Ahmed Qoreï, Mahmoud Abbas et Marouane El Barghouti, sont les trois personnalités pressenties pour prendre la suite de Abou Ammar L'optimisme affiché, hier, par Leïla Chahid, la déléguée générale de la Palestine en France, qui déclarait que Yasser Arafat n'était “absolument pas” en état de mort cérébrale, mais dans un coma réversible “entre le vie et la mort” et le renchérissement aux relents tout aussi optimistes de Jacques Chirac qui, depuis Bruxelles, assurait que le patient était “entre les mains d'excellents médecins…”, n'ont pas empêché la question de se poser en Palestine même, mais aussi partout dans le monde : qui succédera à Arafat ? On sait que le président de l'Autorité palestinienne a toujours rechigné à organiser sa succession. À moins qu'il ne l'ait fait dans le plus grand secret et à l'insu même de ses plus proches collaborateurs comme le laissait entendre, hier, le quotidien israélien Maariv. Selon ce journal, qui affirme tenir l'information de “hauts responsables palestiniens”, Arafat aurait rédigé un testament dans lequel il désigne comme successeur l'actuel chef du département politique de l'OLP, Farouk Kadoumi. Yasser Arafat aurait remis ledit testament à son épouse Souha ainsi qu'à son neveu. Le “scoop” de Maariv a toutefois été vite démenti, et de manière catégorique, par Ahmed Qorei, le Premier ministre palestinien qui a rappelé qu'il existe “une voie réglementaire”, prévue par la loi fondamentale palestinienne, pour désigner le successeur du président Arafat “si celui-ci venait à mourir” (voir encadré). Cette révélation du média israélien paraît procéder, en effet, de la pure intox, d'autant que Yasser Arafat et Farouk Kadoumi ne sont pas connus pour défendre toujours des positions communes, mais assez souvent pour leurs divergences. Faut-il rappeler que Kadoumi s'est établi, il y a dix ans, à Tunis, depuis qu'il a refusé de regagner les territoires occupés lors du retour victorieux de Yasser Arafat, en 1994. Un Arafat favorable aux accords d'Oslo confiant la présidence de l'Autorité palestinienne dans le plus grand secret à un Kadoumi qui les réfute, voilà qui achèverait de donner de Abou Ammar l'image d'un adepte de la politique de la terre brûlée, cette image-là que tente de lui coller volontiers Ariel Sharon. Mais tout cela n'enlève pas à Kadoumi la qualité de candidat potentiel à la présidence de l'Autorité palestinienne. Il figure quasiment dans toutes les listes des successeurs probables établies par plusieurs journaux de la presse internationale dans leur édition respective d'hier. On y trouve également Mahmoud Abbas (Abou Mazen), un ancien Premier ministre qui a pris ses distances avec l'Intifadha et qui est allé jusqu'à démissionner de son poste. Les conflits qui l'opposaient à Arafat n'étaient pas étrangers à cette démission, même s'ils n'étaient pas les seuls facteurs à avoir pesé lors de ce retrait. On cite également comme candidat à la succession, Ahmed Qorei, l'actuel Premier ministre, jugé “modéré et pragmatique” et qualifié de “proche” de Arafat. Un des hommes clés des forces de sécurité palestiniennes, Mohamed Dahlan, l'ancien chef de la sécurité de Gaza qui avait démissionné de son poste pour protester contre la lenteur des réformes engagées au sein de l'Autorité palestinienne est présenté, lui, comme un prétendant redoutable, de même que Jibril Rajoub, conseiller pour la sécurité nationale auprès de Yasser Arafat et autre figure des forces de sécurité palestiniennes, ou encore Marwan Barghouti, actuellement emprisonné en Israël après sa condamnation pour meurtre par un tribunal israélien, une candidature, certes, beaucoup moins probable. Reste les groupes et organisations islamistes et, notamment, leur principal porte flambeau, le mouvement Hamas qui, de toute évidence, va tenter, dans ces moments de recomposition forcée de l'Autorité palestinienne, de conforter ses positions sur la scène palestinienne, voire au sein mêmes des institutions. S'il est quasiment acquis qu'aucun des dirigeants des mouvements islamistes ne viendrait se placer en candidat à la succession de Arafat à la tête de l'Autorité palestinienne, Hamas va sans doute tenter de peser dans le choix du futur chef de l'Etat palestinien. En tout état de cause, ni Hamas ni les autres mouvements ne semblent vouloir embraser Gaza. Selon un responsable de la sécurité de cette région, il y aurait, dans ces moments difficiles, “un haut niveau de coopération entre les différents mouvements et instances de la sécurité palestinienne pour contrôler la situation et faire régner l'ordre”. Mais ce même responsable a affirmé qu'“il n'y a pas de nouveaux accords” avec le Jihad ou le Hamas. Rien n'est gagné, en somme. Ce que prévoit la loi palestinienne La loi fondamentale palestinienne, équivalant à un texte constitutionnel, stipule que le président du Parlement (le Conseil législatif palestinien), actuellement Rahoui Fattouh, assure la présidence pour une période maximale de 60 jours, le temps nécessaire à l'organisation de l'élection devant consacrer un Président pour un mandat de cinq ans. Pendant la période intérimaire, l'ancien Premier ministre, Mahmoud Abbas, dit Abou Mazen, deviendrait le président du Comité exécutif de l'OLP, qui représente le peuple palestinien auprès des gouvernements étrangers et des organisations internationales. Le Premier ministre, Ahmed Qoreï, garderait son poste à la tête du cabinet pour gérer les affaires courantes du gouvernement palestinien. Il assurerait, également, la présidence du Conseil de sécurité nationale dont sont membres les principales forces de sécurité palestiniennes. F. L.