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« Depuis décembre 2007, l'espèce de ligne infranchissable a été franchie »
Marcel Jurien de La Gravière. Délégué français à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense
Publié dans El Watan le 23 - 05 - 2009

Dans cet entretien exclusif accordé à El Watan, le délégué français à la Sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense est formel : les essais nucléaires français au Sahara ont été entourés de toutes les mesures et précautions requises. Quant à la loi française d'indemnisation des personnes concernées, elle se traduira par un accord bilatéral franco-algérien.
Le ministre de la Défense, Hervé Morin, a proposé en novembre 2008, puis en février dernier, un projet de loi relatif aux conséquences sanitaires des essais nucléaires français en Polynésie et au Sahara. Comment cette future loi va-t-elle s'appliquer aux personnels civils et aux populations algériennes ?
Le projet de loi prévoit clairement de traiter de la même manière les travailleurs civils ou militaires, qu'ils soient spécifiquement Français de l'Hexagone, Français de Polynésie française et anciens travailleurs aujourd'hui de nationalité algérienne. Ces derniers peuvent être concernés si, à la date des premiers essais au Sahara jusqu'à la période du démantèlement des sites, fin 1967, ils ont été exposés et s'ils développent une maladie correspondant à des maladies radio-induites. Ce sont des critères qui sont valables pour tout le monde. La loi, avec son décret d'application, relève de la législation française, l'Algérie étant un Etat souverain, il faudra nécessairement qu'il y ait un accord bilatéral franco-algérien qui en traduise le contenu pour qu'il soit appliqué en Algérie.
Dès à présent, il est acquis qu'il faudra que, via les chancelleries ou les ambassades, il y ait une négociation bilatérale sur ce sujet spécifique et il faudra prendre en considération les critères de la loi française, les sites géographiques tels qu'ils sont définis dans la loi française. Dans la future loi française, on précise bien qu'il s'agit du Centre saharien d'expérimentations militaires (CSEM), c'est essentiellement la région de Reggane, et du Centre d'expérimentations militaires des oasis (CEO), c'est la région d'In Ekker.
Est-ce que les personnes concernées sont identifiées ? Connaît-on leur nombre précis ? Y a-t-il des listes ?
Ce n'est pas aussi précis que cela, mais nous avons une quantification des personnes, par exemple on sait que le personnel qui a travaillé pour les essais nucléaires français en Algérie, soit au Centre saharien d'expérimentations militaires, soit au CEO, est à peu près au nombre de 27 000 dont environ 3000 travailleurs algériens employés localement à Reggane ou à In Ekker.
Plus précisément, sur ces personnels, combien de personnes pourront bénéficier d'indemnisations ?
Il est très difficile d'en préjuger. La loi prévoit la mise en place d'un comité d'indemnisation qui examinera chaque dossier déposé et donnera un avis au ministre qui notifiera la décision.
Qu'en est-il des populations du Sahara ?
Il y avait à peu près 50 000 personnes en 1957 dans la zone de Reggane. Dans la zone des oasis, c'est Tamanrasset qui est beaucoup plus loin au sud d'In Nekker. Sachant que la spécificité de ces populations est le nomadisme. Une surveillance très précise était réalisée par des hélicoptères qui nous permettait de nous assurer qu'il n'y avait pas de populations alentour. Contrairement à certains plaidoyers que j'entends, il y a eu des mesures d'anticipation et de précaution prises pour assurer la sécurité des populations et faire en sorte que les tirs atmosphériques, en particulier, n'aient pas de conséquences sur les populations et le choix du champ de tir n'était pas dans la zone de population. Avant le premier essai Gerboise bleue, il y a eu des études sur ce qu'il y avait comme population dans l'environnement de Reggane et d'In Ekker et nous avons des documents qui montrent que tous les secteurs habités étaient au nord de Reggane, alors que le champ de tir était au sud de Reggane. J'ai découvert ces documents qui datent de 1958-1959. A chaque essai, il y avait un survol sur une zone d'environ 300 km par des hélicoptères, puisqu'on ne faisait les essais atmosphériques que lorsque le vent n'allait pas vers les zones habitées. Il y avait également des interdictions avec des points de contrôle pour que les gens n'entrent pas dans cette zone de tir.
Et pourtant, selon l'Observatoire des armements/Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits (CDRPC), le tir de Gerboise verte d'avril 1961 a été effectué sans qu'il ait été tenu compte de la météo...
Il y a un seul tir qui sort du champ de tir, c'est le premier tir, Gerboise bleue de février 1960, qui a été le plus puissant de tous et qui a eu un impact sur l'environnement. Il est clair que le tir Gerboise bleue s'est orienté nettement vers l'Est, dans une direction prédéterminée comme autorisée et donc sous contrôle mais qui sortait du périmètre interdit de la zone du centre d'expérimentations. Il y a eu d'ailleurs, à l'époque, des mesures environnementales. Les autres tirs ont été de très faible puissance et tout le panache est resté dans la zone interdite. Il n'y a que Gerboise bleue qui pose un problème sur l'environnement du fait qu'il sort de la zone limitée, dite du champ de tir. La route qui descend vers le Sud a été interdite plusieurs jours après le tir et n'a été rouverte que lorsque les mesures de rayonnement ionisant ont montré qu'on était revenu à un seuil qui permettait de rouvrir la circulation.
Le ministre Hervé Morin a reconnu, récemment, qu'il y a eu plusieurs « incidents », il en a cité plus précisément quatre dans des galeries et qui n'ont pas été confinés en profondeur, en particulier le 1er mai 1962...
Absolument.
Quel en a été l'impact ?
C'est le plus gros impact des essais au Sahara. Lors du tir Berryl, c'est son nom, le bouchon de la galerie n'a pas résisté, il y a eu une coulée de lave et un nuage radioactif important. Une grosse centaine de personnes a pris des doses plus importantes que ce qui était considéré comme niveau d'acceptabilité et ces personnes sont connues, on en a une liste, elles ont été suivies.
Le projet de loi ne fait pas référence aux conséquences sur l'environnement...
Le projet de loi s'appelle « projet de loi relatif aux conséquences sanitaires des essais nucléaires français ». Deux rapports scientifiques ont été établis par l'Agence internationale de l'énergie atomique de Vienne, un sur la Polynésie, un sur le Sahara et le rapport de l'AIEA sur le Sahara fait quelques recommandations ponctuelles. Dans le site d'In Ekker, dans le massif du Tan Afella, où ont été réalisés les 13 essais en galeries, il recommande de ne pas laisser le libre accès au Tan Afella et que le site soit clôturé. Celui-ci l'était d'ailleurs. Il y a eu, en 1967, un transfert de responsabilité vers l'Algérie clairement exprimé sur le risque lié à des séjours sur le Tan Afella. Ce n'est pas un site ouvert. Sur les autres sites, le rapport de l'AIEA recommande de faire des mesures complémentaires au point zéro des quatre essais atmosphériques.
Il semble aussi, selon l'Observatoire des armements/CDRPC, que le rapport de l'AIEA n'a pas fait mention de matériels contaminés enterrés sur ou à proximité des sites d'essais. Des témoignages affirment qu'une partie de ces matériels aurait été récupérée par des personnes ignorantes du danger...
Selon les éléments que j'ai sur cette affaire, il y a eu probablement des enfouissements de matériels et en particulier d'éléments métalliques, je n'en ai pas tout l'historique, j'ai entendu ces mêmes témoignages et j'en ai entendu d'autres qui disent que c'était très faiblement contaminé et cela ne peut pas avoir de conséquences sur la santé. Je crois que le seul site où il peut y avoir des risques, c'est sur le carreau Berryl qui présente une activité radiologique forte, même encore aujourd'hui. Le président Sarkozy, dans sa visite du mois de décembre 2007 en Algérie, s'est engagé à donner au président Bouteflika un certain nombre d'informations. Il est demandé par l'Algérie que ces échanges soient couverts par la confidentialité. Donc, je ne peux pas vous répondre aussi clairement et en toute transparence. Je vous dirais simplement que ceci est en cours et je pense que dans les semaines ou quelques mois qui viennent ce sujet sera beaucoup plus ouvert.
Les autorités françaises seraient-elles disposées à coopérer avec l'Algérie pour décontaminer les sites ?
Il ne faut pas aller trop vite, la décontamination de ce qui est nucléairement contaminé, autant c'est facile sur une pièce rigide, autant décontaminer des hectares de sable et autres, techniquement parlant je n'en vois pas la faisabilité. Dans ce qui pourrait arriver, mais là encore, je souhaiterai ne pas aller plus loin dans ma réponse en attendant que le groupe franco-algérien avance dans ses échanges et puisse aller vers plus de transparence et d'explication, il faudra faire d'abord ce que recommande l'AIEA, c'est-à-dire un complément de contrôle pour déterminer quel est le niveau réel de radioactivité aujourd'hui des différentes zones concernées et, en fonction du résultat et de la nature des terrains, des objets…, déterminer avec les correspondants algériens ce qu'il convient de faire. Il me semble que depuis décembre 2007, l'espèce de ligne infranchissable a été franchie, un groupe travaille sous confidentialité, il va certainement se réunir à nouveau. Du point de vue français aujourd'hui, il n'y a pas matière à confidentialité, en particulier vis-à-vis des médias qui posent des questions tout à fait fondées.
N'y aurait-il pas de conséquences de type génétique qui se transmettraient sur plusieurs générations ?
Je ne suis pas médecin, mais je suis chargé d'instruire les faits et de regarder les conséquences des rayonnements ionisants et tous les experts médecins qui ont été consultés en France et en cohérence avec l'Agence des Nations unies qui traite de ces problèmes, l'Unscear, sont formels en disant qu'il n'y a pas d'effets héréditaires des rayonnements ionisants tels qu'ils sont dans les essais nucléaires. Et ceci est même vérifié à Hiroshima et à Nagasaki. Par contre, si au moment des expérimentations une femme était enceinte, là il peut y avoir un risque sur l'embryon.
Quel est le nombre de pathologies retenues par le projet de loi ?
En France, les maladies professionnelles radio-induites sont au nombre de 9. C'est le célèbre tableau 6 de la sécurité sociale. L'Unscear, comme il le fait régulièrement tous les trois ou cinq ans, a réactualisé ses données fin 2007 avec des documents qui sont sortis en 2008 et il relève 18 maladies qui pourraient avoir une probabilité non nulle d'être liées à des faibles doses. Pour d'autres maladies, il faut être dans un cas de figure d'exposition à des doses extrêmement élevées. On n'est pas du tout dans cette gamme-là pour les essais nucléaires français, c'est pourquoi, dans le projet de loi et particulièrement dans le décret d'application, nous avons retenu les 18 maladies précisées par l'Unscear.
Les Américains en retiennent une trentaine...
Nous ne voyons pas d'où sortent ces 30 maladies. Nous nous sommes basés sur les publications récentes. C'est une importante évolution par rapport au tableau 6 de la sécurité sociale, ce qui représente un spectre très large qui correspond au souhait de M. Morin, qui a dit qu'il voulait une loi rigoureuse, juste et généreuse.
Pourquoi avoir attendu autant d'années pour arriver à un projet de loi, non pas qu'il n'y ont pas eu de propositions de loi de la part de députés ?
Cela ne veut pas dire que pendant tout ce temps il ne s'est rien fait. Il y avait pour les travailleurs civils le recours au code de la sécurité sociale et des maladies professionnelles, pour les militaires le code des pensions militaires et le recours aux tribunaux de pensions, et ce qui est apparu depuis 2006-2007, c'est la multiplication des recours, les instances étant très compliquées, totalement hétérogènes. Donc le ministre de la Défense s'est intéressé au dossier, en tant que parlementaire il avait déjà rencontré des associations. D'où sa décision de passer par le législatif pour traiter toutes les personnes concernées de façon plus égalitaire. Il a engagé ce processus au printemps 2008 et cela s'est télescopé avec la proposition de loi de Mme Taubira au mois de novembre. A ce moment-là, le ministre annonçait qu'il travaillait sur un projet de loi, mais il était suffisamment avancé pour dire qu'il le proposerait avant l'été au Conseil des ministres.


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