L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a échoué, hier, à désigner un successeur au directeur général, l'Egyptien Mohamed El Baradei, alors qu'elle est en panne sur les dossiers nucléaires controversés de l'Iran, de la Syrie et de la Corée du Nord. Lors d'une réunion de deux jours à Vienne des 35 membres du conseil des gouverneurs devant désigner le nouveau chef de l'AIEA, aucun des deux candidats en lice – l'ambassadeur japonais Yukiya Amano (61 ans) et le diplomate sud-africain Abdul Samad Minty (69 ans) – n'a obtenu la majorité nécessaire de deux tiers des suffrages exprimés. D'après les indications fournies hier par la présidente du conseil des gouverneurs, l'Algérienne Taous Feroukhi, M. Amano, qui avait l'appui des Occidentaux et faisait figure de favori, a obtenu 22 voix, deux de plus que la veille, sans atteindre toutefois la majorité qualifiée, soit 24 voix. Idem pour le candidat sud-africain qui, dans un scrutin séparé, n'a pu améliorer son score de 15 voix, recueilli la veille. En conséquence, la procédure doit recommencer à zéro avec de nouveaux postulants qui devront se déclarer dans un délai de 28 jours à compter du 30 mars. Une nouvelle tentative de désignation du candidat au poste de directeur général pourrait avoir lieu en mai ou en juin. Dans les milieux proches de l'AIEA sont cités les noms de l'ancien chef d'Etat mexicain Ernesto Zedillo, du directeur de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (UPCW /OIAC), de l'Argentin Rogelio Pfirter, du responsable de la Commission préparatoire pour l'application du Traité d'interdiction totale des essais atomiques (CTBTO /OTICE), du Hongrois Tibor Toth et de l'ambassadeur chilien auprès de l'AIEA, Milenko Skoknic. La nomination officielle du nouveau chef de l'AIEA doit avoir lieu en septembre, lors de l'assemblée générale annuelle de l'agence, et celui-ci prendra ses fonctions fin novembre. L'impasse actuelle n'est pas une nouveauté pour l'AIEA : en 1997, Mohamed El Baradei n'avait été désigné qu'en juin et son prédécesseur, le Suédois Hans Blix, avait dû attendre, en 1981, l'ultime limite de septembre. L'élection se déroule sur fond de débat récurrent sur la politique nucléaire de l'Iran, soupçonné par les pays occidentaux de vouloir se doter de l'arme atomique, ce que Téhéran récuse catégoriquement, soulignant que son programme nucléaire a pour seul objectif l'alimentation énergétique du pays. Plusieurs pays occidentaux reprochaient au candidat sud-africain, ancien militant anti-apartheid, d'avoir parfois été sensible aux thèses iraniennes, tandis que d'autres délégations considéraient que le candidat japonais était « plus un technicien qu'un politique ». Certains pays souhaiteraient un directeur général avec une forte personnalité, à l'instar de Mohamed El Baradei, prix Nobel de la paix 2005. Ce dernier, 66 ans, à la tête de l'AIEA depuis 12 ans et qui a renoncé à briguer un quatrième mandat, a parfois été critiqué par Washington pour s'être opposé à « la ligne dure » des Etats-Unis à l'encontre de l'Iran.