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Latifa Chakri, directrice générale de Business Intelligence Network et présidente de Alliance of Mediterranean Women Abroad "La politique ne doit pas être l'affaire d'une caste familiale ou ethnique"
Le pouvoir au Maroc veut accroître la représentativité des femmes en politique et impose que 12% des sièges à pourvoir lors des élections locales du 12 juin leur soient réservés. De nombreuses Marocaines en profitent pour se lancer en politique. El Watan Vendredi a contacté l'une d'entre elles. En juin prochain, élections communales au Maroc, la réforme électorale impose de laisser 12% des places aux femmes. Cette réforme était-elle nécessaire et que va-t-elle apporter à la société marocaine ? L'une des conditions de succès d'une démocratie locale participative est que toutes les composantes de la société soient mobilisées. Aussi bien les femmes que les jeunes générations. Cette disposition législative est un atout politique majeur qui va dynamiser la vie politique territoriale au Maroc, car les quotas ont fait leur preuve en Europe, notamment au niveau des municipales en France. Cette nouvelle approche est d'autant plus nécessaire qu'elle va rééquilibrer la donne politique. Les élections municipales de 2002 n'avaient vu émerger que 0,56 % de femmes aux conseils municipaux. L'objectif étant qu'à long terme le Maroc renforce la confiance des électeurs envers les institutions territoriales et nationales, grâce à la représentativité des femmes. A moyen terme, cette disposition va ouvrir la porte aux candidatures des femmes pour les législatives de 2012. Le roi Mohammed VI est connu pour sa politique progressiste à l'égard des femmes. En quoi le Maroc a changé vis-à-vis des femmes en politique ? Les premières nominations de femmes à des postes politiques d'importance ont été faites sous le règne du roi Hassan II, mais Mohammed VI est à l'origine d'un certain nombre d'actions positives à l'égard des femmes. Certaines ont été nommées au poste d'ambassadeur du Maroc à l'étranger. Dans la société civile aussi plusieurs rencontres et débats d'envergure internationale sont organisées comme la rencontre internationale « Marocaines d'ici et d'ailleurs », à Marrakech en décembre 2008, l'International Women's Forum de Tanger de mars 2009, ou la rencontre initiée par Asma Chaabi, première femme élue en 2002 à la tête d'un conseil municipal de la ville d'Essaouira. Le roi Mohammed VI s'inscrit aujourd'hui dans une dynamique de continuité progressiste, avec le parachèvement au début de son règne de la grande reforme de la Moudawana, le code de la famille, qui marque une avancée majeure au niveau du droit des femmes marocaines, qu'elles soient au Maroc ou à l'étranger. Pourtant, la société marocaine, notamment dans les régions intérieures du pays, reste conservatrice. Y a-t-il des freins à la libération de la femme au Maroc ? A mon sens, le conservatisme est partie intégrante de la culture arabo-musulmane. C'est sa traduction au niveau politique qui pose problème, notamment par les résistances qui s'opèrent vis-a-vis des femmes et des jeunes générations. Ce conservatisme freine le renouvellement des élites et ne laisse pas suffisamment de place aux jeunes générations, aux femmes et aux nouvelles élites. L'ouverture vers de nouveaux profils politiques est nécessaire pour garantir un équilibre sociétal et donner la dynamique nécessaire à l'évolution de la société, pour affronter les grands défis actuels. La politique au sens de la gestion de la cité ne doit pas non plus être l'affaire d'une caste familiale ou ethnique. La force d'une société réside dans sa capacité à renouveler ses élites et capitaliser toutes ses potentialités. Le Maroc dans sa diversité et dans la multitude de ses élites gagnera davantage à favoriser l'émergence de « leaders » issus de différentes couches sociales. Les pays du Maghreb doivent s'engager à mettre en place des dispositions facilitatrices pour les jeunes Maghrébins de l'étranger qui souhaitent investir dans le pays d'origine ou tout simplement mettre à profit une expertise donnée. Le Maroc a une bonne longueur d'avance au niveau de sa politique vis-à-vis de sa diaspora à l'étranger, en effet, il existe au Maroc quatre institutions en charge d'accompagner chacune à son niveau l'évolution de cette population. A mon modeste niveau, j'aimerai rappeler que ce conservatisme peut avoir des manifestations anachroniques dans le sens où il résiste à tous les changements surtout quand ces changements sont portés par des jeunes et par des femmes. L'entreprise Business Intelligence Network que j'ai créée se base sur un modèle innovant de gestion de l'information au profit des investisseurs, surtout pour la promotion de la coopération sud/sud, modèle basé sur des méthodes de « sourcing » d'experts originaires de ces régions. Nous vivons actuellement une crise économique sans précédent, nos pays ne sollicitent pas suffisamment cette expertise de nos régions pour faire de réelles prévisions de risque économique. Notre expertise est davantage sollicitée par des pays autres que le pays d'origine, est-ce une nouvelle forme de conservatisme ?