La démonstration de rue à laquelle se sont livrés les habitants du quartier l'Abattoir, dans la commune de Bordj El Bahri la semaine passée, était prévisible. Tout dans cette commune prête à la révolte, tant les autorités locales se sont illustrées, ces dernières années, par leur laxisme et leur laisser-aller face aux problèmes que rencontre la population locale, notamment la frange juvénile. Le quartier l'Abattoir, d'où est parti le mouvement de contestation, à l'instar d'autres quartiers de la commune, est un lieu qui manque cruellement de commodités devant hisser le cadre de vie de ses habitants à un rang acceptable. Selon les protestataires, il n'y a aucune structure destinée à soustraire les jeunes du quartier des méandres de l'oisiveté et du désœuvrement. « Nous n'avons ni salle de sport ni maison de jeunes encore moins un centre culturel », déplorent des jeunes rencontrés aux abords d'un café. S'y ajoute le chômage qui est devenu un phénomène endémique, réduisant toute une jeunesse à exercer de petits boulots dits « de la débrouille ». Les jeunes de la localité, qui ont été contraints à protester en occupant, une demi-journée durant la rue contre des coupures d'électricité à répétition, n'ont fait qu'exprimer « leur ras-le-bol d'une une situation complexe. Les coupures d'électricité ont cependant servi uniquement de facteur déclenchant ». Les protestataires ont scandé à l'occasion des slogans hostiles aux autorités locales ayant trait, dans leur majorité, au « favoritisme et aux inégalités qui sont érigés au niveau de l'APC ». Ces problèmes, dont la liste n'est aucunement exhaustive, cachent d'autres plus profonds, à commencer par la sempiternelle question de la dilapidation des terres agricoles qui a débuté il y a une vingtaine d'années et qui allait sonner le glas d'une ère nouvelle pour la commune, celle qui a précipité, de l'avis des habitants, la ville dans la délinquance. Sous des prétextes fallacieux de la rareté des moyens d'irrigation et de la remontée des eaux de mer, l'agriculture a été délaissée et « remplacée » par le béton. Les vergers, qui faisaient naguère la fierté des habitants de l'ex-Cap Matifou, n'existent plus à cause de la cupidité d'un certain nombre de responsables. Quelques parcelles ont échappé à cette opération de dilapidation programmée ; elles ont subsisté quelque temps, tant bien que mal, à l'état de jachère, pour ensuite subir le même sort que les précédentes. Les plages de Bordj El Bahri, qui étaient dans un passé récent de véritables paradis, sont devenues aujourd'hui des réceptacles pour toutes sortes de pollution. Pis encore, certaines d'entres elles ont servi de lieux où s'accroient, dans l'indifférence la plus absolue, le nombre de bidonvilles, donnant une image facilement assimilable aux favelas brésiliennes.