Le MSP s'engage dans le débat sur l'économie algérienne. Pour ce faire, il crée une instance spécialisée : le conseil économique et social. Celui-ci aura pour mission capitale de susciter un large débat et d'engager des réflexions sur les réformes engagées par l'Etat. L'accent est particulièrement mis sur la privatisation. Bouguerra Soltani, président de cette formation, a affiché dans son intervention à la conférence nationale économique, organisée jeudi dernier à Alger, des réticences par rapport à la démarche entreprise par l'Exécutif qui souffre, selon lui, d'une « certaine opacité ». Pour étayer ses propos, M. Soltani cite, à titre illustratif, la liste des entreprises stratégiques à ne pas privatiser qui n'a pas été rendue publique, ainsi que les conditions dans lesquelles d'autres sont devenues propriété privée. Il ne doute pas ainsi que pour garantir un Smig de réussite à ce processus, il faudra suivre « quatre étapes ». D'abord réussir toutes les conditions nécessaires à « la transparence de l'opération de privatisation ». Ensuite, assurer un climat d'« égalité des chances », et ce, en uniformisant « les critères de la privatisation ». Enfin, il faudra publier « la liste des entreprises stratégiques non privatisables qui doivent demeurer sous le contrôle de l'Etat ». Le MSP conditionne son adhésion au processus de privatisation par l'assurance que celle-ci « apportera une amélioration conformément à un programme judicieux ». Il trouve ainsi difficile de croire à la réussite de la privatisation en l'absence d'une politique économique générale qui prendra en compte les exigences du front social. Politique sans laquelle le pays risquerait de tomber sous le monopole et l'hégémonie étrangers. M. Soltani évoquera dans la foulée les 853 entreprises ayant été cédées au profit de leurs salariés, sans que cette opération « ait des répercussions positives sur le marché du travail et encore moins sur la croissance économique, notamment la résorption du chômage ». Discipline et encouragement Docteur Ahmed Benbitour, ancien chef de gouvernement et actuellement consultant auprès de la Banque mondiale, n'en doute pas : « La restructuration du secteur des entreprises a peu de chances de réussir si elle n'est pas faite simultanément avec celle du secteur financier. » Cette restructuration devra, selon lui, « ériger chacune des cinq banques publiques en holding qui détiendrait le capital de quatre filiales : une banque commerciale assainie, une société de gestion d'actifs non performants et de réhabilitation, une société financière de gestion des participations et une société de gestion du patrimoine immobilier et logistique ». Autrement dit, créer à partir des cinq banques vingt-cinq entités financières spécialisées. Dans son intervention, aux côtés des docteurs Abdelhamid El Ghazali, expert et chercheur en économie, et Bachir Mestafi, chercheur en économie, donnée à la conférence du MSP, docteur Benbitour explique que la privatisation se justifie par la nécessité d'améliorer le niveau de la production nationale en réhabilitant le secteur public productif. On privatise, ajoute-t-il encore, pour à la fois alléger la pression sur le budget de l'Etat et générer des ressources financières par la vente des entreprises ainsi que pour attirer les investissements directs étrangers (IDE). Cela permettra « l'activation des marchés de capitaux », indiquera-t-il. L'ancien chef de gouvernement trouve que « les clés du succès de la réhabilitation du secteur productif résident dans l'unité de commandement au niveau de l'action gouvernementale ainsi qu'une hiérarchie de prise de décision clairement établie ». Pour mener à bien ce processus, docteur Benbitour note la nécessité de deux choses : la discipline et l'encouragement. La discipline signifie, explique-t-il, notamment l'élimination des soutiens directs ou indirects qui s'appuyaient sur la défiscalisation ainsi que l'octroi de facilités financières et de crédit. L'encouragement consiste en l'élaboration des lois sur le respect du droit de propriété et en la simplification et la transparence des procédures de création d'entreprises. Docteur Benbitour citera au passage l'expérience de plusieurs pays, notamment l'Italie, la Bolivie et l'Argentine, pour en arriver à cette conclusion : « La privatisation peut fournir des opportunités de développement lorsqu'elle s'inscrit dans une stratégie globale de mobilisation de l'ensemble des ressources de la nation vers la prospérité. Elle peut être une menace réelle, lorsqu'elle exprime la fuite en avant d'un Exécutif manquant de dessein à long terme. »