Après l'installation, conformément aux instructions du président de la République, de la Commission nationale chargée de la préparation de l'élection présidentielle, présidée par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, le chef de l'Etat a institué hier, par décret présidentiel, la Commission politique nationale de surveillance de l'élection présidentielle (CNPSEL). Un organisme qui a osé, pour la première fois dans l'histoire de l'Algérie, lors des élections législatives de 2007, dénoncer les dépassements ayant entaché la régularité du scrutin. Saïd Bouchaïr, alors coordinateur de cette commission, est allé même jusqu'à désavouer le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, et à saisir par écrit le chef de l'Etat pour lui faire part de cette désastreuse situation. En raison probablement des vagues faites par cette structure, le pouvoir a décidé lors des dernières élections locales carrément de s'en passer. Aujourd'hui, il décide au nom du renforcement de la transparence du scrutin de la réactiver en sacrifiant, néanmoins, Saïd Bouchaïr qui a pourtant une longue expérience en la matière. Celui-ci a été remplacé par l'ex-ministre de la Justice, Mohamed Teguia. Cette commission, qui sera composée de représentants de partis politiques agréés et des candidats retenus par le Conseil constitutionnel, a pour mission de surveiller le processus électoral dans toutes ses phases. Les membres de cette structure doivent avoir, à tout moment, la liberté d'accès aux bureaux de vote, d'assister au dépouillement des votes et de suivre librement, sans aucun empêchement, le processus électoral, durant toutes ses étapes. L'institution d'une telle commission, du point de vue de son initiateur, répond beaucoup plus au souci de réunir toutes les conditions de réussite de la prochaine élection et permettra aux formations politiques de veiller au bon déroulement de l'opération électorale à tous les niveaux. « Cette mesure traduit aussi notre détermination à donner à la prochaine consultation le caractère de transparence et d'équité permettant l'expression souveraine, pleine et entière de la volonté populaire », lit-on dans le communiqué de la présidence de la République. Il n'en demeure pas moins que bon nombre d'observateurs parlent avec persistance de l'inutilité d'une telle commission, qui a montré ses limites lors des précédentes joutes électorales. La commission qui avait enregistré de graves dépassements à travers de nombreuses régions du pays en 2007 n'a pas pu s'imposer et n'avait pas eu son dernier mot malgré les preuves palpables qu'elles avaient en sa possession. M. Bouchaïr, alors son coordinateur, avait même accusé à l'époque le président de la commission administrative des élections législatives (ndlr, le chef de gouvernement, Abdelaziz Belkhadem) de complicité et, de ce fait, il avait appelé le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, « à prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme à ce qu'il avait qualifié de comportements irresponsables qui portent atteinte à la crédibilité des élections, à la réputation du pays et à l'autorité de l'Etat ». Comme à l'accoutumée, le pouvoir n'a pas bougé le petit doigt. Pis encore, il a tourné le dos à la commission en ignorant complètement ses critiques acerbes. Dans un entretien accordé à notre journal il y a un mois, Saïd Bouchaïr est revenu sur ce sujet en révélant que la garantie de la transparence d'un scrutin ne repose pas sur telle ou telle commission, mais plutôt sur la neutralité de l'administration. Pour lui, cette impartialité est loin d'être acquise du fait des comportements de certains agents de l'Etat qui outrepassent leurs prérogatives. En 2009, ces pratiques sont toujours de mise. Alors à quoi sert concrètement une commission si ce n'est beaucoup plus pour la consommation externe.