Le projet politique présidentiel pour 2005 est résumé par Abdelaziz Belkhadem dans une récente interview parue dans un quotidien : « Nous allons d'une démocratie semi-parlementaire à un système présidentiel où il y aura une représentation parlementaire qui viendrait conforter le programme sur lequel a été élu le président. » En d'autres termes, la configuration institutionnelle - et politique - actuelle sera revue. D'abord par une révision de la Constitution en vigueur, jugée aujourd'hui attentatoire à certaines prérogatives présidentielles. Au lieu d'être responsable devant le chef de l'Etat, le chef du gouvernement est comptable, de par la loi fondamentale, devant les parlementaires auxquels il soumet son propre programme. Aussi, la réforme constitutionnelle préconisée est de substituer au chef du gouvernement un Premier ministre, responsable uniquement devant le président de la République qui le charge de défendre sa politique et seulement la sienne. Bouteflika n'a jamais caché son hostilité à la Constitution actuelle qui ne cadre pas avec l'idée qu'il se fait du pouvoir politique, total et exclusif, ce qui l'a amené à entrer en conflit frontal avec deux chefs de gouvernement, Benbitour et Benflis, poussés par la suite à la démission. Le système parlementaire également ne lui a jamais convenu. Outre qu'il a boycotté l'APN des années durant, Bouteflika ne s'est pas privé de recourir à de multiples ordonnances pour faire passer des lois dont il redoutait qu'elles soient bloquées ou amputées par les députes. Le garde-fou qu'il avait mis en place, l'alliance gouvernementale, ne l'a pas préservé de cet écueil. Les trois partis qui le composent que sont le FLN, le RND et le MSP n'ont pas constitué un bloc monolithique à même de défendre totalement son programme politique à travers les projets de lois qui en découlent. Les députés de ces partis agissent souvent par affinités partisanes et non par discipline présidentielle comme en témoignent les derniers amendements introduits dans la loi de finances 2005 interdisant l'importation de boissons alcoolisées et reconduisant l'importation de voitures de moins de trois ans. Des partis ont menacé publiquement de mettre en échec le projet gouvernemental de révision du code de la famille. Aussi il n'est pas exclu qu'un « parti présidentiel » en vienne à se substituer à « l'alliance gouvernementale » jugée versatile : il pourrait être la fusion de plusieurs formations politiques existantes qui abandonneraient leur autonomie pour se mettre au service du chef de l'Etat comme il peut être issu de la mutation d'un grand parti, une idée à laquelle pense certainement Abdelaziz Belkhadem, ne voyant dans le devenir du FLN que la bannière du président de la République. En consolidant le césarisme présidentiel, le glissement institutionnel et politique envisagé rendrait illusoire une vie politique algérienne bâtie sur de vrais contre-pouvoirs.