Je ne suis pas venu pour un quelconque embrigadement en vue des prochaines élections présidentielles », s'est empressé de dire Djamel Ould Abbès, ministre de la Solidarité nationale aux nombreux participants au dîner débat, samedi soir, à l'initiative de l'espace franco-algérien. Paris : De notre bureau Que sous-entend ce propos ? Est-ce pour endormir les réticences, voire les méfiances manifestées ici ou là ? Est-ce une simple précaution de langage ? M. Ould Abbès a-t-il pris la mesure de la volonté d'indépendance, du refus d'instrumentalisation formulée par de nombreux intervenants ? Toujours est-il que la question d'un 3e mandat présidentiel n'a nullement été abordée ni par le ministre ni par les présents. Djamel Ould Abbès a annoncé qu'il installera « très bientôt » le conseil national consultatif de la communauté algérienne à l'étranger qui sera son « partenaire », une « passerelle entre la mère patrie et la communauté algérienne à l'étranger ». Ce conseil sera créé par décret présidentiel. Il n'en dira pas plus sur la composition, le contenu et les modalités d'intervention de ce conseil. Toutefois, il énonce quelques généralités en disant que sa « lettre de mission correspond à une vision nouvelle », que le rôle de son ministère est d'être « à l'écoute » de l'émigration. Puis d'inviter les chefs d'entreprise, managers, médecins, responsables d'associations et de réseaux associatifs, d'élus des différentes obédiences politiques françaises de s'impliquer. « Impliquez-vous, moi je défends la préférence nationale », « je serai votre avocat » en réponse aux intervenants qui ont fait état des difficultés qu'ils ont en Algérie de trouver des interlocuteurs et des partenaires ou qui se sont plaints qu'à compétence égale ils n'ont pas eu la réceptivité et le statut accordés aux grands cabinets d'expertise et de consulting. De belles promesses faites par le ministre, reste leur concrétisation « Je souhaite que nos compatriotes s'impliquent en toute liberté. Vos propositions, vos réflexions seront une source d'inspiration, à nous de vous écouter », dira le consul général de Paris, Abderrahmane Meziane Cherif, dans une brève introduction au débat. Un autre engagement à suivre de près. « Nous ne voulons être instrumentalisés ni ici ni là-bas » Ouvrant le débat, Akli Mellouli (élu municipal PS), co-organisateur, considère l'espace franco-algérien comme un espace d' « initiatives citoyennes qui rassemble des hommes et des femmes de la diversité politique ici et là-bas », comme un réseau « qui ne soit ni dans une forme d'allégeance ni de défiance », mais de « solidarité ici et là-bas », « une force de propositions », un espace de « neutralité rassemblant toutes les sensibilités, énergies et potentialités », « un réseau « fédéré qui ne déposséderait pas les gens de leurs actions », pour « agir », « se réapproprier son histoire », « laisser les dogmes au vestiaire ». Le propos se fait insistant pour dire : « Nous ne serons instrumentalisés ni ici ni là-bas. » Et d'appeler à un « changement des formes du dialogue parce que l'émigration a changé de nature ». Et enfin de rappeler que « nous avons la chance d'avoir deux pays auxquels nous devons loyauté et attachement ». L'intervention de l'universitaire Hend Sadi (proche du RCD), qui a abordé les problèmes des harraga, du malaise des jeunes en Algérie, de « l'exil volontaire », de l'assassinat de l'avocat André Ali Mécili, de l'affaire du diplomate Mohamed Ziane Hasseni, a été jugée hors contexte et hors propos par les organisateurs. Chafia Mentalechta lui réplique qu'il n'est pas « dépositaire de la conscience algérienne », qu'« on est dans un espace d'initiatives citoyennes » et que « ce n'est pas une tribune pour un parti politique ». « Je suis déçu, on voit les limites de cette manifestation », lâche Hend Sadi en abrégeant son intervention.« L'idée d'un réseau franco-algérien chemine dans les esprits depuis longtemps. Ce soir, beaucoup de pas ont été franchis », dira pour sa part Ghaleb Bencheikh. « La Méditerranée traverse l'espace franco-algérien. La notion de citoyenneté doit recouvrer toute sa dignité ici et là-bas, pétrie des valeurs qui sont les siennes » et de plaider pour que le « Franco-Algérien soit un homme debout ».