C'est dans un climat d'une rare tension qu'a eu lieu, hier à Berriane, l'enterrement, au cimetière situé à Hay El Khalef, des deux victimes mozabites des affrontements intercommunautaires qui ont secoué trois jours durant cette localité. Berriane (Ghardaïa). De notre envoyé spécial La crainte que la situation dégénère était omniprésente. Aussi, pour éviter d'éventuels dérapages, les autorités locales ont envoyé d'importants renforts de police et de gendarmerie sur les lieux. Tous les accès aux quartiers sensibles étaient surveillés par les forces de sécurité. Peu de temps avant l'enterrement, le wali de Ghardaïa est arrivé en ville. Mais ni lui ni le chef de daïra n'assisteront à l'enterrement. La cause ? Ils sont tout simplement « indésirables ». « Nous ne garantissons rien avec la présence de ces deux hommes sur les lieux », avertit un homme influent de la communauté mozabite avant l'inhumation. A 16h, les dépouilles des deux victimes des événements sont acheminées vers le cimetière. A l'arrivée des corps, la foule nombreuse venue assister à l'enterrement dénonce à l'unisson la violence et la hogra. « Nounhi ala el mounkar », scande-t-elle. Les funérailles étaient émouvantes. Beaucoup de Mozabites n'ont pu retenir leurs larmes au moment de l'inhumation des deux victimes. Les éléments des forces de l'ordre suivent l'enterrement d'un œil vigilant. Non loin de là, un attroupement de jeunes de la communauté arabophone s'est formé. La scène fait redouter à tous une reprise des affrontements. Mais c'est dans le calme que se disperse la communauté mozabite. Après l'enterrement, Berriane a retrouvé la tranquillité de la matinée. Les gens vaquaient à leurs occupations. Dans les quartiers arabophones, de nombreux commerces avaient rouvert. Sur la route nationale, les traces des derniers affrontements ont été effacées. Ce qui n'était pas le cas dans les quartiers mozabites et arabophones. Les habitations et les commerces incendiés sont toujours là pour témoigner de la violence des affrontements de ces derniers jours. Les murs sont encore parsemés de graffitis exprimant la haine entre les deux communautés. La peur est omniprésente. D'autant que, selon des témoignages, des escarmouches se sont produites en certains endroits de la ville. « Regardez ces barres de fer qu'on a failli recevoir sur la tête », nous dit un officier de police qui a pris position avec ses éléments rue de l'Indépendance, juste avant l'enterrement. Il précise que la police « a réussi à sécuriser toute la route nationale pour que ceux d'en haut ne viennent pas en découdre avec les autres ». « Ce n'est pas nous qui avons lancé ces barres de fer », dément avec force un Mozabite. Et de rassurer le policier : « Ne vous attendez à rien de mal ; vous n'aurez pas de problèmes de notre part. Empêchez plutôt les autres de venir nous attaquer pendant l'enterrement. » « Qui peut garantir qu'ils ne vont pas nous agresser ? », s'est-il interrogé en revendiquant le droit d'être protégé par l'Etat.