Tipazons ! pour reprendre la célèbre pub touristique des années quatre- vingts, mais cette fois la quête des trésors de la wilaya 42 est réalisée avec des outils très digitaux, nous faisons confiance à notre GPS, nommé Messaouda pour les intimes (référence au film Les vacances de l'inspecteur Tahar), nous empruntons l'autoroute pour bifurquer après vers la nationale 11 pour nous retrouver bien garés à côté de l'hôtel Chenoua, une nouvelle structure hôtelière, et du haut de la falaise, nous contemplons la beauté du mont Chenoua, de 905 m d'altitude, en remémorant Camus dans Noces de Tipasa : «… Je désirerais revoir le Chenoua, cette lourde et solide montagne, décapée dans un seul bloc qui longe la baie de Tipasa, à l'ouest on l'aperçoit de loin bien avant d'arriver, vapeur bleue et légère qui se confond avec le ciel.» Ici le Chenoua n'est pas que littérature, il se veut aussi le rendez-vous de tous les amateurs du canoë kayak, leur quartier général c'est ici à la plage des galets, un rivage de plus de 120 m et les sorties sont prévues toutes les quatre heures à partir de dix heures, les moniteurs de l'aquaclubulysse ont hissé haut leur étendard, la séance du briefing sécurité prévue à 10 mn avant la sortie pour rappeler les principes de sécurité et quelques astuces des techniques de rame. Nous mettons nos gilets de sauvetage, nous nous installons dans le canoë, munis de nos rames. Historiquement, le canoë kayak a été une activité physique qui a été celle des premiers habitants de l'Antarctique, la mer de Behring et de l'Amérique latine, les populations inuites ont de tout temps utilisé le canoë comme moyen de transport et plateforme pour la chasse. L'aquaclubulysse à pied d'œuvre Revenant à notre équipe de l'aquaclubulysse qui a à son actif juste deux ans d'expérience, un staff qui a réussi à faire de cette discipline une passion pour beaucoup de jeunes de la région du centre, un véritable style de vie s'installe et la mer retrouve ces adeptes. Nous continuons à ramer sous l'œil bienveillant et protecteur de Moncef, le superviseur général de la sortie kayak qui, de loin, joignant le sifflet à la parole, nous rappelle le bon geste à faire pour éviter la houle, une bonne synchronisation de nos rames avec mon coéquipier nous permettra d'avancer. Le premier test de navigation manuelle consiste à contourner les rochers qui ceinturaient la mer et à prendre le large, mission accomplie. La deuxième mauvaise passe est due à la forte présence du courant contraignant notre petite embarcation à tourner en rond, les autres amateurs du canoë ont ramé comme les légendaires de l'expédition des Kon Tiki, et pour les rattraper, il fallait redresser bien nos sièges et synchroniser bien nos efforts. Nous ramons à notre rythme tout en prenant le temps d'apprécier le magique mont Chenoua, ce réceptacle nourrissant le verbe intarissable de Assia Djebar et les douces mélodies du groupe Ichenwiyen. De notre petit canoë, la corniche chenouie charme nos yeux, les falaises miroitant l'ocre de la terre, le blanc jaune du tuf et autres calcaires, un fond naturel illustrant les imposantes figues de Barbarie. L'homme Chenoui troglodyte Dans l'eau, c'est tout le récit de l'homme troglodyte ou amateur des cavernes qui s'offre à nous, nos ancêtres amazighs de la région du Chenoua ont fait de ces grottes leur gîte il y a six millions d'années, l'historien grec, Hérodote, a mentionné l'homme troglodyte et son architecture rudimentaire. Idriss, le jeune moniteur, chenoui jusqu'à la moelle invite tout le monde à apprécier ces moments de plaisir. Tout le monde saute du canoë et s'adonne à des baignades, des plongeons à l'intérieur de la grotte, un site naturel sculpté par des millions d'années d'érosion et d'autres phénomènes naturels. La température de l'eau est bonne, un prétexte pour piquer une tête et découvrir l'écosystème marin côtier et tout le récif chenoui. Camus omniprésent Seul inconvénient de cette belle balade, le mal de mer vécu par l'un des participants, à savoir mon coéquipier, qui a obligé le chargé de la sécurité à traquer notre petite barque jusqu'à bon port, un autre moment pour continuer à célébrer Camus. «…Mais elle se condense peu à peu à mesure qu'on avance vers elle jusqu'à prendre la couleur des eaux qui l'entourent, une grande vague immobile, dont le prodigieux élan aurait été brutalement figé au-dessus de la mer calmée d'un seul coup. Plus près encore, presque aux portes de Tipasa. Voici sa masse sourcilleuse brune et verte, voici le vieux dieu moussu que rien n'ébranlera, refuge et port pour ses fils dont je suis.» Noces de Tipasa /Albert Camus www.aquaclubulysse.com