Malheureusement, la direction de la Chambre de l'artisanat et des métiers a sans doute agi dans la précipitation pour trouver le local adéquat. En effet, c'est au niveau du centre de broderie de Cherchell, que les initiateurs de la direction de la CAM de Tipasa, certainement par ignorance et méconnaissance du passé de ce centre de broderie, ayant de surcroît assuré la formation de générations de jeunes artisanes depuis des décennies, ont domicilié le centre d'estampillage des tapis traditionnels. Il existe un seul artisan dans la wilaya de Tipasa qui estampille les tapis. Cet artisan a bénéficié d'une formation accélérée. L'estampillage, c'est l'homologation des œuvres d'art, qui garantit l'authenticité du tapis traditionnel. Celui-ci ne peut pas être exporté s'il n'a pas la signature. L'estampillage est classé selon plusieurs niveaux. Tout dépendra du résultat de l'analyse, en matière de dimensions (largeur, longueur, diagonale), du nombre de points au cm2, des motifs, de la qualité de la laine et des couleurs, du poids, du tassage, avant la délivrance du certificat de qualité du tapis. Nombreuses sont les tapissières qui travaillent chez elles, et se rendent par la suite au centre d'estampillage pour donner une marque, un label à leur tapis, avant de le commercialiser. Au moment où le centre d'estampillage tente de se frayer un chemin pour entamer son aventure, le centre de broderie s'effrite et voit ses «précieux produits» se disperser dans l'univers. Certaines jeunes artisanes persévérantes continuent à fréquenter le centre de broderie «désert» pour perpétuer la tradition. Aucun soutien Lors d'une manifestation organisée à Tipasa, des artisanes tapissières se sont présentées à la Maison de l'artisanat – encore un espace livré à l'abandon – pour faire examiner leurs tapis fabriqués dans leurs ateliers. Elles sont venues des différentes localités des wilayas de Tizi Ouzou, Adrar, Tipasa pour décrocher le certificat (original guaranteed) du Centre régional d'estampillage de Tipasa (CRAFT of Algeria). Le secteur de l'artisanat continue à végéter dans les sous-sol et les labyrinthes. Les politiques conçues pour sa relance n'ont jamais fait l'objet d'une attention sérieuse de la part des gouvernements, y compris à l'échelle locale, à l'instar de nombreux autres secteurs d'activité utilisateurs d'une forte main-d'œuvre. L'artisanat algérien, marginalisé depuis des lustres, mérite aujourd'hui une prise en charge qui ne devra sans aucune manière s'articuler autour des réunions stériles dans les grands hôtels et les voyages de complaisance à l'étranger des décideurs, mais bel et bien d'une politique concrète qui encourage les «fées» algériennes qui souffrent en silence dans leurs ateliers, en milieu urbain et en milieu rural. La laine a été remplacée par les fils synthétiques aux différentes couleurs pour produire des tapis. Le tapis algérien traditionnel est aujourd'hui menacé de disparition. Mais à quoi sert le centre d'estampillage du tapis, si les artisans ne bénéficient pas concrètement d'un soutien de l'Etat ?