Le président de la République vient d'annoncer la création, à très brève échéance, d'une banque d'investissement à long terme, suffisamment capitalisée (150 milliards de dinars) pour assurer le financement de grands projets industriels et immobiliers. C'est une institution clé de développement que les grands investisseurs, aussi bien nationaux qu'étrangers, attendaient depuis plus de quinze ans, date à laquelle fut dissoute la Banque algérienne de développement (BAD), qui avait assuré cette fonction durant la période d'industrialisation des années 1970 et 1980. Restructurée en 1994, sans doute sur conseil du FMI, qui considérait que cette institution de crédit à long terme générait de l'inflation, la BAD n'a jamais plus retrouvé son rôle originel de financier des gros investissements structurants. Elle est aujourd'hui cantonnée dans la gestion des lignes de crédits extérieures, principalement au profit des importateurs de produits finis ou semi-finis. Ramener cette banque à ses fonctions originelles beaucoup plus nobles, consistant à accompagner financièrement les gros investisseurs industriels est évidemment une excellente nouvelle. Et, ce ne sont pas les projets qui manquent. Que ce soit dans la pétrochimie, l'hydraulique, la sidérurgie, le tourisme ou l'immobilier, il y a une forte attente de financement sous forme de crédits à long terme. En l'absence de ce type d'institution et au regard de la sous-capitalisation dont souffrent nos banques commerciales, les investisseurs les plus déterminés (Algérie Télécom, Air Algérie, Cevital, Dahli et autres) ont été contraints de se financer au moyen d'emprunts obligataires ou de syndicats de banques, qui sont malheureusement très hésitants quand il s'agit de financer des entreprises privées. Ceux qui, comme Tonic Emballage, ont eu recours à une banque commerciale pour réaliser un projet de grande envergure (complexe papetier de Bou Ismaïl) ont eu beaucoup de mal à adapter le processus de remboursement des crédits à court et moyen termes qui leur furent accordés, aux exigences draconiennes de taux d'intérêt et de délais, des banques primaires. La plupart des investisseurs qui se sont lancés, souvent par nécessité, dans ce type de financement y ont laissé des plumes. La banque d'investissement qui verra prochainement le jour constitue donc un véritable soulagement pour les industriels qui ne verront plus l'utilité de recourir au financement à court terme pour réaliser leurs projets. Les risques d'incapacité de remboursement, avec tous les soucis de poursuites pénales ou de mise sous séquestre judiciaire, n'auront alors aucune raison d'exister, les investisseurs ayant plus largement le temps de s'acquitter de leurs dettes de crédit contractées sur le long terme (20 à 30 ans). L'Algérie gagnerait également beaucoup avec cette banque d'investissement suffisamment capitalisée pour réamorcer le processus d'industrialisation qui a beaucoup souffert de son absence. On la verrait bien intervenir pour accompagner les nombreux projets industriels et immobiliers en attente de financements, mais également, pour sauver du naufrage certains gros investissements (cas du complexe Tonic Emballage, de l'îlot Belhaffaf de Belcourt en gestation depuis plus de dix ans, etc.) qui peuvent rendre d'inestimables services au pays, aussi bien en termes d'emplois, qu'en termes d'exportation hors hydrocarbures. C'est pourquoi la décision du président de la République de créer ce fonds d'investissement ne pourrait être que saluée. Elle intervient au moment où le Trésor public dispose des fonds requis pour capitaliser cette institution qui a besoin de gros capitaux. L'important, aujourd'hui, est qu'elle soit opérationnelle à très brève échéance, ce qui nous semble tout à fait possible eu égard à l'expérience de nombreux cadres de la Banque algérienne de développement dans la gestion et l'ingénierie financière des grands projets industriels.