Fin du marathon électoral en Inde, et avec le dernier tour organisé mercredi, donnant lieu à des résultats inattendus puisque tous les observateurs de la scène indienne tablaient sur une absence de majorité pour le vainqueur quel qu'il soit et n'excluaient par une nouvelle coalition avec tous les risques que cela comporte en termes d'engagements et de stabilité. Sauf que le bon sens obligeait pourtant à un gouvernement fort qui permette à l'Inde de résister à la crise économique mondiale, à l'instabilité en Asie du Sud et à régler nos relations avec le Pakistan, gelées depuis les attentats de Bombay en novembre 2008. C'est pourtant le choix annoncé, hier, des 700 millions d'électeurs indiens qui ont préféré la continuité et donné par conséquent un souffle nouveau au vieux Parti du Congrès dirigé par Sonia Gandhi. Et c'est tout naturellement que son éternel rival, le parti de la droite nationaliste hindoue, le BJP, a reconnu sa défaite. « Il est clair que l'alliance conduite par le Congrès représente le plus grand groupe au Parlement. Nous acceptons le verdict du peuple », a déclaré Arun Jaitley du Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP). « Quelque chose n'a certainement pas marché et quelque chose a certainement été favorable » au Parti du Congrès, a-t-il dit. Le Parti du Congrès au pouvoir du Premier ministre sortant Manmohan Singh et ses alliés ont remporté les élections législatives tenues entre le 16 avril et le 13 mai et vont former le prochain gouvernement, selon des résultats préliminaires publiés hier. Commentant elle aussi ces résultats, Mme Sonia Gandhi a jugé que le peuple indien avait fait « le bon choix ». Vanté comme le « plus grand exercice démocratique au monde », avec un corps électoral de 714 millions d'électeurs, le scrutin portait sur la désignation de 543 députés de l'Assemblée du peuple représentant 35 Etats et territoires de l'Union indienne. Ce qui a été fait en cinq étapes et sur une durée d'un mois une formule qui n'existe nulle part ailleurs à travers le monde. Ces résultats étaient attendus avec un certain intérêt par les partenaires de ce pays qui ne laisse plus indifférent. L'exercice est vraiment difficile. Comme ces élections législatives que le monde croit découvrir alors que ce pays est bien la plus grande démocratie au monde. Et puis l'Inde, qui n'est plus celle des années 1970 avec son côté exotique, fait partie de ce qu'on appelle les pays émergents en attendant de figurer dans le cercle restreint des pays développés. Depuis une vingtaine d'années, elle tente de rattraper son passé avec une croissance qui frôle les deux chiffres. Du moins avant la crise. Presque autant que le voisin chinois, mais en tout cas plus que de très nombreux pays. Encore que l'Inde manque de ressource, mais pas de disparités ou encore de problèmes entre les ethnies ou communautés. Mais elle essaye de régler bien des problèmes par le développement. Ce qui intègre nécessairement des facteurs comme l'éducation sur laquelle les autorités indiennes comptent justement pour combattre certaines tares comme la place de la femme ou les simples disparités entre communautés. C'est le nivellement par l'argent ou plus précisément par le statut social. En moins de vingt ans, l'Inde compte une classe moyenne forte de quelque 500 millions de personnes. De quoi peupler un continent. C'est cela l'Inde, sans rapport avec celle de 1990 alors en état de cessation de paiement et qui croyait profiter du fracas de la guerre du Golfe pour vendre son or. Une fuite, et l'opération a avorté. Un échec pour le ministre des Finances de l'époque Manmohan Singh, un personnage sorti de l'ombre pour conduire et ordonner la nouvelle politique de développement de son pays, avant de devenir son Premier ministre. Une réussite que personne ni aucune formation politique ne peut lui contester. C'est avec ce bilan qu'il est allé à la rencontre de l'électorat indien dans le cadre de la plus vaste opération au monde. Elle s'est déroulée sans incident majeur, et avec en toile de fond les nouveaux rapports de l'Inde désormais courtisée par les plus grands de ce monde, pas seulement pour ses capacités de paiement, puisque cette fois ce pays de 1,1 milliard d'habitants est frappé par la crise venue d'Occident et le terrorisme en Asie du Sud. La 10e économie mondiale est en plein ralentissement et le gouvernement a le sentiment que cette puissance atomique est « au milieu d'un anneau de feu », entre un Pakistan chaotique, un Sri Lanka en guerre et un Bangladesh instable. C'est ce qui explique par ailleurs comment l'Inde est devenue, en si peu de temps, un pôle d'intérêt préludant à de nouvelles alliances.