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Festival international du théâtre de Béjaïa : Le FITB revient avec une édition «élaguée»
Publié dans El Watan le 07 - 10 - 2018

Un élagage en somme qui porte la touche de Slimane Benaïssa, le nouveau commissaire du festival, désigné comme tel en mai dernier en remplacement de Omar Fetmouche. «Un festival de transition» pour Benaïssa.
L'édition de cette année portera le nom du regretté Djamel Allam et se tiendra entre les 14 et 22 octobre. Elle a été sciemment décalée d'une semaine de sa date habituelle qui la fait coïncider et confondre avec les festivités du 1er Novembre.
Elle sera aussi décalée du Sila, qui se tient traditionnellement à la même période. «Un encombrement culturel» qui n'a pas échappé au commissaire du festival. «Il faut séparer les choses pour les vivres pleinement», a déclaré Slimane Benaïssa, jeudi, lors d'une conférence de presse tenue dans l'enceinte du théâtre régional de Béjaïa (TRB).
La rupture se fera aussi par la suppression de la cérémonie folklorique d'ouverture avec parade dans la rue. «On est obligé de mettre un peu d'ordre», dit Slimane Benaïssa qui n'affectionne pas «le mélange des genres». L'inauguration prendra cette fois-ci des rythmes moins endiablés avec le spectacle d'une troupe féminine de musique traditionnelle. Ce sera le premier acte d'une édition qui met à l'honneur la femme, en portant le thème général de «Paroles de femmes».
En tout, huit pièces seront jouées en soirée, représentant une poignée de pays (Suisse, Italie, Irlande, France, Tunisie, Algérie et Egypte). Toutes tourneront autour de la thématique de la femme et seront jouées dans différentes langues, mais pas en tamazight. «L'année prochaine nous prendrons la meilleure pièce du Festival national du théâtre amazigh», promet le commissaire du FITB.
A l'affiche de la soirée d'ouverture, Mabkat Hadra (Plus de paroles), une pièce du théâtre de Skikda, lauréate du premier prix du Festival national du théâtre. Produite et mise en scène par Mohamed Cherchal, cette pièce est une métaphore jouée du bâillonnement du droit de parole. Le théâtre tunisien sera représenté par la pièce Les trois veuves, mise en scène par Wafaa Taboubi. Jouée par trois femmes, elle raconte la douleur de trois veuves qui s'unissent dans la peine et le défi. «Une pièce très fine et très intelligente», selon Slimane Benaïssa.
Le commissariat du festival a décidé d'inviter à chaque édition un Algérien évoluant à l'étranger et cette année ce sera Arezki Metref avec la pièce Splendides exilées, adaptée et mise en scène par la Française Catherine Belkhodja. Elle traite de l'exil au féminin, dans la voix de femmes hantées par un passé et des destins. L'Egypte sera présente avec Nouzha fi ardh al maâraka (Balade sur champs de bataille), un texte de Fernando Arrabal mis en scène par Ahmed Fouad.
C'est une comédie qui se joue de l'absurdité de la guerre avec le jeu d'un père et d'une mère qui rendent visite à leur fils qui se trouve au front. Cette édition du FITB allait prendre comme thème «Combat de femmes» avant d'être celle de «Paroles de femmes», la parole étant aussi un droit qui se reconquiert au prix d'un combat. Le décor de la pièce suisse Zokwezo emprunte aussi un fond de guerre, l'histoire étant celle d'une femme de peau blanche qui rencontre un militaire de peau noire.
Le petit boucher, au-delà de la coïncidence
Une deuxième pièce française est au programme: Le petit boucher. Inutile de chercher un parallèle avec une actualité nationale en rapport avec un importateur de viande blanchie à la cocaïne au port d'Oran, pourtant dans la pièce il y a aussi un enregistreur. «On n'a pas fait exprès», croit devoir expliquer Slimane Benaïssa. Le petit boucher, pièce mise en scène par Agnès Renaud et jouée par Marion Bottollier, est l'histoire d'une femme enceinte convaincu qu'elle porte un boucher qu'elle refuse d'enfanter. La soirée du 20 sera italienne.
Désacralisé-ment lucides…très lucides ! sera jouée par deux comédiennes en italien, traduite sur écran en français. A la manière de la farce, les deux comédiennes camperont les rôles de trois couples de femmes différents, prises entre tourments et gaieté. La dernière représentation sera irlandaise. Histoire irlandaise, écrite et interprétée par Kelly Rivière, n'est pas exclusivement féminine, elle met en scène le destin difficile d'un homme, exilé en Angleterre. Mais parce qu'il n'y a pas de frontière étanche entre féminin et masculin, sa détresse est aussi celle de son épouse. «C'est une pièce qui a eu un énorme succès à Avignon.
J'ai eu des difficultés à l'avoir», affirme le commissaire du FITB. La soirée de clôture de la 9e édition est réservée à un hommage à Sid Ahmed Agoumi, auquel assistera le ministre de la Culture. «Nous allons honorer un artiste chaque année, en reconnaissant son talent de son vivant», a déclaré Slimane Benaïssa, qui dit avoir partagé la scène avec Agoumi 1200 fois.
«Le programme ne sera pas officiel mais amical», précise-t-il. Un film retracera le long parcours de Sid Ahmed Agoumi et trois intervenants (Ahmed Cheniki, Nadjib Stambouli et S. Benaïssa) évoqueront sa carrière. En plus de master class, le programme de l'édition comprend des lectures de pièces chaque matinée au TRB par des professeurs du conservatoire royal de Bruxelles. Au lieu du colloque habituel, des conférences seront abritées par l'université où interviendront cinq spécialistes en la matière dont le Marocain Omar Fertat, l'Italienne Chiara Montiniti, Janice Gross, prof aux USA.
«Ce sont des pièces qui ne nécessitent pas beaucoup de moyens mais qui disent beaucoup de choses. Quand j'ai voulu écrire Boualem zid el goudam, j'avais un temps de 20 jours et 3000 dinars en poche. C'est cette efficacité que j'ai envie d'inculquer aux jeunes», confie Slimane Benaïssa, qui a reçu un budget de 2,5 milliards de centimes de la part du ministère pour tenir l'édition d'un festival qui a démarré avec une enveloppe de 7 milliards.
La dotation a servi cette année à éponger une ardoise de 1,2 milliard de dettes laissées par les éditions précédentes. «J'attends le soutien promis de l'ONDA et peut-être aussi celle du ministère», ajoute-t-il. Une billetterie est instaurée cette année pour faire payer le public, pour une entrée à 300 da. Benaïssa trouve «inconcevable» la gratuité des spectacles. «Il faut s'habituer à payer pour venir voir une pièce de théâtre. Et c'est normal», estime-t-il.


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