Vaste étendue de lieux de pâturage, pâtés de maisons éparpillés, quelques brebis et moutons arpentant les espaces jouxtant l'axe autoroutier Est-Ouest au niveau de la commune de Mouzaïa, puis le chemin de wilaya 62 menant à la commune de Aïn Romana issue du découpage administratif de 1984 et comprenant les centres de Hay Bordj Emir Abdelkader ayant appartenu précédemment à la commune de Chiffa peuplée de près de 4500 âmes, le centre de Hay N'haoua, ex-commune de Aïn Defla ne dépassant guère le millier d'habitants, le centre de Hay Rihane, peuplé de 3500 personnes ainsi que le chef-lieu de la commune célèbre pour sa zone d'activité où le groupe Sim concentre le principal de ses activités. 12 000 habitants éparpillés sur 101 km2, classant ainsi la commune parmi les dernières de la wilaya pour la densité de la population au km2 (118) et n'étant supérieur qu'au taux des communes de Sohane, Chréa, Oued Djer et Hammam Melouane. Sans ressources issues de la zone d'activité de par l'adresse du siège situé ailleurs, élevage domestique indigne d'être cité, pas de téléphone dans la plupart des centres, éclairage public nécessitant beaucoup d'argent mais c'est le lieu choisi par les terroristes pour sévir, et c'est au moment où la région voit ses habitants revenir après un départ massif pour des contrées plus sereines dans les années 1990. Une bombe artisanale placée dans le cimetière à l'entrée du mausolée de Mohamed Cherif tuera sur place les sœurs Ghania, 20 ans, et Hassiba, 17 ans, ainsi que Mme Youcef Zohra, 55 ans. Cinq blessés seront comptabilisés dont une femme (28 ans), perdra un membre inférieur pendant qu'un enfant de 2 ans aura la vie sauve en ayant juste avant la déflagration quitté les bras de sa mère, Ghania, qui le tenait. Orphelin aujourd'hui, il est gardé au niveau du centre de santé d'El Affroun pour des blessures au visage provenant des éclats. Les tombes fraîchement fermées ont reçu les corps des trois femmes décédées au cimetière ; lendemain de l'Aïd fait de tristesse profonde et non de joie, dans un endroit entretenant toujours cette appréhension des grands espaces vides. Les membres de l'exécutif communal ainsi que les familles des victimes restent persuadés que l'œuvre des terroristes continue et la meilleure des preuves est l'acte sauvage perpétré également contre des brebis, des vaches, des veaux et des moutons tués à coups de pioche, laissés sur place comme preuve de la présence de ces hordes sanguinaires pour qui la mort d'enfants, de femmes et de personnes innocentes, sans défense, n'altère point leur soif. 50 bêtes tuées en deux endroits distincts : 22 pour Nadhor à 3 km à l'ouest de Aïn Romana et 27 du côté du Château à l'Est. Le repli des terroristes se fait justement à travers les centres de Rihane, Bordj Emir, Tamesguida. Ce groupe estimé à une quinzaine de personnes a sans doute besoin de plus d'aisance dans ses mouvements en obligeant les familles revenues à « redescendre ». 44 gardes communaux, des forces combinées de l'ANP, de la gendarmerie nationale et autres corps n'ont pas encore résolu cette infamie dans la région où une autre bombe a été désamorcée près des bêtes massacrées il y a une dizaine de jours. Que dire ou quoi imaginer si plus de monde était présent en ce vendredi à l'heure de la prière ? « 50% de la population de Mouzaïa viennent régulièrement rendre visite à leurs morts et le massacre aurait pu être plus grave encore », dira un vieux de la famille des deux femmes disparues, assis inconfortablement sur une chaise, lui, habitué à la natte et à la peau de mouton. Il contera des souvenirs en relation avec le pic de Tamesguida dont le sommet est enneigé et aura même l'air de regretter « les vendanges dans les champs de Jeannette à Mouzaïa où on allait à pied à travers les petits monts ». Peu de choses ont changé pour cette contrée depuis, puisque même le gaz de ville s'est arrêté à trois kilomètres plus bas, au niveau des semouleries, que deux collèges seulement existent pour toute la commune, que même le siège de l'apc a été bâti sur une terre privée.