La crise palestinienne qui dure depuis plus de 60 ans, avec son cortège de larmes, de sang de destructions, était condamnée à se pérenniser. Mais des indices prometteurs commencent à être perceptibles parmi eux, il faut citer avant tout la lutte coriace du peuple palestinien qui refuse de mourir et oppose une farouche résistance qui fait réfléchir les Israéliens, mêmes les plus extrémistes. En plus, de plus en plus de voix s'élèvent un peu partout dans le monde pour flétrir le pouvoir israélien et réclamer un Etat palestinien et sa part de Jérusalem. A ce titre, il faut souligner le discours du Caire d'Obama, qui, malgré quelques ambiguïtés et l'absence d'actes concrets, s'est déclaré nettement pour deux Etats palestinien et israélien et une même capitale. Cela est en complète rupture avec les discours agressifs, hargneux et guerriers de son prédécesseur. Mais au-delà de cette prise de position très importante d'Obama, ce discours est différent de tous ceux qu'on a entendus par un responsable américain et des tenants des pouvoirs en Occident. Jusque-là, on entendait surtout des voix qui présentaient l'Islam comme une religion réfractaire à la modernité. Des théologiens de circonstance, ergotant sur la vie de notre Prophète et du Saint Coran, y trouvent les sources de notre blocage intellectuel ainsi que les raisons de l'antagonisme de l'Islam et de l'occident. Mais Obama, en homme cultivé et désireux d'éviter le choc de civilisation qui serait inévitable, selon Huntington, a pu comprendre notre religion. Il a dû constater, comme tous les hommes de bonne volonté, que les massacres à grande échelle déplorés notamment lors des 2 guerres mondiales et de la guerre d'Irak, n'ont pas été le fait de notre Prophète et de ses guerriers. Certes, le monde musulman, qui est en pleine transition, n'échappe pas aux violences et aux convulsions qu'on a connues dans l'histoire des nations occidentales. Obama comprend mieux que quiconque que notre monde est traversé de soubresauts d'inquiétude, générés par une globalisation qui entraîne chômage et perte de la qualité de vie. Il a pu constater que certaines puissances, pour masquer leurs difficultés, veulent créer un conflit de civilisation. Obama veut s'écarter de cette paranoïa destructive pour emprunter le chemin d'un rendez-vous des civilisations. La lecture de l'Islam lui a permis de constater que notre religion est parfaitement adaptée au monde civilisé et là où beaucoup s'évertuent à montrer un visage hideux de l'Islam ; il reconnaît qu'il véhicule progrès et humanisme. Dès lors, il entrevoit des signes d'optimisme qui peuvent nous projeter dans un avenir où la diversité des traditions culturelles n'est pas une source de conflit, mais un témoignage de la richesse de l'histoire humaine. S'agissant du Président de la première puissance mondiale, il est important que sa voix soit entendue. Pour ce faire, toutes les bonnes volontés et notamment les écrivains, les philosophes, les décideurs doivent soutenir son action. De nombreuses voix se lèvent déjà pour nous inciter à le soutenir. Dans ce contexte, la palme revient au rédacteur en chef de l'observateur, Jean Daniel, qui, dans ses récents articles, ne cesse, avec des mots émouvants et justes, reprenant ses accents lorsqu'il s'attaquait à la guerre d'Algérie, à appeler à soutenir la démarche d'Obama. N'hésitant pas à déplaire à certains de ses coreligionnaires, il se prononce sans équivoque sur la création d'un Etat palestinien. Avec son sens de la pédagogie et de ses connaissances de l'histoire et de la politique, il explique pourquoi il revendique cet Etat et dénonce avec force la droite israélienne et le puissant lobby juif américain (l'AIPAC), qui soutiennent, sans réserve, les positions des faucons opposés à la paix. Il interpelle tous les intellectuels français et associations juives et musulmanes de toute la France pour dire non à l'extrémisme israélien et non à Benyamin Netanyahou qui vient de réitérer sa réticence à la création d'un véritable Etat palestinien. En fait, il demande à tout le monde, dirigeants et présidents de pays, aux sociétés civiles, de rompre avec leur silence et soutenir Obama. Il nous met devant nos responsabilités, et l'heure de l'action est arrivée pour tout le monde, car demain il sera trop tard. Comme le soulignait Carter, l'ancien président des USA et prix Nobel de la paix, la situation est tragique et la commununauté internationale est trop souvent indifférente aux cris de détresse des Palestiniens dont 1,5 million précise-t-il, vivent dans une situation jamais connue dans l'histoire d'une aussi grande communauté qui a été brutalement dévastée par des bombes et des missiles .Mais au-delà de l'appel aux intellectuels occidentaux, jusque-là connus par leurs déclarations partisanes, Jean Daniel interpelle le monde entier pour que les massacres cessent et que les Palestiniens puissent avoir le droit à un Etat souverain, dont Jérusalem serait la capitale. Les plus concernés devraient être les arabes et les musulmans qui sont intéressés en premier lieu. Tous les arabes dirigeants, souverains, présidents, sociétés civiles ou simples citoyens, qui, jusque-là sont restés timorés, ont une opportunité pour se racheter. Ils devront crier haut et fort que le peuple palestinien a assez souffert et que le dictat d'Israël n'a que trop duré. Le défunt président égyptien Sadate avait expliqué qu'en 1973, lorsqu'il a compris qu'il combattait l'Amérique, il a demandé à ses troupes d'arrêter la guerre. Aujourd'hui, le contexte est différent, les USA et beaucoup d'autres pays sont favorables à la création de l'Etat palestinien. Les Arabes, sans recourir à la guerre, ont entre leurs mains de nombreux atouts, et comme le disait un vers de Virgile, « ils peuvent s'ils décident de pouvoir ». Nous devons sortir de notre léthargie et être au rendez-vous de l'histoire. Tout le monde sait que parfois le silence tue et si nous restons silencieux, on participera, quelque part, au génocide des Palestiniens. Mais pour être crédibles, ils devront aussi tout entreprendre pour inciter les factions palestiniennes à mettre un terme à leurs différends et afficher une solidarité à la face du monde. Ainsi, les Israéliens n'auront plus l'excuse de garder une certaine audience dans certaines capitales occidentales en prétendant qu'ils ne peuvent pas faire la paix, car ils ne trouvent pas de partenaires valables. Il faut que tout le monde comprenne, et le dernier discours du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, « si besoin est là pour lever toute équivoque » que si la paix n'est pas rétablie est le fait d'Israël qui campe sur ses positions extrémistes . Obama est un homme d'ouverture, il a besoin d'être aidé, et le monde arabo-musulman commettrait une erreur historique s'il ne saisit pas cette occasion pour lui prêter assistance et réclamer les droits des Palestiniens. Ils devront le faire maintenant, car demain il sera peut être trop tard.