Hurlements, fumigènes, klaxons. Une seconde à peine après la victoire du CRB, Belouizdad a basculé dans la fête en rouge et blanc. Sami, 21 ans, a préféré laisser sa voiture à la maison. Pour autant, il va défiler avec ses copains. « On cherche un taxi clandestin qu'on paie chacun 200 DA et il nous fait circuler toute la soirée, chansons à fond, feux de détresse et klaxons ! ». Quelques heures auparavant, en ce jeudi de finale de coupe d'Algérie, Belouizdad était plongé dans un calme impressionnant. A voir ces bandeaux rouge et blanc partout, utilisés généralement dans les chantiers, on se croirait dans une « zone assiégée ». De larges banderoles aux couleurs du club local ornent les rues et les façades des immeubles. On pouvait lire en espagnol « Te quiero mucho CRB (on t'aime CRB) » ou en anglais « You will never walk alone (vous ne marcherez jamais seuls) » en guise d'encouragement aux joueurs du club. Le Chabab de Belouizdad affronte dans quelques minutes le CABBA de Bordj. Un match historique pour le CRB « qui n'a pas remporté un titre depuis plus de dix ans », nous dit Karim, un supporter du club, vendeur à la sauvette à la rue Belcourt. Karim s'apprête à emballer sa marchandise pour aller voir le match chez lui. D'autres jeunes préfèrent rester devant leurs étals où ils ont installé une télé en plein air sur un cageot. Ils sont restés dans leur quartier par une chaleur caniculaire de 35°C à l'ombre et un soleil de plomb. En revanche, les femmes sont nombreuses à se balader, glaces à la main, voile rouge pour d'autres. Une passante s'insurge : « J'ai laissé mon mari à la maison avec son foot, il est insupportable en ce moment ! » En plein quartier de Belcourt, se trouve le cercle du club. Avec une affiche en hommage à Walid, un supporter du club, décédé cette semaine à 18 ans, suite à une chute d'une voiture, sorti défiler pour son club. Nous pénétrons par la porte à rideau baissé. A l'intérieur où un grand téléviseur est installé, pas grand monde. « Ils sont tous partis au stade », nous explique le patron des lieux, Djamel Aït Grine, le frère de l'ancien président du CRB. Le match commence, avec lui, le suspense, les commentaires et les sueurs, les applaudissements aussi. Même le président Bouteflika a eu droit à un petit commentaire lorsqu'on le voit à la télévision baisser la tête à cause de la chaleur « Awah houwa aandou tawil ! » (il est bien équipé), ironise un jeune supporter. Les adversaires sont aussi tolérés dans le lieu, comme ce supporter du CABBA, pâtissier de Bordj Bou Arréridj. « Nous sommes des sportifs, les supporters de notre club sont connus pour leur éducation », nous lance Nourredine Bennaceur, ancien dirigeant du CRB. Interrogés sur le risque de débordements après le match, Djamel et Nourridine sont catégoriques : « Il n'y aura aucun incident, nous avons bien coaché nos supporters… »