La wilaya compte plus de 15 000 chalets répartis à travers les différentes communes. Dans les 100 sites aménagés sur une surface de 300 ha à travers toute la wilaya de Boumerdès, l'Etat a réalisé 90 km de routes, 88 km de conduites de réseau d'assainissement, 351 km de canalisations de distribution d'eau potable et 194 km de lignes électriques. Tout cela «représente l'équivalent de la viabilisation d'une ville de 100 000 habitants», selon la wilaya de Boumerdès. Mais le temps joue un mauvais tour à ces habitations dont la durée de vie maximale est estimée à 10 ans. L'Etat algérien, qui les attribue aux cas sociaux en quête de logement après leur libération par les sinistrés relogés, a-t-il pensé à reloger tous leurs occupants d'ici la fin de ces 10 ans ? Peu probable. Mais Ahmed Ouyahia, lors de la campagne électorale d'avril dernier dans la wilaya, a promis que «tous les occupants des chalets seront relogés prochainement». Les chalets sont actuellement gérés par l'OPGI, suite à une convention signée avec la direction des Domaines le 21 avril 2007. Et «72% de leurs occupants ont un statut social, et ne payent pas le loyer, ce qui a rendu difficile l'entretien des chalets», nous dit-on. Le prix fixé par l'OPGI est de 900 DA par mois. Les autorités de la wilaya s'occupent encore des chalets. Ces habitations se dégradent de plus en plus. En sus des problèmes liés à leur gestion celles-ci ont compromis de manière indirecte le développement local. En effet, d'énormes projets d'investissement sont en instance à cause de l'indisponibilité d'assiettes foncières. Tout le monde l'aura remarqué, les chalets occupent de vastes surfaces. Des terres fertiles et hautement productives ont accueilli ces habitations. Dans la commune de Zemmouri, des centaines de chalets sont même implantés sur des terrains destinés initialement à l'implantation de projets touristiques tels que le projet de la ZET de Zemmouri et celui du village touristique prévu à Sghirate, à quelques kilomètres seulement du chef-lieu de wilaya. La même situation prévaut dans d'autres communes à l'instar de Naciria, Bordj Menaïel, les Issers, Si Mustapha, Khemis El Khechna et Boudouaou où des centaines de chalets occupent des assiettes de terrain et des sites stratégiques devant être exploités par des agriculteurs ou des industriels. Partout où l'on s'est déplacé, les préoccupations des habitants des chalets, sinistrés ou autres (cas sociaux), sont toujours les mêmes : quitter le chalet, avoir un logement décent et vivre mieux. Récemment, le wali de Boumerdès a déclaré qu'il a décidé de mettre fin à l'attribution des chalets afin d'aller vers leur démantèlement. Mais le gouvernement ne semble pas prêt à régler définitivement ce problème. «Les moyens colossaux qui ont été mobilisés par les autorités n'ont pas eu l'effet escompté», clame Ahmed un habitant du site des Issers. «Nous vivons dans une situation misérable depuis six ans, les conditions nécessaires pour vivre bien font cruellement défaut», ajoute-t-il. Le site de cette commune contient plus de 400 chalets. Aujourd'hui, il tend à devenir inhabitable. En effet, la dégradation tous azimuts que connaissent les chalets dans toute la wilaya pénalise leurs occupants. «Au début on nous a dit que ce n'est que provisoire, mais maintenant nous sommes oubliés», nous dira un sinistré miraculé, qui dit avoir été retiré sous les décombres. A Sghirat, à Zemmouri, à Chaabet El Ameur, ou à Bordj Menaïel, la situation se dégrade. Routes délabrées, eaux usées à ciel ouvert, insalubrité et absence d'espace de loisirs telle est l'image décevante de ces sites qui devraient être démantelés une fois les sinistrés relogés. Yacine, un habitant du site de Sghirat, qui abrite à 833 chalets, nous dit que malgré que le site est proche de la mer, cela ne suffit pas, car pour lui, les infrastructures de base ont beaucoup plus d'effet sur la vie des citoyens. Ce jeune homme, fraîchement diplômé de l'université, espère voir «la fin du calvaire et habiter un jour un logement qui répond aux normes». Il y a l'insécurité et la propagation de fléaux sociaux dans certains sites. D'ailleurs, il y a quelques mois, un chalet a pris feu à Boudouaou, suite à un court-circuit. Fort heureusement, il n'y a pas eu de pertes humaines. A Sghirat, un autre chalet a pris feu en raison des fortes pluies qui ont provoqué un accident électrique. Aux Issers encore, deux autres chalets ont pris feu pour les mêmes raisons. A Thénia, une commune rasée par le séisme de 2003, plusieurs familles sinistrées, habitant encore les chalets, attendent avec impatience leur relogement, pourtant le projet de 250 Logements construits par les Chinois est fin prêt. A Bordj Menaïel, la situation est catastrophique, selon les habitants des chalets. Les trois sites habités par des cas sociaux sont dépourvus de moyens et d'infrastructures de base. «Notre temps est meublé par l'angoisse et la léthargie», tonne Amar, la trentaine passée. «Je ne sais pas ce que font nos responsables, ils nous attribuent des chalets au lieu de logements». «Ils ont construit des logements depuis des années pour les laisser à l'abandon», nous dira un citoyen habitant un chalet à la commune de Si Mustapha où 100 logements réceptionnés attendent d'être attribués. Intervenant dans ce sens, un quinquagénaire de Souk El Had lance : «Nous avons 50 logements que nous attendons impatiemment depuis 2007.» Dans ce cadre, il est utile de souligner que plus de 400 logements réalisés dans le cadre du social ne sont pas encore livrés. Un grand lot a été pourtant achevé depuis plus de 2 ans. Ces unités sont réparties comme suit : Bordj Menaïel (180), cap Djinet (12), Naciria (20) et Souk El Had (50). A Ouled Moussa, quelque 400 logements sont encore inoccupés, tandis que partout dans la wilaya des assiettes foncières pouvant accueillir des projets importants sont occupés par ces chalets. A Hamadi, un nombre important de chalets ont été laissés à l'abandon et se sont totalement dégradés, tandis que dans d'autres communes, il est enregistré une demande pressante sur ces habitations. Ce qui fait dire à un habitant : «C'est du gaspillage caractérisé. Si à Hamadi on n'en a pas besoin, pourquoi ne les a-t-on pas emmenés ailleurs ?» D'autres citoyens relèvent certains cas de responsables qui se les ont appropriés après le séisme et les gardent actuellement sans les occuper. La wilaya a plusieurs fois annoncé la constitution d'une commission d'enquête sans jamais communiquer les résultats de son action, car il y a de nombreux cas où les attributaires de ces chalets ne sont pas dans le besoin. En tout cas, les habitants se constituent déjà en associations pour «défendre leurs droits et arracher un relogement dans les plus brefs délais». Dernièrement, le président de l'Association des habitants des chalets de Boumerdès a annoncé qu'il a eu la promesse des autorités de procéder au relogement de quelques familles dans les mois à venir.