Le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan a estimé hier que les élections en Irak pourraient être reportées en raison de la persistance des violences depuis la mise en place d'une nouvelle équipe dirigeante irakienne ou ce que certains considèrent comme un transfert de souveraineté aux Irakiens. De tels propos traduisent plus qu'une simple inquiétude, du reste tout à fait normale pour un tel niveau de responsabilité. Il s'agit d'un constat sans la moindre complaisance, mais aussi d'un avertissement lancé aux nouvelles autorités irakiennes qui croient pouvoir mener à son terme un processus électoral formalisé au seul plan théorique. Tout reste à faire dans ce pays comme l'a si bien relevé Lakhdar Brahimi alors en charge du dossier irakien. Plus que cela, l'ancien chef de la diplomatie algérienne avait relevé à quel point il était difficile d'organiser des élections prévues au départ au mois de juin dernier. Il se peut aussi que la tenue d'élections n'intéresse pas grand monde, surtout ceux qui savent que leur carrière s'arrêtera au soir de la moindre consultation électorale. Ceux-là pourraient être tentés d'en faire le moins. Personne jusque-là ne se hasarde à formuler une telle accusation. Mais le problème de la sécurité se pose très sérieusement. Selon son porte-parole, « M. Annan a dit que l'Irak ne pourrait pas connaître un retour prochain à la normale en raison du problème de la sécurité intérieure et a dit que cela pourrait affecter ou reporter les élections » prévues avant le 31 janvier 2005. Le Premier ministre irakien par intérim Iyad Allaoui a déclaré le mois dernier que les élections seraient organisées avant la fin janvier en dépit des violences. Selon la même source, « le secrétaire général a dit que les problèmes en Irak étaient compliqués ». Toutefois, M. Annan s'est gardé d'aller au fond de ces problèmes. Le secrétaire général de l'ONU a par ailleurs désigné comme envoyé spécial en Irak l'actuel ambassadeur du Pakistan aux Etats-Unis pour succéder au Brésilien Sergio Vieira de Mello, tué dans l'attentat perpétré contre le siège de l'ONU à Baghdad en août 2003. Les autorités irakiennes ont annoncé lundi d'importantes saisies d'armes à Baghdad et se sont engagées à lutter sans merci contre les « terroristes », notamment par un « plan de défense » de la capitale mis en place le 1er juillet, alors que Lakhdar Brahimi a demandé aux voisins de l'Irak d'« aider » ce pays à rétablir la sécurité. Le président irakien Ghazi Al Yaouar a lancé une sévère mise en garde aux auteurs d'actes de résistance qualifiés de terroristes et aux preneurs d'otages qui ne se repentiraient pas, en évoquant un projet d'amnistie qui pourrait concerner les Irakiens impliqués dans ces violences. Selon le quotidien Financial Times de lundi, M. Al Yaouar a indiqué qu'une amnistie allait être annoncée « dans les deux jours » pour les Irakiens rendant les armes. Un tel appel ne semble pas avoir reçu l'écho escompté. Y aller veut dire que la guerre est terminée pour tous ceux qui avaient décidé de combattre l'occupation de l'Irak et par extension pour tous ceux qui acceptent de travailler avec la coalition militaire étrangère. Les cibles sont devenues nombreuses, mais les pertes civiles, tout aussi il est vrai, traduisent le caractère parfois aveugle de certaines opérations notamment les voitures piégées placées dans des endroits très fréquentés. Mais l'insécurité est totale et la nouvelle police irakienne non seulement n'arrive pas à y faire face, mais aussi à garder ses effectifs.