Les Nations unies et l'Union africaine (UA) ont voulu, depuis des mois, faire réunir gouvernement et factions rebelles pour préparer la signature d'un pacte de paix durable et consensuel. Manière de faire oublier celui établi en 2006 à Abuja (Nigéria) entre le gouvernement de Khartoum et le Mouvement pour la justice et l'équité (JEM), dénoncé par les autres factions. Le JEM s'est scindé depuis : aile de Arko Menaoui, nommé conseiller du président Omar Al Bachir, et aile de Abdel Wahed Nour, établi en France. Il en est de même pour le Mouvement de libération du Soudan (SLM). Il existe actuellement une quinzaine de factions : tendance Abou Richa du JEM, groupe de Jar Al Nabi, Libre volonté de Abrrahmane Moussa… La difficulté de bâtir une véritable paix est expliquée par cet éparpillement de groupes et de factions. Djabril Brahim Mohamed, un des responsable du JEM, a estimé hier que son mouvement ne refuse pas la négociation mais n'accepte pas de discuter avec le gouvernement au milieu de factions peu représentatives. «On ne peut pas négocier au milieu d'un bazar. Le gouvernement ramène des groupes et les présente comme représentatifs du Darfour. C'est faux. Sur le terrain, il n'y a que le JEM et le SLM», a-t-il précisé hier à Al Jazeera pour expliquer l'absence de huit factions. Salim Ahmed Salim, envoyé spécial de l'Union africaine, a déployé de grands efforts pour obtenir un accord sur un document commun de revendications sur lesquelles les pourparlers auront lieu. Peine perdue. Profitant de la crise actuelle entre le gouvernement et le Mouvement populaire, guidé par Salva Kiir, dirigeant du Sud, des factions armées se sont réunies à Juba, capitale du Sud, pour annoncer leur absence à Syrte. Selon elles, le gouvernement n'a pas de légitimité pour négocier. Leur argument : la suspension de la participation des ministres du Sud au gouvernement depuis le 11 octobre 2007. Le Parti du congrès national (NCP au pouvoir) est accusé de bloquer l'application de l'accord de paix globale, qui a mis fin en 2005 à 22 ans de guerre civile du sud du pays. Le partage de la rente pétrolière et le retrait des troupes régulières du Sud sont à l'origine du désaccord. La rébellion du Darfour a bénéficié ces dernières années d'une aide en armement et en finance de l'armée du Sud-Soudan. Les factions absentes à Syrte se défendent de boycotter la réunion ? «On veut avoir du temps pour nous préparer à la négociation. On veut unifier nos rangs», a précisé Othmane Bachri, un dirigeant du SLM, interrogé par Al Jazeera. N'empêche, une aile du JEM, menée par Bahr Abou Qarda, le Mouvement de la réforme et du développement de Khalil Abdallah et le SLM, aile de Adam Bekhit, le Front de la force révolutionnaire unifiée de Ibrahim Zoubeidi sont, entre autres, présents à Syrte. Le gouvernement, qui a délégué Nafaâ Ali Nafaâ, numéro deux du NCP et proche conseiller de Omar Al Bachir à Syrte accompagné de chefs militaires, a annoncé un cessez-le-feu unilatéral. «L'absence de certaines factions ne signifie pas échec des négociations. C'est plutôt celui de ceux qui ne sont pas venus(…) Mais, nous allons poursuivre les négociation sur le plan tracé pour cela, et ce, en dépit des difficultés», a estimé Salim Ahmed Salim, cité par le quotidien soudanais Er-Ray Al Aaam. L'ONU, l'UA, les Etats-Unis et la France ont menacé de «sanctionner» les factions rebelles qui refusent l'offre de négociations, sans préciser la nature des sanctions. Paris a laissé entendre une volonté d'expulser Abdel Wahed Nour, lequel a mené une campagne pour tourner le dos aux pourparlers de Syrte. La Libye, qui abrite des factions rebelles et qui est soupçonnée par l'International Crisis Group (ICG), groupe de recherche basé à Bruxelles, d'armer et financer ces factions, est qualifié de «meilleur médiateur» par Khartoum. En fin de journée, Mouammar Kadhafi a reconnu, cité par les agences de presse, l'échec de la réunion de Syrte. En somme, retour à la case départ…