Le tribunal a été saisi pour annuler les actes de cession de terrains dont ont bénéficié, il y a 18 ans, les concernés dans la zone d'activité de Seddouk pour lancer des projets industriels, mais qui, au final, n'ont créé aucune activité depuis. Cette information a été confirmée par Mme Bouzidi, directrice de l'Agence foncière de wilaya. En 1992, une trentaine de personnes, se présentant comme des porteurs de projets, avaient acquis des terrains auprès de l'Agence foncière communale de Seddouk (aujourd'hui dissoute) en s'engageant à créer des entreprises et des emplois. Dix-huit ans plus tard, rares sont les très petites entreprises (TPE) qui sont aujourd'hui entrées en activité dans cette commune. Avant d'enclencher des poursuites judiciaires, l'agence foncière a adressé des mises en demeure aux concernés afin de «se conformer au cahier des charges qui oblige tout acquéreur à lancer un projet. Faute de quoi, la transaction foncière sera déclarée nulle et non avenue par la juridiction compétente» Cette opération d'assainissement, autrement dit de récupération des terrains publics cédés et détournés de leur vocation industrielle, «est généralisée à toutes les zones d'activité (ZAC) implantées dans la wilaya», s'engage l'agence foncière. C'est le cas notamment de la ZAC de Toudja, Timzrit et d'El Kseur et bien d'autres foyers économiques, où des mises en demeure ont été adressées aux acquéreurs n'ayant pas respecté leurs engagements. Dans une wilaya qui est déjà l'une des plus pauvres en terrains susceptibles d'accueillir des foyers économiques, le détournement du foncier public acquis de sa vocation industrielle à des fins spéculatives est un sérieux gaspillage qui handicape l'investissement. Les anciennes agences communales avaient fait des ravages. Le temps est à présent à l'assainissement du foncier. Faible portefeuille foncier Il y a cinq ans, les biens privés du foncier communal avaient été confiés à l'Agence foncière de wilaya, qui a un statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). L'Agence a hérité du portefeuille foncier de dix agences foncières communales dissoutes. Elle dispose actuellement de 16 ZAC à travers la wilaya. Cet organisme public, à qui l'on a confié, entre autres missions «d'aménager les zones d'activité», a hérité un portefeuille foncier des plus chétifs : «Sur 58 lots, 44 ont déjà été cédés (61 733 m2). Il reste encore 2,7 ha de terrains disponibles répartis à travers plusieurs ZAC et 21 ha à Remila», indique Mme Bouzidi. «La quasi-totalité de la maigre réserve initiale a été épuisée par des cessions puis par des concessions à la faveur de ventes aux enchères publiques», relate la même responsable. Ces dernières années, «les mises à prix de cession avaient varié en moyenne entre les 3 500 à 5000 DA le mètre carré», avait déclaré l'ancien directeur de l'agence foncière de wilaya. Lors des adjudications, le Conseil d'administration, formé de l'exécutif de la wilaya et d'élus locaux et présidé par le wali, valide les mises à prix qui dépendent de plusieurs paramètres : la valeur vénale du terrain et le coût de sa viabilisation. A l'avenir, l'agence pourra également s'inspirer de la mercuriale des prix du foncier industriel qu'a élaboré l'Agence nationale d'intermédiation et de régulation foncière (Aniref). Depuis cinq ans, l'agence foncière de wilaya a procédé à des cessions puis à des concessions au profit des investisseurs pour lancer des projets industriels. Une première opération avait été lancée en janvier 2007. Après des avis publiés dans la presse, le conseil d'administration de l'agence a décidé de céder en gré à gré trois lots à Toudja (1 600 m², 2 020 m² et 2 418 m²) et 4 lots à Helouane, près d'Ighzer Amokrane (1921 m², 1240 m2, 996 m2 et 1232 m2), deux assiettes à Fenaïa (600m² et 710m²) et deux autres terrains à Souk El Thnine (466 m² et 410m²). Une deuxième opération a été lancée par adjudication, en décembre 2007. Quatre lots de 4000 m² avaient été cédés à Taharacht (Akbou ), deux parcelles à Oued Ghir (500 m2) et à Helouane (3205 m2). Deux autres opérations d'adjudication avaient été lancées en février puis en juin 2008, ont permis la cession de deux lots à Toudja (1289 m2 et 1670), trois terrains à Taharacht (4500 m2, 3000 m2 et 2000 m2) et une parcelle de 1005 m2 à Toudja. Trois mois plus tard, (1er septembre 2008), une ordonnance est promulguée pour instaurer un régime de concession pour le foncier industriel. L'ordonnance met fin aux cessions et instaure un régime de concession pour une durée minimale de trente-trois (33) ans renouvelable et maximale de quatre-vingt-dix-neuf (99) ans. En juin 2010, huit lots ont été concédés à raison de 50 à 210 millions de centimes de charge locative par an. Quatre terrains ont été concédés à Taharacht (deux de 2025 m2, une parcelle de 1690 m2 et une assiette de 1000 m2) et quatre lots à Toudja (deux terrains de 1140 m2, un de 1005 m2 et un autre de 1222 m2).
Des terrains en jachère Béjaïa a vu la création de plusieurs zones d'activité, à l'image de Taharacht, Larbaâ à Toudja, Fenaïa, Oued Ghir et Helouane. Mais depuis plusieurs années, l'accès au foncier se heurte à de sérieuses difficultés. L'implantation des PME fait face au manque de foncier. C'est la création de nouvelles zones d'activité et la viabilisation de celles qui sont en jachère depuis des années qui détiennent tous les leviers. Au moment où l'on avance «une tendance vers la saturation foncière», il est des zones qui sont restées en jachère, deux décennies après leur création. C'est le cas d'un terrain censé accueillir une ZAC à Fenaïa Ilmaten créée en 1989, mais qui depuis, est laissé en jachère. «Actuellement l'agence foncière a établi une étude qui est en cours d'approbation par les services de la DUC et de l'hydraulique. La situation de cette ZAC sera donc débloquée dés l'approbation de cette étude», affirme Mme Bouzidi. A Remila, près de Sidi Aïch, un autre terrain de 21 ha est censé servir de zone d'activité. Il attend, depuis huit longues années, d'être viabilisé. «Un concours a été lancé par l'ex agence et un bureau d'étude a été retenu mais aucune étude n'a été élaborée du fait du gel des agences», indique Mme Bouzidi. Des zones en piteux état Par ailleurs, en dépit des promesses récurrentes des pouvoirs publics, portant sur leur réhabilitation, beaucoup parmi les zones d'activités implantées sur le territoire de la wilaya sont dans un piteux état. C'est le cas de la ZAC d'Akbou, qui s'étale sur 44,8 ha, en proie à la dégradation. «La voirie est dégradée, l'éclairage public est défaillant et le plus grave: les entreprises n'ont pas accès à l'eau et ne disposent pas d'un réseau d'assainissement», se plaint un chef d'entreprise. Une station d'épuration promise depuis de longues années tarde à voir le jour. Résultat, l'environnement en prend un sérieux coup. Jusqu'à fin 2010, ces zones d'activité ont été gérées par les communes. Avec des budgets dérisoires et des instances élues souvent instables, ces communes n'ont pu assurer une gestion efficiente de ces zones. «La wilaya nous a promis, récemment de prendre en charge ces problèmes. Nous espérons que ce sera le cas rapidement», s'impatiente le même patron de PME. Un PDAU qui attend dans les tiroirs A cet environnement précaire qui prévaut au sein des ces zones, s'ajoute la rareté du foncier. Faute de foncier, on attend toujours les installations d'entreprises à forte valeur ajoutée et leurs emplois. Pour palier à cette asphyxie, et pour répondre à des besoins économiques grandissants, un instrument est venu projeter Béjaïa dans le long terme : un plan d'aménagement urbain (PDAU) intercommunal élaboré en 2006, projeté sur 30 ans, a prévu la «création de nouveau foyers économiques.» Le Plan prévoit l'extension de la ville de Béjaïa vers Oued Ghir sur 320 ha. Un pôle industriel est prévu à El Kseur. «La production économique devra puiser son essence d'une seule matrice qui est celle d'aller vers la création de pôles de compétitivité», plaide un urbaniste. «Le tourisme et l'agroalimentaire» y tiennent une place prépondérante. Wilaya balnéaire, Béjaïa a certes une vocation touristique, mais elle a également su, en quelques années, se faire une sacrée réputation de pôle agroalimentaire. «60% de la demande en investissements porte sur l'agroalimentaire», révèle l'agence nationale du développement de l'investissement (ANDI). La ZAC d'Akbou a ouvert la voie. Les PME, qui y sont implantées ces dernières années, ont atteint une dimension nationale voire internationale. Le reste du tissu économique est constitué du bâtiment et de la petite industrie. Mais la capitale des Hamadites compte surtout sur le tourisme pour rattraper les retards dans son développement et devenir un pôle attractif et pourvoyeurs en emplois durables. Un futur pôle touristique projeté à l'est du littoral, constitue une sérieuse alternative pour créer des emplois durables. L'agence foncière de wilaya dispose de deux terrains qu'elle compte mettre en vente: la zone d'activité touristique (ZAT) de Melbou (21 ha), et Tala Khaled à Aokas (11 ha). Une étude portant sur leur aménagement est en cours. Toutefois, tout cela n'est pour l'heure que des idées transcrites sur les planches des services de l'urbanisme. Le PDAU a déjà cinq ans, mais sa concrétisation est loin d'être effective. En attendant, la pénurie en terrains continue de plomber l'investissement.