Tout cela a engendré une tradition séculaire pour le tissage d'objets divers de la vie courante à partir de la laine de mouton comme les hibet et les ghraïer ou sacs utilisés pour le transport du blé à dos de mulets, les hnabels ou couvertures en laine et amezlaguen en poils de chèvre, etc. Mais ce sont les tapis, essentiellement de Babar qui ont faits la renommée des Nememchas. Les zarbiates ou zrabas sont des tapis épais qui peuvent avoir plusieurs dimensions et sont l'œuvre d'une ou de plusieurs femmes qui s'attelleront jusqu'à 3 mois derrière un métier à tisser pour confectionner un tapis de 3 m de long x 2 de lage. Chaque famille de tapissiers a son style propre mais tous utilisent les mêmes techniques de tissages qui perpétuent la tradition : bouts de laine pure sur une trame de coton, choix de couleurs à dominante rouge ici, l'on préfère parler de rouge annabi ou dem el ghezel (sang de gazelle), et motifs géométriques qui représentent d'authentiques signes berbères, etc. A Babar, il subsiste encore quelques ateliers familiaux, parmi lesquels celui d'un certain N. A. qui prétend fermement ne jamais devoir se séparer d'un tapis fait maison datant de 1925, à moins que… car il est de tradition de savoir négocier l'achat d'un tapis ! Une coopérative municipale emploie près d'une quarantaine de jeunes femmes dans le cadre du filet social, et qui se relaient derrière une dizaine de métiers à tisser, ce groupe est encadré par un couple de maîtres tisserands, issu d'une lignée d'artisans connus dans toute la région pour la qualité de ses produits, en l'occurrence la famille Sid. La production actuelle est limitée à une dizaine de tapis par an à cause des problèmes de leur coût élevé et donc de leur commercialisation; à ce propos, El Hadj Bouzekri, rencontré à l'APC, rappellera qu'à une époque faste, cette coopérative produisait jusqu'à 600 m2 par an, soit une centaine de tapis qui trouvaient preneurs même à l'étranger. Il insistera encore sur la nécessité de promouvoir ce noble produit artisanal qui constitue un patrimoine culturel national et un symbole de la région des Nememchas. Rappelons enfin que le tapis de Babar a été et reste un ambassadeur primé dans d'innombrables salons artisanaux en Algérie et au-delà de ses frontières : Foires de Leipzig en Allemagne, à Paris, Dubaï, etc. La poste lui a rendu hommage en 1968 par l'émission tirée à 500 000 exemplaires d'un timbre intitulé Tapis de Nememchas.Une dernière visite dans l'un des ateliers de la Maison de la culture (qui est soit dit en passant un bijou architectural), consacrée à la tapisserie locale, clôturera notre voyage dans cette wilaya des Aurès.