Les syndicats du secteur de la santé attendent toujours la publication des textes d'application de la loi sur la santé adoptée en mai dernier par le Parlement. «Nous attendons toujours la promulgation des textes d'application qui doivent être rédigés avec les partenaires du ministère», met en avant, lors du forum d'El Mihwar, le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), qui a rappelé l'opposition de son organisation à une loi sanitaire «opaque», adoptée pour privilégier le secteur privé aux dépens du secteur public. Son confrère, le Dr Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), relève à cet effet que lors d'une réunion tenue il y a trois semaines, au ministère de la Santé, il a pu savoir qu'il n'y a pas de décret d'application préparé à ce jour, malgré les propos de l'ancien ministre. «Il n'y a pas à ce jour une commission devant regrouper les syndicats, les associations des malades pour les textes d'application… Le ministère n'a pas tenu compte de nos propositions adoptées à l'unanimité lors des discussions sur la loi sur la santé (annulation du service civil et activité complémentaire). Il y a des craintes que ce soit le cas pour les textes d'application», met en garde le Dr Yousfi. La Parlement a adopté en avril et mai derniers le projet de loi relatif à la santé, venu réviser le texte de 1986. Le ministre Mokhtar Hasbellaoui a estimé, à l'issue du vote des membres du Conseil de la nation, que l'adoption du texte constituait une «amorce réelle du processus de réforme du système sanitaire, qui nécessite la mobilisation de toutes les capacités actives et créatives pour la formulation des textes réglementaires», précisant qu'une période transitoire de deux ans a été fixée, avant l'introduction du système sanitaire dans un nouveau cadre réglementaire. «L'avenir du système national de santé passe par l'actualisation du support législatif pour consacrer le rôle social de l'Etat et concrétiser ses engagements dans un nouveau cadre qui prenne en considération les mutations socioéconomiques en Algérie», a-t-il estimé. Les syndicats constatent que la prise en charge des préoccupations socioprofessionnelles des praticiens est «primordiale» à toute adoption d'un texte qui ne sera peut-être jamais appliqué complètement. 30 000 paramédicaux sans diplômes ! «Quatorze ans après la décision de réformer, il n'y a pas de stabilité dans le secteur avec au moins huit ou neuf ministres… Le secteur de la santé n'est pas une priorité. Il y a des slogans sans plus. Les experts ont recommandé la révision du texte de loi mais aussi la prise en charge de la situation professionnelle des médecins», relève le Dr Merabet, signalant que l'objectif des autorités est de «démanteler» le secteur public au profit du secteur privé, «plus attractif». Le Dr Yousfi met en avant l'«inadéquation» des statuts de la santé avec la profession. «Il est impossible d'avoir un secteur de qualité sans prise en charge de l'élément humain. Il faut de l'intéressement… Aucune évolution n'est venue sans mouvements de grève. Les statuts particuliers sont gelés. Notre conseil national extraordinaire est convoqué pour discuter de la question», annonce-t-il. Cherif Mustapha, membre du bureau national du Syndicat algérien des paramédicaux (SAP), met en avant les déficits en paramédicaux dont plusieurs exercent dans l'illégalité. «Depuis 2015 à ce jour, il y a plus de 30 000 paramédicaux qui exercent sans diplômes. Ces paramédicaux, qui sont aussi bien dans le public que dans le privé, sont dans l'illégalité», s'alarme-t-il, en mettant en avant le déficit en formation. Les participants au forum d'El Mihwar plaident pour une «actualisation» de la loi relative aux assurances sociales de 1983. «On est avec le même système de tarification de 1987. Il y a deux nomenclatures, celles des actes et des tarifs, inchangées, alors qu'il y avait plusieurs opérations inexistantes à l'époque (échographie, IRM, etc.)», indique le Dr Merabet, qui met en avant l'absence de représentation des professionnels dans les différentes caisses. Le syndicaliste plaide également pour la contractualisation qui permettra aux établissements de santé d'avoir les financements nécessaires à leur développement. «75% du budget des hôpitaux sont réservés à la masse salariale, 15% pour l'achat des consommables et le reste sert pour le budget de fonctionnement», regrette-t-il.