (près de 150 dollars le baril en juillet 2008). Cet effondrement des prix du pétrole, combiné à une récession économique mondiale, aura, à coup sûr, pour conséquences une révision à la baisse des exportations algériennes en hydrocarbures et, logiquement, une réduction du volume des réserves de changes (138 milliards de dollars à fin novembre 2008), dont la moitié est placée en bons de Trésor à l'étranger. Le 21 décembre, le gouverneur de la Banque d'Algérie a reconnu ouvertement que « l'importante chute des prix du pétrole réduit de manière considérable les recettes d'exportation du pays et, partant, la capacité d'épargne budgétaire ». Et de prévenir : « Une faiblesse durable des prix du pétrole se traduirait donc par un fort amenuisement de l'épargne accumulée ainsi que par une baisse corrélative des réserves de changes. » L'effondrement des cours mondiaux du pétrole s'est traduit déjà pour l'Algérie par une baisse de ses recettes. Cette décroissance est évaluée à 5 milliards de dollars depuis juillet jusqu'à maintenant, si l'on se réfère à des statistiques fournies début décembre par Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines. Les exportations hors hydrocarbures, elles, stagnent depuis déjà des années ainsi que le secteur de la recherche et du développement. Le taux de création d'entreprises en Algérie est des plus bas, soit 90 pour 100 000 habitants, alors que des pays voisins, à savoir la Tunisie et le Maroc, touchent la barre des 300 entreprises pour la même proportion d'habitants. Ce sont des chiffres fournis par des experts algériens qui démontrent que les indicateurs fondamentaux de l'économie demeuraient très fragiles en 2008, affaiblis davantage par la chute des prix du pétrole et la crise financière internationale. Au tableau de bord, une productivité à l'état de stagnation, un taux d'utilisation des capacités insignifiant, une croissance très faible en comparaison avec les ressources injectées. Le taux de croissance hors hydrocarbures, estimé par Ahmed Ouyahia, Premier ministre, à 6,3% en 2007, 6% en 2008 et 2009, égalise à peine la moyenne africaine qui est de 6,2%, se référant au dernier rapport économique sur l'Afrique, publié conjointement par l'Union africaine et la Commission économique pour l'Afrique. Cela dit, des pays africains développent une meilleure croissance que celle réalisée par l'Algérie, sans pour autant faire appel à des plans de relance. Dans l'édition 2008 des Perspectives économique globales, la Banque mondiale a prévu une « croissance à deux chiffres dans des pays qui ont su diversifier leurs exportations, comme la Jordanie, le Maroc et la Tunisie ». Dans ces pays, « la croissance devrait faire un bond en 2008 pour atteindre 6,3%, contre 5,4% 2007 », si l'on se réfère à la même source. Cela dit, tous les plans de relance décidés depuis déjà une décennie n'ont pu servir qu'à atteindre la moyenne africaine de croissance économique. L'Algérie « injecte 15% de son PIB pour faire 5% de recettes. Cet état de fait prouve que l'Algérie a une économie mal gérée, avec une mauvaise croissance », disent des experts algériens. Les responsables en charge des dossiers économiques, eux, continuent à nourrir l'optimisme démesuré, à l'heure où la crise financière internationale fait trembler les Etats les plus puissants.