Face à la dureté de la vie dans ce milieu, à bien des égards devenu hostile à cette population essentiellement nomade et pas toujours épargnée par la pauvreté extrême, le barbelé, hier ennemi no1 à côté de la mine, se transforme en une source de revenus non négligeable. Récupéré par le père, le fils ou la mère,pour en faire des enclos pour bétail (n'oublions pas que nous sommes dans le pays de l'ovin) ou des clôtures de lots de terres cultivables, celui-ci participera, d'une certaine manière, à rendre les mines plus assassines encore. Il n'est pas inutile de rappeler que les autorités françaises ont érigé ce mur électrifié sur une longueur de 750 kilomètres de long de Marsat Ben Mhidi (Port Say) à Igli situé à 100 km au sud de Béchar vers Adrar. Les radars, installés tous les dix kilomètres pour s'assurer de la sécurité de ce formidable arsenal de contrôle et de répression lors de la guerre de Libération nationale, avec leurs 30 000 volts, pour « griller » toute présence humaine suspecte, ne sont plus là, mais les milliers de mines antipersonnel, anti-groupe ou éclairantes restent encore enfouies dans ces terres fragilisées où les vents et l'érosion font un travail de sape redoutable, principalement dans ces bandes frontalières de Djeniène Bourezg, Moghrar, Dermel, Fortassa, Benamar, Kasdir, Tirkount, Oulkak, Guaâloul, Msif, Djebel Mzi, Aïn Sefra, Sfissifa, Tiout, Hadjart Lemguil, Haraza, Naâma, Horchia, Méchéria et d'autres localités enserrées par les fils de la mort sur cette ligne qui comptait 7 à 9 mines par mètre carré et 50 000 mines tous les 20 km, jusque dans la décade 1970, période où on dénombrait pratiquement plus de 100 victimes par an. Il y a bien eu un travail de déminage remarquable entamé ces 40 dernières années par les éléments de l'Armée nationale, mais la région, immensément vaste, est loin d'être totalement nettoyée, car on continue de recenser des victimes ici et là, notamment du côté des éleveurs nomades obligés de chercher de nouveaux territoires de pacages — pas toujours sécurisés — parce que les zones de parcours de transhumance se montrent moins nourriciers ou parce que les services des forêts mettent en défens des terrains de parcours où il n'est plus permis de lâcher ses bêtes.