Elisabeth Peltier vient de publier, aux éditions l'Harmattan, un premier livre sur ses missions humanitaires auprès des réfugiés sahraouis dans le Sud algérien : Malgré tout Dakhla existe, chronique d'un campement sahraoui. Alors que le drame ghazaoui nous transperce le cœur, elle nous offre un regard de l'intérieur chez un autre peuple qui souffre depuis trop longtemps. Les réfugiés sahraouis ont l'habitude des associations humanitaires qui leur viennent en aide dans les camps. Parmi celles-ci, l'association Kareen Mane, basée dans le sud de la France, département du Vaucluse. Elisabeth Peltier en est le « pigeon voyageur » des caravanes humanitaires. Tenace et déterminée, elle a effectué une quinzaine de voyages, chargée dans ses malles de tonnes de matériel indispensable aux réfugiés dans les camps (lire notre article dans El Watan, rubrique « Epoque » du 5 mai 2007). Là, elle aime à rencontrer les gens, échanger, conforter son regard sur la situation difficile faite à ce peuple spolié de sa terre depuis plus de 30 ans. Dès qu'elle le peut, au cours de ses expéditions, elle se met à l'écart et prend beaucoup de notes. Ses amis sahraouis, qui la voyaient ainsi écrire, se demandaient bien le pourquoi de cette boulimie d'écriture. Elle aussi peut-être d'ailleurs ! Des centaines et des centaines de pages ont ainsi été griffonnées, qu'elle s'est décidée un jour à mettre en forme. Là encore, le résultat fut énorme : « J'avais un millier de pages », nous dit-elle. Beaucoup trop pour un ouvrage. Alors elle a élagué pour arriver à un résultat publiable. On y trouve le témoignage des premiers voyages. « Quand j'ai rencontré les Sahraouis, explique-t-elle, j'ai retrouvé chez ces hommes et ces femmes le même rire malgré la souffrance de l'exil sur cette terre inhospitalière, la même volonté à rester debout malgré la paralysie du monde à leur égard, la même vision au-delà des apparences sur la capacité de l'être humain à dépasser l'intolérable ». Dans Malgré tout Dakhla existe, chronique d'un campement sahraoui, elle veut témoigner, redonner vie à des oubliés : « Dans ce livre, il y a huit ans de ma vie, mais surtout de leur vie. J'ai marqué mes émotions, mais aussi leur vie, leur espoir, leur désespoir. Ils n'ont pas de réponse pour un quelconque avenir, on les laisse végéter. Ils sont assistés, mais pour quelle issue, tous ces jeunes et désormais moins jeunes qui sont nés dans les camps, que deviendront-ils ? » Elisabeth Peltier est éducatrice de formation, elle a accompli tout son parcours professionnel auprès de jeunes et d'adultes en difficulté. En 2000, elle répond à la proposition d'une ONG française pour un programme centré autour de l'éducation dans les camps de réfugiés sahraouis, au sud-ouest du Sahara algérien. Elle ignore alors tout de ce peuple, mais cette rencontre va être déterminante dans son choix de vie et c'est en toute indépendance qu'à partir de 2004 elle accompagne sur le terrain des projets de développement initiés et menés par les Sahraouis eux-mêmes. De retour en France, elle ne cesse de porter témoignage de cette leçon d'humanité que livrent ces hommes et ces femmes mêlant désespoir et espoir sur cette terre hostile. Elle se fait leur porte-parole pour exprimer les moments de vie, les émotions et les bouleversements vécus au quotidien. Les fonds récoltés lors de la vente du livre seront destinés à financer sa traduction en arabe prochainement. « L'ouvrage leur revient de droit et il faut qu'ils y aient accès. Je suis en contact avec un libraire-éditeur d'Alger pour mener à bien ce projet ». Au Centre culturel algérien, rue de la Croix-Nivert, le 14 janvier, elle participera à une soirée découverte du peuple sahraoui, avec le vernissage du peintre El Ghaït Yara, la projection du film Une République en exil, de Cheik Djemaï, des poèmes de Nana Rachid et la présentation de deux Cahiers de l'Ouest saharien, dont un consacré au colloque de Nanterre.