La région de Collo vit-elle tant que cela en marge de la dynamique de développement, au point où même l'embellie financière du pays de ces dernières années, ayant par ailleurs beaucoup profité à la majorité des autres régions du pays, n'avait pas réussi à améliorer le quotidien de ses habitants ? Peut-on parler de développement local quand ces mêmes habitants, à l'unanimité, sont révoltés par l'état de déliquescence qui frappe cette région depuis une dizaine d'années ? Les discussions des Colliotes ont radicalement changé et ne sont alimentées que par la dégradation de leur cadre de vie. On ne parle plus du chômage qui touche la majorité écrasante des jeunes. On ne parle pas non plus de la crise du logement qui frappe de plein fouet cette région, qui n'arrive pas à attribuer une vingtaine d'unités par an. Les projets dits de développement local, réalisés durant ces dernières années, ont tous, sans exception, été un véritable fiasco. La rénovation des réseaux d'assainissement et d'AEP de la Zhun, dans laquelle 300 MDA(millions) ont été injectés, n'a pas amélioré le cadre de vie des citoyens. Deux réalisations de grande importance, à savoir le barrage de Béni Zid et l'extension du port de pêche, au début des années 1980, qui étaient censées insuffler une dynamique en diminuant le gap socioéconomique avec les autres régions limitrophes, n'ont pas non plus atteint l'effet escompté. Le barrage affiche certes le plein, comme chaque hiver, dès les premières averses dans la région la plus arrosée du pays, mais au lieu d'avoir l'eau H24, comme prévu, les ménages n'en ont, depuis quelque temps, qu'une fois par semaine. La cause incombe à la rupture au niveau de l'adduction principale à partir de la station de traitement du barrage, pour la rénovation de laquelle une enveloppe de 600 MDA a été allouée. Les Colliotes devront donc prendre leur mal en patience, car la pénurie pourrait durer un mois. A signaler que les nombreuses fuites d'eau du réseau d'AEP ont considérablement augmenté durant ces dernières semaines. Qu'il pleuve ou non, les routes de Collo sont continuellement arrosées, d'une part, par les nombreuses fuites du réseau d'AEP, et d'autre part, par le réseau d'assainissement, défectueux, et cela même au niveau de certains tronçons récemment « rénovés ». Le risque de cross- connexion est évident, mais tant que les Colliotes ne boivent que l'eau des citernes, approvisionnées à partir des sources naturelles, celui-ci reste minime. En outre, que dire de certains locataires d'immeubles relevant de l'OPGI, vivant depuis des années avec des caves et des alentours inondés par les eaux usées ? « La vie est infernale, particulièrement durant la saison estivale, quand nous sommes agressés par les odeurs nauséabondes, les moustiques et les rats », se plaignent des habitants, qui nous ont fait découvrir des étangs couverts d'algues et d'ordures au niveau de deux façades d'immeubles. L'extension du port de pêche de Collo, sur lequel reposaient les espoirs de la jeunesse colliote, à l'effet de dynamiser l'économie locale, n'a pas non plus atteint son objectif initial. Une seule usine de Collo, laquelle s'avère être la doyenne, a survécu au processus de démantèlement des entreprises publiques par les holdings ; elle résiste difficilement afin d'assurer un gagne-pain incertain à ses travailleurs. Pour rappel, la défunte ENMPGP a mis à la rue plus de 200 travailleurs, pourtant dans une conjoncture où le bâtiment battait son plein. Toutefois, l'ambiance festive générée par les jeunes supporters colliotes autour du club de football local, qui inscrit une série de performances, apporte un peu de joie dans cet environnement de décadence et de marasme social.