Le premier magistrat du pays osera-t-il dissoudre l'Assemblée populaire nationale ? Cette éventualité n'est pas à écarter si l'on en croit les dernières déclarations du ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni. « On peut recourir à la dissolution de l'Assemblée si cela y va de la paix et de la stabilité du pays », avait-il précisé. Mais l'Etat peut-il, en cette période de crise économique, se permettre une nouvelle élection législative ? Et puis, pour quelle raison faudrait-il dissoudre ? De l'avis de beaucoup d'observateurs, « la sixième législature est la plus mal élue depuis l'avènement du multipartisme ». Les formations politiques de différentes obédiences pensent qu' « une Chambre basse qui brille par sa stérilité et qui ne répond nullement aux attentes essentielles et pressantes de la société n'a pas lieu d'être ». LA DISSOLUTION DE L'APN DEPEND DE LA VOLONTE DU PRESIDENT D'ou certaines voix qui s'élèvent pour demander la dissolution. Que ce soit les partis de la majorité (Alliance présidentielle) ou ceux de l'opposition, ils estiment tous que « l'Assemblée actuelle mérite d'être reconfigurée ». Le Parti des travailleurs qui demande avec insistance des élections législatives anticipées, et donc la dissolution de l'APN, soutient que celle-ci constitue un danger pour le pays. Le MSP de son côté indique que la Chambre basse est, certes, arrivée à un stade d'immobilisme, mais la solution ne réside pas dans sa dissolution, elle est plutôt dans l'assainissement totale de la vie politique à tous les niveaux. Pour certains députés du RND, l'APN ne sert absolument à rien.L'autre parti qui plaide pour la dissolution est le Front national algérien (FNA) de Moussa Touati, qui est allé jusqu'à accuser l'institution législative « de servir des intérêts autres que ceux du peuple ». Cependant, pour bon nombre d'observateurs, la dissolution de l'APN dépend exclusivement de la volonté du chef de l'Etat et ne peut intervenir si la nature du système politique algérien n'est pas clairement définie. Le parti de Louiza Hanoune qui ne manque pas de reprocher aux députés leur manque de représentativité (Assemblée élue avec moins de 36% des voix exprimées et 65% d'abstention) évoque un aspect important du problème qui est le nomadisme politique. Plus de la moitié des députés du PT ont déserté les rangs du parti pour rejoindre d'autres formations. Chose qui n'a pas été du goût de sa secrétaire générale. Le PT prend très au sérieux les propos de Zerhouni en soutenant que l'APN est une source d'instabilité politique. « Lorsque les représentants de la population n'écoutent pas les cris de détresse de celle-ci a quoi peut-elle servir alors ? » Il y a une décomposition politique et un non-respect du mandat, les ministres en personne qualifient l'APN de moribonde. « C'est grave », a tonné Taâzibt avant d'ajouter que « si l'Etat veut la réhabilitation du politique et qu'il aspire à avoir une assemblée positive, il faut alors qu'il y ait des lois afin d'empêcher l'utilisation du mandat à des fins personnelles ». Notre interlocuteur exclut, toutefois, le risque d'une crise politique dans le cas d'une dissolution de l'Assemblée. « Au contraire, la décision d'aller vers de nouvelles élections législatives prouvera qu'il existe une volonté de donner de la légitimité aux institutions et cela va paraître comme une volonté de réhabiliter la politique. » De son côté, le député Abdarrezak Mokri du MSP craint que la dissolution de l'APN et l'organisation d'une autre élection législative engendre une nouvelle APN qui n'est autre que le sosie de celle qui a été dissoute. « S'il y a une dissolution il y aura inévitablement une élection et on risque d'avoir le même Parlement avec quelques retouches. La fraude en Algérie a pesé sur toute les élections », a-t-il indiqué en précisant que la dissolution de l'APN ne peut pas engendrer une crise politique. Selon lui, « la solution réside dans l'assainissement et l'ouverture totale du champ politique ainsi que dans la neutralité de l'administration qui ne doit plus s'immiscer dans les affaires de tout le monde ». Un député du RND souligne pour sa part que « l'urgence aujourd'hui est de revoir la Constitution. En Algérie nous ignorons si nous avons un régime présidentiel ou parlementaire ». « Il faut commencer par clarifier cette situation », dit-il, si l'on veut avoir une Assemblée qui prend en charge les problèmes des citoyens et non pas uniquement lever les mains et applaudir les projets élaborés par le gouvernement. »