La représentation diplomatique des USA en Algérie a réalisé, lundi et mardi derniers, sa première entreprise artistique d'envergure en invitant à Oran puis à Alger une chanteuse de gospel et de spirituals. Manda Djinn, encore toute retournée par l'accueil du public oranais, s'est confiée dans une conférence de presse à l'ambassade des Etats-Unis à Alger, avant de se produire à l'opéra du square Port Saïd. De son récit, la chanteuse s'avère une fugueuse invétérée. Elle a quitté son quartier de Brooklyn (New York) pour s'établir et chanter en France. « A cause du racisme », explique-t-elle. « Un peu pour la carrière », aussi. Le soir venu, c'est l'ambassadeur des Etats-Unis qui a présenté le genre musical et l'artiste sur les planches du Théâtre national d'Alger, qu'il a confondu malencontreusement avec un théâtre régional. Une intrusion scénique tout à fait remarquable, car précédée d'un dispositif de sécurité indétachable. Le concert est « un cadeau du peuple américain au peuple algérien », a-t-il affirmé. La venue de Manda Djinn en Algérie s'est réalisée grâce à l'entremise de l'ambassade américaine en France. Les spirituals et le gospel, au menu mardi soir, puisent leur charme dans la quête musicale d'esclaves noirs d'un monde meilleur. Celui-là, impossible sur terre et sous le joug des « maîtres » blancs, est transposé dans une dimension mystique. Le Christ et son paradis en sont l'aboutissement salvateur. Manda Djinn a interprété les pièces les plus importantes de ce répertoire, I Saw The Light, Joshua Fit The Battle Of Jericho, Let My People Go et, bien sûr, l'indétrônable Oh Happy Day. Après une pause de quinze minutes, le pianiste Roland Chammougoum, fougueux interprète de Trouble In My Way, cède la place à une guest-star bien particulière. C'est la première surprise de la soirée. Richard Erdman, ambassadeur des Etats-Unis en Algérie, affiche sa généalogie en interprétant au piano une ballade irlandaise, Danny Boy. Acclamations du public sur la sortie de l'ambassadeur, toujours aussi bien encadré de vigiles. Faïz, du groupe algérois Index, a rejoint la scène muni d'un bendir et a accompagné les invités sur Kumbaya, une pièce du gospel traditionnel. Le résultat a été un gnawi-gospel, une rencontre contre nature de deux mysticismes, où chacun son Dieu.