Les spéculations vont bon train à propos des conséquences de la crise financière induite par les crédits hypothécaires américains, communément appelée la crise des subprime mortgage. C'est en Europe certains comme la ministre françaises de l'Economie, des Finances et de l'Emploi, Christine Lagarde, dit ne pas craindre de "contamination à l'économie réelle" de la France, le secrétaire au Trésor, Henry Paulson, n'affirmait pas que la tempête financière pénalisera la croissance aux Etats-Unis. Du côté des analystes on se demande si la baisse des marchés, avec la gigantesque destruction de richesses qu'elle entraîne, pèsera sur la consommation. On évoque également le resserrement des conditions de crédit, avec des banques devenues plus prudentes et des investisseurs plus méfiants, lequel risquerait de pénaliser il les investissements des entreprises. Peut-on donc affirmer avec certitude que la crise est passée avec la reprise à la hausse des bourses. En effet, la Fed a réussit vendredi 17 août à redonner un peu de tonus aux marchés boursiers en abaissant par surprise, son taux d'escompte. Mais pour combien de temps encore. Toujours est-il qu'il est utile de se pencher sur cette vague qui a secoué les marchés financiers pour en tirer les enseignements. Ainsi on s'aperçoit vite que personne, parmi les dizaines de milliers de spécialistes qui, partout dans le monde, dans les établissements financiers, les instituts d'émission, les agences de notation, les autorités de régulation, les organismes internationaux ou encore les ministères qui sont chargés d'évaluer les risques financiers, n'avait vu venir le choc des subprimes. il est vrai qu'il y avait bien eu quelques avertissements sur la formation d'une bulle spéculative immobilière aux Etats-Unis et en Europe, mais pas la moindre alerte sur une possible déflagration liée à la défaillance de petits établissements spécialisés dans la distribution de crédits hypothécaires à risque aux Etats-Unis. Avant 1997 et le déclenchement de la débâcle financière en Asie, de nombreux économistes s'étaient inquiétés de la fragilité du système bancaire et de la dangerosité des politiques monétaires dans la région. Avant 2000 et le krach des valeurs Internet, il n'avait pas manqué de voix, non plus, pour mettre en garde contre l' "exubérance irrationnelle" des marchés boursiers, selon l'expression du président de la Réserve fédérale américaine de l'époque, Alan Greenspan, exubérance qui propulsait les actions des entreprises high-tech à des niveaux astronomiques. Mais le plus étonnant est que personne n'est pu prévoir le krach même si les premières difficultés du crédit hypothécaire américain sont apparues dès la fin de l'année 2006. On se demandera longtemps pourquoi la Fed n'a rien entrepris dès cette date pour tenter d'éteindre l'incendie avant qu'il ne se propage. Aussi, l'enseignement le plus important de cette crise est que les banques centrales, censées veiller à la stabilité financière mondiale, ne viennent pas seulement de démontrer leur impuissance à prévenir les crises, mais aussi leur incapacité à les gérer en douceur. Sans doute ont-elles pensé, comme d'ailleurs tous les autres acteurs de la finance mondiale, qu'il s'agissait là d'un accident isolé, cantonné aux Etats-Unis, peu susceptible de s'étendre et en aucun cas de dégénérer en crise mondiale du crédit. À cet égard, le krach des subprimes apparaît comme le premier répondant à l'effet papillon, qui veut que le battement d'ailes d'un papillon au Brésil puisse provoquer une tornade au Texas. Les grandes crises financières des dernières années n'étaient pas de ce type, elles n'avaient pas eu un détonateur secondaire : l'e-krach avait résulté de l'engouement démesuré de toute la communauté économique et financière pour les nouvelles technologies, la crise de 1997-1998 était née chez les "tigres" d'Asie, considérés alors comme des modèles de croissance. La mondialisation financière fait qu'il est bien difficile, si le feu n'est pas circonscrit au départ, de l'arrêter ensuite. Il explique que les difficultés d'un compartiment très étroit du crédit immobilier américain se transforment en une crise bancaire puis monétaire et financière de toute la planète. Tout le monde est aujourd'hui concerné par ce qui se passe chez le voisin, c'est une leçon de l'été. Même si, comme le rappelle le krach de 1929, la finance n'a pas attendu d'être mondialisée et dérégulée pour subir de violentes tempêtes, sa nouvelle architecture fait que tout choc a désormais de fortes chances de déraper en crise systémique.