Ainsi, les urbanistes ne peuvent pas omettre d'implanter ces ouvrages verdoyants au sein même du plan d'une ville à l'effet d'amadouer le paysage urbain. Parc Sofia, parc Mont Riant, parc Prague (Bhirat Marengo), parc de la Liberté (ex-Charles Galland) et autres parcs Zyriab et Konakry sont autant de lieux censés inviter le quidam à la décompression. S'il est vrai que certains de ces endroits sont joliment entretenus par l'Edeval, il va sans dire que d'autres semblent livrés à eux-mêmes et font l'objet de dégradation (bancs, arbres, lampadaires, etc.). L'air dépité par l'image qu'offre le cadre, une vieille dame nous interpelle pour évoquer «le temps où les familles venaient se requinquer l'intervalle d'un après-midi, à Bhirat Marengo (…). L'époque où le sens civique dictait à chacun de nous de prendre soin des éléments composant l'espace (…). De ne pas abîmer le patrimoine floral qui égaie la cité», poursuit-elle sur un ton amer. En effet, peu de jardins, de nos jours, échappent, malheureusement, à ce réflexe aux antipodes du civisme. Outre cette nuisance que d'aucuns trouvent plaisir à commettre au sein même de cet environnement de détente, il n'est pas loisible, parfois, d'emprunter ces sites enchanteurs ou de profiter de ce qu'ils offrent comme vertu «déstressante». «Une virée au parc de la Liberté vous renseigne sur le bien-fondé de mon constat», nous dit un père de famille qui avait l'habitude d'emmener sa marmaille dans ce beau lieu ou pour rallier le musée des Antiquités qui se trouve en amont, car, nous dit-il sur un ton discret, «des choses pas très catholiques se passent à l'intérieur de cette enceinte, dont le voisinage s'est plaint à maintes reprises, vainement». A Bhirat Marengo, nombre de gens ont été victimes d'agression. «Une horde sévit dans les parages», relève avec regret un riverain. Square Port Saïd, lieu des vieux habitués Elle choisit sa proie pour la délester de sa besace sous la menace de l'arme blanche. Il est un lieu commun aussi de constater l'état de dégradation d'autres espaces publics comme le jardin Konakry à Bologhine ou celui de l'avenue Boubella pour ne citer que ceux-là qui, en dépit d'un entretien régulier de l'Edeval, ne sont pas moins à l'abri des déprédations. Si le square Port Saïd est connu pour être l'apanage des «cambistes» de fortune qui pullulent à ses abords ou un point de chute pour les gens venant de l'intérieur du pays, principalement les sans-abri et autre plèbe aux mœurs dissolues, il demeure néanmoins un endroit fréquenté par certains qui s'emploient à lui conférer un aspect moins lugubre. Certains anciens se rappellent de ce lieu appelé square Bresson au milieu duquel trône un kiosque à musique aujourd'hui abandonné à son triste sort, sinon servant d'endroit pour les mendiants et autres SDF. Pendant la période coloniale, la tonnelle accueillait, se souvient âmi Omar, «des concerts que la municipalité organisait les week-ends et jours de fête». Faisant un saut dans le passé, il évoque les moments agréables qu'agrémentaient les musiciens andalous comme Ahmed Serri. Le petit square Bresson – que l'on appelait aussi square de la République ou Aristide Briand, dont la vue sur mer par-delà le boulevard, servait d'observatoire – perd au fil des jours de son charme… Autrefois, on y voyait défiler les spectacles de la rue et assistait à une animation qu'offraient les bateleurs et autres musiciens, renchérit un octogénaire avant de poursuivre que «sous l'ombrage de ses lataniers et autres arbres d'espèce ficus au feuillage persistant que l'hiver ne dénude jamais, des petits ânes tournaient inlassablement pour la joie des enfants». Depuis, le cadre a beaucoup changé, même le gazouillis des hirondelles qu'on écoutait à la lumière vespérale se fait rare, nous lance âmi Rezki. Mais voilà qu'une bonne volonté vient de s'afficher pour faire de ce lieu une œuvre utile. Grâce à l'initiative d'un sexagénaire, le cadre semble depuis quelque temps faire reculer l'image d'un réceptacle malfamé et moribond. Ainsi, le quidam peut trouver à sa disposition des chaises de location l'invitant à observer une halte pour se reposer l'espace d'un moment dans cette aire. «Je souhaite, nous dit Lahcène Neggazi, que l'APC de La Casbah protège et entretienne journellement ce patrimoine immobilier d'intérêt public.» Cet ouvrage qui, autrefois, poursuit-il non sans une pointe d'amertume, était plus gai et enchanteur avec ses arbres, ses quatre fontaines à vasque non fonctionnelles à présent – et son édicule – qui laisse à désirer. Les exploitants de cet espace, Lahcène et Belkacem Kazmat appellent de leurs vœux l'administration communale pour que ce lieu, qui fait face à l'antre du TNA, retrouve son lustre d'antan. Un point de rencontre qui se veut rassembleur aussi, notamment pour la frange du troisième âge qui semble prendre ses aises à deviser autour d'un thé.