Le blanchiment prend depuis des chemins divers pour financer une économie parallèle, des filières de crimes organisés ou des réseaux terroristes. Ces derniers, selon Bouanane Medjber, directeur de la lutte contre la fraude douanière à la direction générale des Douanes, activent sous couvert d'opérations d'import-export, en recourant à des « prête-noms » qui ignorent souvent la nature des opérations qui sont réalisées en leur nom et sous couvert de leur registre du commerce. Les vrais propriétaires, qu'ils soient liés à des réseaux criminels, terroristes ou de simples trafiquants visant à échapper à tout contrôle, restent souvent invisibles et en cas de contrôle ne réclament pas leurs marchandises. « Actuellement, quelque 400 conteneurs sont bloqués au port, sans que personne ne vienne les réclamer », note en guise d'exemple le directeur de la lutte contre la fraude douanière à la direction des Douanes. Ce dernier relate le cas d'une personne interpellée dont le registre du commerce a été utilisé pour 540 opérations d'importation en une année, équivalent à plusieurs milliards de dinars alors qu'elle habitait dans un 20 m2 dans la wilaya de Boumerdès ! Une anecdote qui en dit long sur les fraudes commises et les subterfuges utilisés. Dans ces cas, les services des douanes constatent en premier lieu les infractions commises, telles que les fausses déclarations, les faux et usages de faux documents... avant d'examiner les infractions sous l'angle du crime de blanchiment d'argent. Et dans ce domaine, la tâche n'est pas facile pour les services des douanes étant donné le manque d'outils juridiques et d'investigation, d'où l'interconnexion qu'établissent le plus souvent les Douanes avec les services de police et de la Banque d'Algérie pour mettre un terme aux infractions constatées. En plus de l'import-export, les filières de blanchiment ont recours à la contrebande, au trafic de stupéfiants, elles infiltrent aussi les réseaux de la contrefaçon à travers lesquels l'argent est recyclé et remis en circulation en Algérie pour alimenter les différents trafics, le marché informel ou pour être utilisé à des fins criminelles ou terroristes. La tâche des différents services, note cependant M. Bouanane, n'est pas facile étant donné que les opérations d'importations par exemple sont le plus souvent financées en partie par le biais des opérations bancaires, mais aussi par « valises », soit en argent liquide dont la provenance et l'origine sont souvent difficiles à déterminer. Certains voyageurs sont aussi impliqués dans ce trafic, les services des douanes ayant saisi en 2008 l'équivalent de 10 millions de dollars sur des passagers. La corruption de certains agents des douanes est également à mettre à l'index, selon M. Bouanane qui cite le cas de 900 agents douaniers arrêtés, entre 2006 et 2009, pour complicité dans des opérations de trafic douanier. Il reste que la lutte contre le blanchiment d'argent, selon Abdelmadjid Amghar, président de la cellule de traitement du renseignement financier au ministère des Finances « est un concept nouveau pour l'Algérie et que tout reste à faire dans ce domaine ». Pour cet expert, il faut renforcer la culture du contrôle, « spécialement dans le secteur financier » afin qu'il puisse disposer « de systèmes d'information et d'outils de détection et de surveillance efficaces ».