Il faut que nous redéfinissions nos priorités pour nous consacrer au développement de nos économies (...) pour nous libérer de la honte qui est la nôtre d'être le continent le plus pauvre du monde », a déclaré le chef de l'Etat tanzanien. Le sommet de l'Union africaine (UA) s'est alarmé, hier, au dernier jour de ses travaux, des répercussion — humaines, sociales, économiques — de la crise économique mondiale sur le continent le plus pauvre de la planète. « Il est maintenant clair que l'économie mondiale subit une crise profonde. Chaque semaine, le pronostic pour l'économie mondiale est de pire en pire », a déclaré, à l'ouverture de la séance, le Premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, dont le pays — parmi les plus déshérités de la Terre — est l'un des principaux bénéficiaires de l'aide internationale au développement. Dans ce climat de crise, nombre de pays du continent redoutent une baisse de l'aide internationale à l'Afrique, vitale pour certains projets de développement. Dès avant le début du sommet, dimanche, dont l'ordre du jour officiel est le développement des infrastructures du continent, le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, avait déjà insisté sur la gravité pour les Africains d'une crise « orientant davantage l'agenda de la communauté internationale vers le sauvetage et le renflouement des institutions bancaires et financières, que sur le financement du développement ». Au même moment, « les économies et les populations africainess'apprêtent à subir de plein fouet les conséquences de ces crises dont elles ne sont nullement responsables », avait-il souligné à Addis-Abeba qui accueille le sommet de l'UA. Si l'Afrique a conservé une croissance globale robuste de 5,4% en 2008, elle est néanmoins en baisse de 1,5 point par rapport à l'année précédente et 2009 ne s'annonce pas sous les meilleurs auspices, selon la Banque mondiale (BM). « La crise financière, qui est devenue une crise économique, devient maintenant une crise de l'emploi et dans les mois à venir, elle deviendra, pour certains, une crise humaine », a sombrement prédit le président de la BM, Robert Zoellick, devant le sommet. « Beaucoup d'entre vous ont déjà vu les signes du danger — en premier lieu, pauvreté, famine et malnutrition — l'année dernière du fait de la hausse des prix du pétrole et des produits alimentaires », a-t-il rappelé aux chefs d'Etat et de gouvernement africains réunis à Addis-Abeba. Passant le relais au dirigeant libyen, Mouammar El Kadhafi, élu lundi à la présidence de l'UA pour un an, le chef de l'Etat tanzanien, Jakaya Kikwete, avait appelé ses pairs à prendre la mesure de ces défis et à se consacrer davantage au développement du continent. « Nous consacrons beaucoup trop de temps à régler les conflits ou les partages de pouvoir entre nos politiciens. Il faut que nous redéfinissions nos priorités pour nous consacrer au développement de nos économies (...), pour nous libérer de la honte qui est la nôtre d'être le continent le plus pauvre du monde », avait-il déclaré. Une bonne partie de l'attention des chefs d'Etat a été mobilisée depuis l'ouverture du sommet par les crises et conflits du continent (Somalie, Darfour, RD Congo, Zimbabwe, récents coups d'Etat en Mauritanie et en Guinée) et par une journée de discussions sur le « gouvernement de l'Union » cher à M. Kadhafi. Les débats sur cette question institutionnelle se sont achevés sans grande avancée : les dirigeants ont simplement convenu de changer la dénomination de la Commission, organe exécutif de l'UA, et de l'appeler Autorité africaine.