Le séquentiel adopté par les pouvoirs publics pour transformer l'organisation et la gestion de l'économie a nécessité un effort d'harmonisation et d'adaptation des règles qui gouvernent le fonctionnement des nouvelles entités créées et celles qui existent déjà pour encadrer le processus des réformes. C'est ainsi que pour assurer la transition d'une économie dirigée vers une économie de marché, l'Etat a transféré progressivement un certain nombre de ses prérogatives à de nouvelles instances appelées indifféremment autorités administratives indépendantes (AAI) ou autorités de régulation (type Conseil de la monnaie et du crédit, Commission d'organisation et de surveillance des opérations boursières, Agence de régulation de la poste et des télécommunications, Conseil de la concurrence…) afin de conférer aux réformes une meilleure prise en charge en termes d'efficacité. Ce n'est plus l'Etat qui régule directement, mais quelqu'un d'autre le fait à sa place mais de manière indépendante. Parallèlement à cette réforme institutionnelle, un travail méritoire de normalisation a été engagé, et qui se poursuit toujours, pour préparer et inscrire l'évolution de l'économie dans un cadre universel, pour ne pas dire de mondialisation. Mais force est de constater que ces progrès tant attendus ne se sont pas entièrement réalisés par suite d'une insuffisante synchronisation et paramétrage dans le pilotage des réformes, si bien qu'aucun secteur ou sphère ne peut booster l'autre parce que la mise à niveau et le toilettage ne se sont pas faits dans le même mouvement. décalage Un décalage criant existe entre, par exemple, la sphère réelle et la sphère financière, ce qui influe de façon négative sur la sortie de transition. Les retards accumulés durant la décennie 1990 en raison des difficultés qu'a connues le pays ont retardé la mise en œuvre d'un certain nombre de programmes structurants pour le passage mesuré à l'économie de marché. L'économie nationale se trouve aujourd'hui dans une configuration inadéquate pour permettre un redéploiement coordonné et ordonné de toutes les composantes de l'édifice institutionnel. Ce qui se passe en ce moment sur la scène économique est édifiant à plus d'un titre. Toutes les critiques fusent sur les banques, comme si elles constituent le facteur bloquant de la croissance, alors que tout le monde est convaincu que la croissance ne peut être tirée que par la sphère réelle. L'instrumentation qui régit la sphère financière, bien qu'incomplète sur certains points, est néanmoins assez opérationnelle pour répondre à la problématique du financement de l'économie en termes d'allocation de ressources sélectives. L'accent et les efforts à entreprendre pour parachever le travail doivent privilégier impérativement la réalisation des chantiers ouverts et couvrir rapidement les besoins identifiés. Le développement de la sphère réelle et son encadrement pour une meilleure intégration dans l'économie de marché restent tributaires des actions programmées depuis une décade et non encore réalisées. Il est instructif, voire salutaire pour les correctifs éventuels à apporter dans le management global des réformes de s'interroger sur la réussite des programmes de libéralisation lancés dans les autres pays à la même période que l'Algérie et qui se sont traduits dans la plupart des cas par un progrès certain et mesurable dans tous les domaines, particulièrement en termes d'indicateurs macro et surtout micro. Ce rapprochement et cette confrontation des données de ces pays permettraient d'identifier les goulets d'étranglement, même si au plan national, les contraintes socioéconomiques de chacun de ces espaces restent spécifiques. Le travail ne doit pas s'arrêter là parce que ce serait encore une fois improductif. Une constante est à relever chez nous, c'est qu'on ne tire pas les enseignements du passé, et s'il arrive qu'on le fasse, on n'applique pas la leçon.