Le projet de loi de finances 2019 (PLF-2019), tel qu'adopté mercredi en Conseil des ministres, fait la part belle aux dépenses sociales. Comment analysez-vous ce choix d'orientation budgétaire ? Les objectifs qui sous-tendent le projet de loi de finances pour 2019 sont essentiellement politiques, car s'inspirant directement de la logique du programme économique du président de la République. Cela fait déjà de nombreuses années que les transferts sociaux occupent une place prépondérante dans la structure des dépenses publiques. Cependant, la conjoncture économique a évolué avec les rebonds du marché pétrolier international sans que des modifications ne soient apportées à la fixation des objectifs des lois de finances, notamment la part des dépenses sociales. Il y a certes une prise de conscience au sommet de l'Etat de la nécessité de réviser, par exemple, le système des subventions. Mais le gouvernement n'arrive pas à trouver le bon bout par où commercer. Comme les équilibres sociaux sont maintenus grâce aux larges montants alloués aux transferts sociaux, ce n'est pas à la veille d'une élection présidentielle que des changements seront apportés. Cela fera l'objet par ailleurs d'une compétition dans les contenus des programmes économiques entre candidats à la prochaine échéance électorale. En définitive, le PLF-2019 reste sur une vision de très court terme, en attendant l'évolution de la situation politique après le scrutin présidentiel de 2019. Le prix de référence du pétrole du PLF-2019 étant fixé à 50 dollars le baril, comment sera ventilé le différentiel de recettes dans le cas où les cours du brut restent à leur niveau actuel de 80 dollars ? Le prix retenu du baril de pétrole brut dans le PLF-2019 étant de 50 dollars, il est clair qu'il s'agit d'une référence de prudence de la part des pouvoirs publics, eu égard à l'importance du niveau des dépenses à engager. Actuellement, les cours du pétrole avoisinent les 80 dollars, et si la tendance haussière perdure, il va y avoir une sorte de relâchement de la contrainte financière sur les dépenses publiques, notamment par rapport à l'important déficit budgétaire. Autrement dit, une amélioration du niveau de la fiscalité pétrolière est attendue qui comblera l'écart entre les dépenses et les recettes, sachant que le Fonds de régulation des recettes (FRR) n'est plus opérationnel depuis que le mécanisme de financement non conventionnel est mis en place. Le déficit du Trésor continuera-t-il à être financé essentiellement par la planche à billets ? Le financement non conventionnel (communément appelé planche à billets) est créé justement pour supporter les déséquilibres interne et externe de l'économie nationale. Le remboursement de la dette publique, le financement du déficit budgétaire ainsi que la dotation du Fonds national d'investissement (FNI) en crédits de paiements, constituent les principales rubriques qui permettront au Trésor de recourir au financement monétaire auprès de la Banque d'Algérie (institut d'émission). Sur une période prévue de cinq années par le dispositif, il n'y a pas de raison de changer puisque officiellement l'Algérie refuse de recourir à l'endettement extérieur alors qu'elle garde un niveau élevé de dépenses publiques. Aussi, même avec l'amélioration des cours du pétrole, et en l'absence de réformes économiques profondes, la situation économique du pays n'est pas mise sur une trajectoire de croissance. La légère baisse des dépenses d'équipement risque-t-elle de pénaliser davantage la croissance ? La croissance économique en Algérie est essentiellement tirée par la dépense publique, alors que le niveau de l'investissement productif notamment privé est jugé en deçà des potentialités de l'économie nationale. Le climat des affaires, souvent cité comme un frein, ne permet pas d'avoir une dynamique nouvelle en termes d'investissements créateurs d'emplois et de richesses. Reste alors les dépenses d'équipement programmées dans les lois de finances. Ces dernières subissent depuis 2015 des fluctuations qui ont mis en difficulté de nombreuses entreprises de réalisation. Si la tendance est à la rationalisation dans la programmation des projets d'équipements publics, il est évident que ce soit à l'encontre de la croissance économique globale, et ce, dans le contexte actuel de fonctionnement du système économique en Algérie.